Le
traitement de la maladie d'Alzheimer :
bilan et perspectives
Christine
BOUCHET
1er
septembre 1999
suite (2/3)
Vue
d'ensemble de l'Alzheimer
Historiquement,
lun des premiers cas de démence décrit dans la littérature
scientifique remonte à 1785. Esquirol, en 1838, souligne la part
des troubles émotionnels dans le syndrome démentiel. Le médecin
allemand Alois Alzheimer donne en 1906 la description de la maladie,
associant hallucinations, épisodes délirants paranoïaques, comportements
aberrants avec dissimulations dobjets.
L'Alzheimer
est la forme de démence la plus fréquente. Elle associe un déficit
des fonctions intellectuelles dans de multiples champs du psychisme,
une altération de la personnalité et du contrôle émotionnel, particulièrement
évidente dans les relations sociales, et enfin des troubles neurologiques.
Cette dégradation se fait sur un mode progressif et irréversible.
Le
poids socio-économique de la maladie est considérable. Elle touche
aux Etats-Unis plus de 4 millions de personnes et la National Foundation
of Brain Research en a évalué le coût en 1991 à environ 1 milliard
de dollars. Plus de 360 000 personnes en seraient atteintes
en France à ce jour, et près de 8 millions en Europe.
Les
facteurs de risque
Le seul facteur
de risque manifeste de la démence de type Alzheimer actuellement
réellement identifié est lâge.
Les
traumatismes crâniens, la carence en oestrogènes et un faible niveau
éducatif ont également été évoqués.
Des
facteurs protecteurs potentiels ont été décrits : l'étude Paquid,
enquête épidémiologique ayant porté sur 4000 personnes de plus de
65 ans, a montré qu'une consommation modérée de vin ou de bière,
et le fait de garder une activité manuelle ou intellectuelle diminuait
le risque de développer la maladie.
Certaines formes rares de la maladie sont héréditaires et touchent
les sujets de moins de 60 ans, elles concernent seulement 300 familles
dans le monde dont onze en France. Trois des gènes responsables
ont été identifiés.
La forme tardive de la maladie d'Alzheimer (après 60 ans) est beaucoup
plus fréquente. Elle serait liée à un gène présent chez 20%
de la population. L'altération de ce gène ne provoque pas nécessairement
la maladie, mais augmente par trois ou quatre le risque de la développer.
Pour des raisons éthiques, les tests de dépistage génétiques sont
encore réservés à la recherche. En effet il n'y a aucun intérêt
à avertir un patient du fait qu'il risque de développer un Alzheimer
tant qu'il n'existe pas de traitement curatif.
Mécanismes
de la maladie
La
maladie d'Alzheimer est plus fréquente chez les sujets très âgés,
elle ne résulte cependant pas d'un effet naturel du vieillissement.
Elle se traduit par des lésions précises au niveau du cerveau :
accumulation de plaques séniles (dépots amyloïdes) et dégénérescences
neurofibrillaires. On décrit également une atrophie du cortex cérébral,
avec dilatation des ventricules.
Ces
lésions dégénératives atteignent les régions cérébrales impliquées
dans le fonctionnement de la mémoire, du langage, des fonctions
de reconnaissance et de la réalisation gestuelle.
L'atrophie
cérébrale qui résulte de la dégénérescence s'accompagne de la diminution
de certains neuromédiateurs, substances qui permettent la transmission
des informations du cerveau vers le corps. En particulier, le déficit
en acétylcholine peut atteindre 90% dans les stades sévères. La
mise en évidence du rôle de l'acétylcholine a d'ailleurs ouvert
la voie vers les premiers traitements spécifiques.
Données
épidémiologiques
La
maladie d'Alzheimer représente près de 70% des cas de démence.
