OIF : un Burkinabè en Roumanie

Depuis sa création en 2006, le programme de volontariat au sein de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) permet d’offrir à des jeunes une première expérience à l’international. 50 volontaires se sont envolés le 2 octobre dans leur pays d’affectation pour une durée de 12 mois. Rencontre avec l’un d’eux, Amadou Désiré Thiombiano, un Burkinabè de 29 ans, qui va poser ses valises en Roumanie afin d’aider des jeunes marginalisés à se réinsérer dans la vie sociale.

Le Burkinabé Amadou Désiré Thiombiano s’envole pour 12 mois en Roumanie. © DR

Le Burkinabé Amadou Désiré Thiombiano s’envole pour 12 mois en Roumanie. © DR

Publié le 10 octobre 2011 Lecture : 4 minutes.

La persévérance finit toujours par payer. Le jeune Burkinabè, Amadou Désiré Thiombiano,avait déjà postulé l’année dernière en vain au Volontariat internationale de la Francophonie (VIF), organisé par l’OIF. Il vient enfin d’être retenu parmi les 50 heureux élus sur 3260 candidats. Né à Fada N’Gourma, il a su très tôt qu’il consacrerait sa vie aux autres. À 18 ans déjà, il occupe ses premières responsabilités au sein de l’Unesco. Sa devise : « Apprends à te connaître à travers les autres et deviens qui tu veux être ». Faire fortune ? Ce n’est pas ce qui le fait vibrer. « Plus tard, je souhaite être un des grands acteurs participant énergiquement au développement durable et équitable de mon pays. » affirme-t-il avec conviction. En attendant, Amadou a été affecté au sein de l’association STEA en Roumanie en tant qu’animateur des activités éducatives.

Derrière cette appellation générale, se cache une réalité plus complexe et difficile. Le volontaire va être en charge des jeunes de la rue, âgés de 5 à 30 ans. Son objectif principal : les réinsérer au plus vite dans la vie sociale. C’est une mission sur mesure pour Amadou, à la hauteur de ses qualifications et de son expérience. En effet, après s’être spécialisé en psychologie sociale du travail à l’Université de Ouagadougou, Amadou Désiré est entré au service de l’ONG Pugsada dans la capitale. Il était chargé de projet sur le harcèlement sexuel en milieu scolaire.

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« Les victimes le plus souvent sont des jeunes filles et leurs agresseurs, des éducateurs ou des enseignants. » Mais pas toujours ! « Il arrive aussi que des jeunes filles harcèlent leur professeur, le suivent jusque chez lui, en lui faisant des propositions indécentes, dans le but d’obtenir de bons résultats ou leur diplôme », raconte le nouveau volontaire international de la Francophonie, qui est de tous les combats. Il a trop vu d’inégalités autour de lui pour rester aujourd’hui les bras croisés.

Sauver par la parole

Amadou s’est envolé dimanche 2 octobre à destination de Bucarest puis de Satu Mare (nord-ouest de la Roumanie). Doté d’un réel leadership, il s’est fixé deux semaines pour appréhender la situation sur le terrain. Dans quinze jours, il présentera un plan d’accompagnement. « Ce ne sera pas un plan statique mais au contraire dynamique, qui s’adaptera au fil de mon mandat » précise-t-il. A l’issue des douze mois, il proposera un projet de prise en charge psycho-sociale pour ces jeunes roumains marginalisés.

Son arme de prédilection est la parole. Dans son pays, pour l’Association Pugsada, il a déjà mis en place plusieurs stratégies de communication afin de sensibiliser les autorités administratives, les élèves, les enseignants et favoriser le dialogue entre les parents et leurs enfants. « Les parents doivent prendre le temps de s’occuper d’eux, d’écouter ce qu’ils ont fait dans la journée… », explique-t-il.

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Dans le centre de prise en charge au Burkina Faso, le personnel gère en permanence une vingtaine de jeunes filles. Amadou leur répète souvent : « tout ce que tu fais sans moi, tu le fais contre moi », ce qui sous-entend qu’elles doivent sortir du silence afin qu’il puisse les aider le plus efficacement possible.  « Au Burkina Faso, si une jeune fille tombe enceinte, elle est immédiatement chassée de sa famille », déplore –t-il. « De plus, aucune loi ne réprime le harcèlement sexuel en milieu scolaire. » Amadou a mobilisé les institutions étatiques afin de combler ce vide juridique. « Ils étaient favorables », se réjouit-il, tout en espérant que les choses auront bougé à son retour dans un an.

"Au Burkina Faso, 52% des femmes sont marginalisées"

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Avant de rentrer au Burkina Faso, littéralement « le pays des hommes intègres », il a un beau challenge à relever en Europe de l’Est. Bien conscient que cette expérience lui servira de tremplin professionnel, Amadou ne perd pas de vue son projet initial : réduire les inégalités criantes dans son pays. « Au Burkina Faso, 52% des femmes sont marginalisées, alors qu’elles seraient capables d’apporter beaucoup de choses à leur pays ! » s’indigne-t-il.

À la question « quel homme africain admirez-vous le plus ? », le jeune burkinabè répond sans l’ombre d’un doute « « feu son excellence camarade président Thomas Sankara », pour ses idées révolutionnaires et ses ambitions de lutte contre les inégalités. » (Thomas Sankara  était un leader politique burkinabè, anti-impérialiste et panafricaniste, il a été assassiné lors du coup d’État qui amena Blaise Compaoré au pouvoir le 15 octobre 1987, NDLR).

À l’instar des 49 autres volontaires, Amadou est en admiration devant le Secrétaire général de l’OIF, Abdou Diouf. C’est un honneur pour Désiré d’avoir échangé quelques mots avec celui qui incarne à ses yeux la sagesse africaine et qui s’est battu toute sa vie pour la démocratie, les droits de l’homme, l’éducation et bien sûr la défense de la langue française.

Une ancienne volontaire de la promotion 2010 a conclu le stage de formation, qui s’est déroulé du 26 septembre au 2 octobre, en disant aux jeunes recrus : « Cette expérience de volontariat est un lingot d’or, à vous d’en faire de magnifiques bijoux polis ».

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