Apple-wind : une micro-éolienne made in France
Eolienne à axe vertical, l'apple-wind est particulièrement adaptée à la ville et aux espaces périurbains où les vents sont souvent tourbillonnaires et omnidirectionnels.
Tout commence en 1930. L'ingénieur français Georges Darrieus met alors en place un concept de rotor constitué de deux profils disposés de part et d'autre d'un axe vertical dont leurs formes permettent de générer une portance, force motrice de l'éolienne.
Dans les années 1980, son concept est appliqué à grande échelle dans le parc Eole au Québec. D'une hauteur de 110 m de haut, le prototype conçu pour fournir une puissance de 4MW sera détérioré lors d'une tempête et, depuis, mis hors de fonctionnement.
Alain Burlot, alors stagiaire au laboratoire de Mécanique des fluides de l'Ecole Polytechnique, se passionne pour ces éoliennes à axe vertical dit de type Darrieus. Parallèlement, il observe d'un œil critique le boom des parcs d'aérogénérateurs de grande puissance. « Impact visuel du fait de leur gigantisme, bruit associé à leur fonctionnement, infrastructures à mettre en œuvre, maintenance difficile, pertes significatives liées au transport d'énergie », il ne manque pas de critiques vis-à-vis des éoliennes qui fleurissent un peu partout dans les zones de développement de l'éolien (ZDE).
En 2003, converti au concept de Darrieus mais très sceptique envers le "grand éolien", il se lance dans la conception d'une micro-éolienne à axe vertical, pensée pour s'adapter aux toits des entreprises, des particuliers et des exploitants agricoles. Après quatre ans de réflexion au sein d'Apui, l'incubateur technologique de l'Ecole des Mines de Douai, apple-wind prend forme sur ordinateur. En décembre 2007, la société du même nom est créée et, en 2008, le premier prototype présenté au public.
Concept doublement breveté
Eolienne tri-pales à axe vertical, l'apple-wind peut être implantée sur des toits, des terrasses ou sur un mât. Les trois modèles, d'une hauteur de 1.70, 4.50 et 10 m, offrent, pour un vent soufflant à la vitesse de 14 m/s, une puissance nominale de 1, 7 et 65 kW. Pour donner un ordre de grandeur, Alain Burlot indique que l'apple-wind haute de 4.5 m, avec un vent moyen de 5m/s et une rugosité de 2, permettra de générer 12 000 kWh en une année.
Un premier brevet protégé à l'international a été déposé pour le rotor, pouvant reposer sur un simple socle, sans mât, et issu d'une technologie basée sur un ensemble leviers-palier magnétique. Ce système permet de supprimer les forces de frottement et d'augmenter la surface balayée.
Le profil des pales est la seconde innovation d'apple-wind. Directement issu de la collaboration avec le département Energétique Industrielle de l'Ecole des Mines de Douai, il a fait l'objet d'un brevet déposé en co-auteur avec deux enseignants-chercheurs de l'Ecole. Cette innovation permet d'obtenir un rendement intéressant et de diminuer sensiblement le sillage de la pale.
Energie produite et énergie grise
Le concepteur de l'apple-wind n'est pas qu'un fin connaisseur de la mécanique des fluides, il se révèle être aussi « expert bilan carbone » auprès de l'Ademe. Il n'a donc évidemment pas manqué de l'appliquer au fruit de ses recherches. Par exemple, pour la plus petite apple-wind, le choix des matériaux a permis d'arriver à un bilan carbone qui sera compensé en 13 mois. Autrement dit, l'énergie nécessaire pour construire, transporter, maintenir, et déconstruire l'éolienne correspond à l'énergie produite en 13 mois de fonctionnement. Et Alain Burlot espère bien descendre rapidement à 8 mois. Seuil que selon lui, les composants électroniques actuels ne permettent pas de franchir. Sachant que la durée de vie d'une apple-Wind, tout comme une éolienne à axe horizontal, est estimée à 20 ans, l'énergie produite sera alors plus de 30 fois supérieure à son énergie grise.
Autoconsommation et revente
Avec le plus petit modèle, l'objectif est l'autoconsommation. L'éolienne est donc assortie d'un module électronique gérant la bascule d'alimentation entre le courant d'EDF et la production locale. Quand la production dépassera les besoins, l'énergie produite sera stockée via le chauffage de l'eau chaude sanitaire.
Pour les modèles d'une puissance supérieure, la consommation sera souvent très inférieure à la production. Evidemment, pas question ici de bénéficier de l'obligation d'achat par EDF, qui ne s'applique qu'aux éoliennes implantées en ZDE. Mais aux dires d'Alain Burlot, les autres fournisseurs d'énergie, tels Poweo et EnergieDirect qui cherchent de l'électricité d‘origine renouvelable pour leurs « offres vertes » (ou encore Enercoop qui ne propose que de l'énergie verte) rachètent systématiquement le surplus de production des particuliers à un prix très proche de celui du tarif de rachat.
Un avenir prometteur
A ce jour encore, aucune éolienne n'est commercialisable. Ce qui n'empêche pas l'entreprise Apple-wind d'enregistrer plus de 100 précommandes de la part de maîtres d'œuvre. Eiffage a, par exemple, commandé, sous réserve d'homologation, 2 éoliennes d'une puissance nominale de 100 kW pour le futur Grand stade de Lille. L'homologation aux normes européennes est actuellement en cours auprès de Véritas, qui dispose, d'après Alain Burlot, d'un solide département éolien.
D'un point de vue financier, le retour sur investissement pour l'achat de la plus petite des trois sœurs devrait être, d'après son concepteur, d'une dizaine d'années, selon les conditions météorologiques. Occupant une surface de 3m2 et d'une hauteur totale inférieure à 2 m, elle peut être, contrairement à ses grandes sœurs, fixée directement sur n'importe quel toit.
D'un point de vue administratif, si l'éolienne est installée à moins de 12 m de haut, le permis de construire n'est pas obligatoire, une simple autorisation du maire est suffisante.
Alain Burlot est confiant dans l'avenir. Quasi silencieuse, auto-démarrante, sans haubanage et omnidirectionnelle, d'après son concepteur, "l'apple-wind se positionne aujourd'hui comme l'éolienne la plus rentable de sa catégorie et vise le leadership d'ici 5 ans."