La
prévalence de la maladie (proportion d'une population qui est atteinte
à un moment donné) double tous les 5 ans à partir de 65 ans pour
atteindre 32% de la population chez les plus de 90 ans. Avant 75
ans l'incidence est plus élevée chez les hommes, alors qu'au delà
elle augmente plus chez les femmes.
La
population française vieillit considérablement. Les personnes âgées
de plus de ans étaient 3 000 en 1945, il y en a 80 000
aujourd'hui et les estimations prévoient qu'elles seront 700 000
en 2050. Le nombre de patients atteints augmente donc régulièrement.
En 1999, la maladie d'Alzheimer touche 360 000 personnes
en France. En raison du vieillissement de la population, il y en
aura 100 000 de plus dans 20 ans.
En
Europe, le nombre de personnes atteintes de maladie d'Alzheimer
ou de syndromes apparentés en l'an 2000 est estimé à 8 million,
soit 2% de la population âgée de plus de 65 ans. D'après le National
Institute of Health, l'Alzheimer toucherait plus de 4 millions de
personnes aux Etats Unis.
Comme
la population atteinte est âgée voire très âgée, une thérapeutique
qui pourrait retarder l'émergence de la maladie en diminuerait considérablement
la prévalence. L'espérance de vie moyenne ne dépassant pas 80 ans,
et 2/3 des cas étant dépistés après 75 ans, on estime que retarder
les symptômes de la maladie d'Alzheimer de cinq ans équivaudrait
à faire diminuer le nombre de cas de 50%.
Diagnostic
Le
diagnostic de la maladie dAlzheimer est avant tout un
diagnostic d'exclusion, c'est à dire qu'il faut auparavant
éliminer les autres causes de démence : syndrome dépressif, démence
d'origine vasculaire, hydrocéphalie, tumeur cérébrale. Il repose
ensuite sur une association de signes cliniques, les résultats des
tests neuropsychologiques, et des signes radiologiques. Il n'existe
pas de marqueur biologique spécifique, et seule une autopsie mettant
en évidence, a posteriori, les lésions cérébrales spécifiques, permet
de faire un diagnostic de certitude. Cet examen montre d'ailleurs
qu'il y a environ 15% d'erreurs de diagnostic clinique.
La
maladie d'Alzheimer se développe à bas bruit pendant plusieurs années
avant que les symptômes n'apparaissent, c'est la phase pré-clinique
pendant laquelle les symptômes sont absents ou mineurs.
Les
premiers signes cliniques sont les problèmes de mémoire, concernant
surtout les faits récents, avec une progression lente et continue.
Apparaissent ensuite des difficultés à accomplir les tâches domestiques,
comme téléphoner ou préparer un repas, puis des troubles du comportement
comme l'agressivité ou la méfiance, et des perturbations dans la
vie émotionnelle et affective. Par la suite surviennent des difficultés
à communiquer, puis des problèmes d'orientation dans le temps et
dans l'espace, des troubles gestuels et l'impossibilité de reconnaître
les visages, aboutissant à une perte totale d'autonomie. Le décès
survient en moyenne après 7 ans d'évolution de la maladie.
On
décrit donc classiquement la maladie d'Alzheimer comme l'aggravation
progressive des "quatre A" : Amnésie, Apraxie
(troubles gestuels), Aphasie (troubles du langage), et Agnosie (trouble
de la reconnaissance des objets).
Le
développement d'essais cliniques dans la maladie dAlzheimer
a accéléré la réflexion sur les critères diagnostiques, afin de
permettre des inclusions homogènes, ou du moins comparables, reproductibles
dune étude à lautre.
La
communauté scientifique internationale sest ainsi accordée
pour préconiser, tant dans les études épidémiologiques que dans
les études cliniques, lutilisation de différents types de
critères diagnostiques :
Les critères du DSM IV élaborés par l'American Psychiatric Association
permettent d'évaluer la démence. Ils comprennent essentiellement
l'association d'un trouble de la mémoire et d'autres fonctions cognitives
retentissant sur les activités socio-professionnelles et entraînant
un déclin par rapport au fonctionnement antérieur.
Les critères diagnostiques du NINCDS/ADRDA (National Institute
of Neurological and Communication Disorders and Stroke / Alzheimers
Disease and Related Disorders Association) sont en revanche spécifiquement
définis pour le diagnostic dAlzheimer. Ils permettent détablir
trois niveaux de probabilité : maladie dAlzheimer possible,
probable, ou certaine.
Le test de Folstein ou Mini Mental Score (MMS) est destiné à
l'évaluation de la sévérité de la démence. Il explore l'orientation
temporospatiale, l'apprentissage, la mémoire, l'attention, le raisonnement,
le langage. Le patient répond à une série de 5 épreuves. Le score
maximum est de 30, un score entre 20 et 30 ne permet pas de conclure
mais le patient doit être revu après quelques mois, éventuellement
après un traitement d'épreuve anti-dépresseur. Un score inférieur
à 20 affirme des troubles importants qui doivent être explorés.
Il
faut citer aussi l'échelle de Mattis, les batteries du CERAD (Consortium
to establish a registry for Alzheimer's disease) ou la CAMCOG (section
cognitive du CAMDEX, Cambridge Mental Disorders of the Elderly Examination).
L'Adas-cog (Alzheimer's Disease Assessment Scale Cognitive) a été
élaboré pour suivre les patients et évaluer un effet thérapeutique.
Le
diagnostic de la maladie d'Alzheimer est relativement difficile
à la phase précoce. Il prend pourtant tout son intérêt depuis que
sont apparus les anticholinestérasiques, médicaments qui agissent
principalement dans les phases débutantes et modérées de la maladie.
Pour cela des nouveaux outils de dépistage sont proposés, par exemple
un algorithme construit par l'équipe Paquid et les laboratoires
Novartis.
Il se base sur le score IADL (Instrumental Activities of Daily Living),
le score MMS (Mini Mental State) et le niveau culturel. Il est mis
à la disposition du généraliste qui doit s'impliquer dans le dépistage
de la démence. Il est d'autant plus important que les généralistes
soient informés et concernés qu'ils connaissent bien les patients
et leurs familles et sont les plus à mêmes de détecter des troubles
débutants.
Par
ailleurs de nombreuses équipes tentent actuellement de trouver des
marqueurs biologiques de la maladie d'Alzheimer pour améliorer les
possibilités de diagnostic précoce.
L'imagerie
(scanner ou résonnance magnétique) permet d'apporter des éléments
intéressants, une atrophie d'une partie précise du cerveau, l'hippocampe,
étant un bon argument en faveur d'une maladie d'Alzheimer débutante.
Des
examens complémentaires sont également pratiqués pour éliminer une
autre cause de démence. Le scanner cérébral permet d'écarter une
tumeur ou un hydrocéphalie à pression normale, le bilan biologique
permet d'éliminer une encéphalopathie métabolique. Certains font
également un EEG, sachant que certains signes permettent d'étayer
le diagnostic d'Alzheimer.
La
cause de la maladie n'est pour l'instant pas connue, et il n'existe
donc aucun traitement curatif ni préventif. La thérapeutique disponible
pour l'instant permet seulement de diminuer les symptômes de la
maladie (traitement symptomatique), elle permet d'améliorer notablement
la qualité de vie des patients atteints.
Le
début des troubles est très souvent accompagné dun syndrome
dépressif réactionnel, la personne malade ayant au début une certaine
conscience de ses déficiences. Lun des premiers traitements
symptomatiques sera donc les antidépresseurs. C'est également un
"traitement d'épreuve", permettant de faire la différence
entre une dépression dans laquelle les troubles régressent nettement
sous traitement, et un syndrome démentiel. Les neuroleptiques permettent
quant à eux de réduire les troubles du comportement.
Enfin,
les anticholinestérasiques, mis sur le marché depuis peu dans cette
indication, ont prouvé leur efficacité dans les formes légères à
modérées de la maladie.
Les
inhibiteurs de la cholinestérase : une solution à la maladie d'Alzheimer
?
Les
inhibiteurs de la cholinestérase retardent l'évolution de la maladie.
La première molécule du type, la tacrine (COGNEX),
a été mise sur le marché en 1994 en France par le laboratoire Parke
Davis. Depuis sont apparues le Donépézil en 1997 (ARICEPT,
laboratoires Eisai
/ Pfizer)
et la Rivastigmine (EXELON,
Novartis
Pharma) en 1998.
Deux
nouvelles substances, le Métrifonate (Bayer)
et la Galanthamine (Janssen),
sont actuellement à l'étude en Europe et aux Etats-Unis. Le Métrifonate
est en fait actuellement utilisé dans le traitement d'une parasitose,
la schistosomiase.
Le
principe de ces molécules est de ralentir la destruction du neuromédiateur
acétylcholine au niveau cérébral. Pour cela elles bloquent l'action
de l'enzyme responsable de sa dégradation, l'acétylcholinestérase.
Cependant l'action de ces médicaments ne peut s'exercer que si des
récepteurs à l'acétylcholine existent encore dans le cerveau, c'est
à dire dans les formes légères ou modérées de la maladie.
Les
essais cliniques ayant montré l'efficacité des anticholinestérasiques
Les critères de jugement des essais cliniques sont des échelles
de mesure.
-
L'ADAS Cognitive (Alzheimer 's Disease Assessment Scale Cognitive)
qui évalue les différents aspects du langage, des fonctions
mnésiques, des praxies et de l'orientation. Le score peut aller
de 0 à 70, les scores les plus élevés correspondant aux altérations
les plus profondes.
-
La CGIC (Clinical Global Impression of Charge) est une échelle
d'impression clinique globale remplie par le clinicien après
entretien avec le patient et son entourage. Cette échelle cote
le changement du malade de 1 (" très amélioré") à
7 (" très aggravé"), un score de 1, 2, 3, indiquant
une amélioration.
-
Le CIBI (Clinical Interview Based Impression) est également une
appréciation globale du changement fondé sur un entretien direct
entre le clinicien et son patient mais sans information venant
de l'entourage.
-
L'IADL (Activities of daily living) et le PDS (Progressive Deterioration
Scale) sont deux échelles d'activités de la vie quotidienne
(préparation des repas, habillage, activités ménagères...) remplies
par l'entourage.
-
Le MMS (Mini Mental State).
Les
experts de la FDA estiment qu'un traitement de la démence doit améliorer
les fonctions cognitives, non seulement lors des tests, mais aussi
de façon globale, cliniquement perceptible lors d'un entretien,
et au moins stabiliser le comportement dans la vie quotidienne.
Pour eux, le meilleur moyen d'apprécier cette amélioration est de
compter le nombre de malades répondant à ces trois critères dans
chaque groupe. Par exemple : diminution d'au moins quatre points
de l'échelle ADAS Cog + amélioration ou stabilisation selon le score
CGIC ou CIBI + amélioration ou stabilisation aux échelle IADL ou
PDS.
Les
essais sur la Tacrine
La
Tacrine, premier médicament sur le marché en France, est une molécule
ancienne, utilisée dans les années 1950-1960 chez l'homme comme
antagoniste de la morphine. Depuis, son efficacité a été démontrée
dans la maladie d'Alzheimer.
L'étude
américaine de Davis, initiée en 1987, selon les recommandations
de la FDA, portait sur 632 patients. Elle a été la première étape
officielle permettant d'attribuer à la tacrine un réel bénéfice
thérapeutique, en termes d'amélioration symptomatique des patients
traités, en montrant des progrès à l'ADAS-Cog et à l'impression
générale de changement chez les patients traités.
L'étude
multicentrique de Knapp a inclus des patients âgés d'au moins 50
ans et présentant un Alzheimer léger à modéré d'après les critères
diagnostiques du NINCDS/ADRA. Tous étaient en bonne santé physique
et entourés de façon fiable à domicile de sorte à faire respecter
les conditions d'études. L'efficacité a été évalué pour les trois
principaux critères définis par la FDA : ADAS Cog, CIBI, IADL ou
PDS. 663 patients ont été inclus et répartis en 4 groupes : un groupe
sous placebo, et trois groupes soumis à des doses différentes du
traitement.
La
tacrine s'est révélée efficace comparée au placebo avec le CIBI
et l'ADAS-Cog. L'étude a montré que le traitement devait être d'au
moins douze semaines, et que l'efficacité était meilleure avec des
doses élevées. Cependant les doses élevées sont souvent mal tolérées,
et 70% des patients chez lesquels la dose avait été portée à 160
mg n'ont pas pu poursuivre l'étude jusqu'à la trentième semaine.
C'est finalement la dose de 120 mg/j qui a été retenue comme dose
optimale par les autorités de santé.
Cette
étude a donc affirmé l'efficacité thérapeutique dans la prise en
charge des patients, avec une amélioration de l'attention, de la
mémoire, du langage. Les gestes, les activités et les relations
dans la vie quotidienne sont facilités. L'aptitude des patients
à suivre et participer à une conversation, à faire usage du téléphone,
à identifier des repères temporospatiaux, à mener à bien des activités
quotidiennes comme toilette, habillage, tâches ménagères a été améliorée.
Le fait que ces activités puissent être facilitées de façon nettement
perceptible par l'entourage familial du patient, crée de plus un
effet psychologique important.
Les
essais sur la Rivastigmine
Une
première étude multicentrique a inclus 725 patients âgés de 50 à
85 ans, avec un diagnostic de maladie d'Alzheimer fondé sur les
critères du "Diagnostic and Statistical Manuel of Mental Disorders",
et des scores MMS compris entre 10 et 26 (maladie légère ou modérée).
Trois groupes ont été constitués : un goupe sous placebo, un groupe
recevant des doses basses (1 à 4 mg par jour) et un groupe recevant
des doses élevées (6 à 12 mg par jour). L'étude a duré 26 semaines,
et a montré une amélioration significative dans le groupe des doses
les plus élevées. Par ailleurs, le recueil des impressions des soignants
donnait le même résultat.
Le
développement de la molécule a également donné lieu à un vaste programme
d'étude de phase III, le programme Adema, portant sur plus de 3000
patients atteint de forme légère ou modérée de la maladie d'Alzheimer.
Trois échelles ont été utilisées : l'échelle cognitive ADAS-cog,
l'échelle fonctionnelle globale CIBIC-plus, et l'échelle de la vie
quotidienne PDS. Elles ont montré une amélioration significative
par rapport au placebo pour les doses de 6 à 12 mg par jour. Une
relation dose-effet linéaire a également été mise en évidence, c'est
à dire une augmentation de l'effet proportionnelle à la dose. La
posologie minimale efficace serait de 3 mg et la posologie maximale
autorisée est de 12 mg.
Les
effets indésirables rencontrés étaient surtout digestifs, nausées
et vomissements, disparaissant le plus souvent avec la poursuite
du traitement. Ont été notés également pendant la phase d'augmentation
des doses un amaigrissement, une somnolence et une anorexie, qui
étaient généralement améliorés par un ralentissement ou un arrêt
de l'augmentation posologique.
Au
total les anticholinestérasiques améliorent la qualité de vie des
patients, et ils ont montré qu'ils augmentaient les capacités cognitives
et les aptitudes des sujets dans la vie quotidienne.
Cependant
ils sont surtout efficaces pendant les deux ou trois premières années
de la maladie, et tous les sujets ne réagissent pas de la même façon.
Il semble qu'un tiers des patients soient améliorés, un tiers stabilisés
tandis que le dernier tiers ne répond pas au traitement. Les anticholinestérasiques
permettent de ralentir l'évolution des manifestations cliniques
de la démence, et donc de retarder l'institutionnalisation. Ils
feraient gagner en moyenne un an sur la dégradation normalement
observée chez les patients sans traitement.
Par
ailleurs les anticholinestérasiques, quand ils sont efficaces, permettent
également d'améliorer la qualité de vie de l'entourage, souvent
très affectée. Il a en effet été montré que les risques de dépression
ou de problèmes familiaux étaient élevés parmi les personnes prenant
en charge un patient atteint d'Alzheimer.
Les
effets secondaires des traitements
Les
anticholinestérasiques ne sont pas des traitements anodins. Les
effets secondaires digestifs sont relativement fréquents : nausées,
vomissements, diarrhée, anorexie. Des vertiges, des syncopes, des
troubles du sommeil peuvent également survenir.
La
tacrine, molécule de première génération mise sur le marché, a une
toxicité hépatique. Elle provoque une élévation réversible des transaminases
chez environ la moitié des patients. Cette hépatotoxicité dépend
de 4 facteurs : la susceptibilité des patients, le temps de traitement,
la dose administrée et les antécédents. Les enzymes hépatiques doivent
donc être surveillés très régulièrement chez les patients sous tacrine.
Les
traitements les plus récents comportent moins d'effets secondaires
que la tacrine, et sont mieux tolérés. La Rivastigmine a également
une durée d'action plus longue que les précédents, ce qui permet
de limiter les prises à deux par jour (contre quatre pour la tacrine).
Cependant, il est pour l'instant impossible de savoir s'il existe
une différence d'efficacité entre les trois produits existants sur
le marché, car aucun essai comparatif n'a encore été réalisé. Théoriquement,
la Rivastigmine est la plus spécifique.
Cependant,
les patients atteints de maladie d'Alzheimer auxquels on prescrit
des anticholinestérasiques justifient toujours d'une surveillance
particulière. C'est pourquoi la prescription initiale ne peut être
faite que par des médecins spécialisés en neurologie ou psychiatrie,
ou par des médecins possédant un diplôme de gériatrie ou gérontologie.
Les
nouvelles perspectives thérapeutiques
Concernant
les anticholinestérasiques, certains spécialistes pensent que l'effet
bénéfique serait supérieur s'ils étaient pris à un stade très précoce
de la maladie. Par ailleurs des études récentes auraient montré
que des facteurs génétiques seraient impliqués dans la réponse aux
traitement.
Outre
les anticholinestérasiques, qui sont des traitements à visée uniquement
symptomatiques, de nouvelles voies de recherche s'ouvrent pour la
prévention de la maladie. Il s'agit d'intervenir sur les facteurs
qui semblent favoriser la maladie pour retarder ou prévenir l'apparition
des plaques séniles et de la dégénerescence neuro-fibrillaire.
Le
traitement à base d'oestrogènes prescrit à la ménopause aurait un
rôle protecteur. Une étude californienne a montré que la prise d'oestrogènes
retarderait de 3 à 4 années le début de la maladie. Les antioxydants
sont également à l'étude et une étude multicentrique américaine
a montré que la vitamine E stabilisait l'état général du patient.
Les anti-inflammatoires auraient également une action protectrice,
une étude sur la prednisone est en cours avec 300 patients aux Etats-Unis.
La
consommation de tabac aurait également un rôle protecteur, la nicotine
stimulant la mémoire par son action au niveau de l'hippocampe. Les
chercheurs tentent donc de développer des molécules qui auraient
les avantages de la nicotine, sans avoir ses inconvénients notamment
cardio-vasculaires.
La
thérapie génique devrait également permettre de réaliser des progrès
thérapeutiques.
Suite
et fin (3/3)
1er septembre
199
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