IMAGE A QUATRE DIMENSIONS
'On s'est alors rendu compte que l'introduction à la géométrie, que de nombreux débutants ont subie, était inadéquate, confuse et à l'origine d'une forte aversion pour une telle formation. Pour la surmonter, on a mis au point une description des courbes élémentaires afin d'éviter le jargon mathématique. Ainsi un point qui se déplace autour d'un centre, forme un cercle;---/'
Fig.138. Une pointe reliée par un fil au centre autour duquel elle se déplace, génère un cercle
'---/le centre étant élargi à deux points, un point mobile tracera alors une ellipse. On peut le démontrer à l'aide de la boucle que forme une ficelle autour de deux points.'
Fig.139. Si le centre est élargi pour inclure deux points éloignés autour desquels une ficelle est attachée, alors lorsqu'un côté est plus court, l'autre est plus long si bien que la ligne tracée formera une ellipse.
'Si nous considérons maintenant qu'un de ces points est expédié à une distance infinie, l'ellipse s'ouvre et, si nous tâchons de conserver une distance égale entre le point mobile, le centre fixe et une ligne, la courbe devient une parabole.---/'
Fig.140. L' un des point est conservé fixe tandis que le second point se déplace peu à peu vers l'infini élaborant ainsi un processus sans fin aboutissant à une parabole. Une vraie parabole, par définition ne peut jamais se terminer, cependant sa forme tire une part importante à la fois des Mathématiques, de la Physique et du Dessin. La parabole est représentée ici avec des flèches qui indiquent sa véritable direction vers un infini inaccessible.
'---/ Une surface appelée paraboloïde de révolution, obtenue en tournant cette courbe, génère un miroir qui projette, à partir d'une source lumineuse ponctuelle, un faisceau de lignes parallèles à son axe.'
Fig.141. Quand cette parabole est pivotée dans la troisième dimension, elle devient ce que l'on appelle communément un paraboloïde de révolution qui possède la propriété de refléter un rayon lumineux à partir d'une source ponctuelle. La forme du phare d'une voiture d'un style ancien, en donne un exemple des plus concrets.
'---/Une spirale peut s'expliquer très
simplement comme un point mobile qui tourne; nous construisons alors quelques cercles
concentriques à intervalles réguliers. En outre, nous remarquons que l'oeil la lira vers
l'intérieur ou vers l'extérieur (Paul Klee 'les spirales de la vie et de la mort')
nous dessinons donc quelques rayons dans ces cercles. Nous disposons maintenant d'une
matrice nous permettant de dessiner toutes sortes de spirales différentes en sautant d'un
rayon au cercle suivant, selon les proportions 1:1, 1:x, x:x etc.---/'
La construction de spirales à partir des rayons vers ces cercles concentriques, utilise
un saut intuitif, qui garantit leur continuité.
Fig.142. Dans un rapport 1:1, la spirale, poursuit le mouvement vers la vie dans le sens des aiguilles d'une montre, en tendant continuellement vers l'extérieur.
Fig.143. Dans un rapport 1:1, la spirale, poursuit le mouvement vers la mort dans le sens
inverse des aiguilles d'une montre, en tendant continuellement vers l'intérieur.
Fig.144. Dans un rapport 1:2, la spirale, poursuit le mouvement vers la vie dans le sens des aiguilles d'une montre, en tendant continuellement vers l'extérieur.
Fig.145. Dans un rapport 1:2, la spirale, poursuit le mouvement vers la mort dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, en tendant continuellement vers l'intérieur.
Paul Klee dans 'les Carnets
Pédagogiques'.
Dans cette figure, Paul a augmenté le rapport entre les rotations et leur taille si bien
que l'on voit vraiment la spirale s'ouvrir et se fermer dans un mouvement dynamique en
expansion ou en contraction. Des directions indiquées par les flèches suivent soit un
mouvement en expansion, symboliquement la vie, dans le sens des aiguilles d'une montre,
soit un mouvement en contraction, symboliquement la mort, dans le sens inverse des
aiguilles d'une montre.
"Les variations progressives du rayon, combinées avec le mouvement périphérique,
transforment le cercle en spirale. De l'accroissement du rayon résulte la spirale de vie.
Le raccourcissement du rayon amenuise de plus en plus la révolution et le beau spectacle
rétrograde jusqu'au point où il s'anéantit. Le mouvement n'est plus infini, si bien que
la question du sens reprend son importance. Celui-ci décide ou bien d'une évasion
centrifuge vers une liberté croissante de mouvement ou bien d'une soumission croissante
à un centre qui finit par tout engloutir."
Fig.146. La Spirale, Paul Klee
Dessin n°36, page 127, figure 67, 'Théorie de l'Art Moderne', Médiations,
Denoël-Gonthier, Genève, 1973, Pays-Bas.
Si l'on considère comme séparé le mouvement démarrant du centre et le mouvement partant des périphéries, on obtient à la fois une contraction et une expansion avec des mouvements dans le sens des aiguilles d'une montre et dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Ceci produit à la fois une distinction géométrique et symbolique. La vie se développe à partir du centre pour comprendre de plus en plus le monde ou régresse sur elle-même produisant des restrictions alors que la mort peut soit se contracter vers le centre en produisant une asphyxie et une absence d'espace en soi, soit se déployer dans l'illumination.
Fig.147. Spirale de la vie en contraction
Fig.148. Spirale de la vie en expansion
Fig.149. Spirale de la mort en contraction
Fig.150. Spirale de la mort en expansion
Contrairement aux infinités de la
parabole, on fabrique des cycloîdes en sautant d'une manière limitée.
'---/On veut dire par cycloîdes, la courbe engendrée par le mouvement d'un point de la
circonférence d'un cercle qui roule sur ou sous une ligne droite. On peut utiliser, à
cette fin, un rapporteur circulaire ou un disque découpé.'
Fig.151. Courbes cycloîdes de chaque côté des lignes parallèles horizontales.
'---/ La même expérience sur une courbe, crée une spirale. On peut montrer la dernière courbe pour illustrer le rôle du temps dans la continuité de l'espace-temps. Ainsi, si quelqu'un décrit un cercle en l'air, qui revient à son point de départ, c'est impossible dans l'espace-temps puisque le point de départ s'est déplacé dans le passé alors qu'on était entrain de tracer le cercle. Ainsi donc cette forme fermée, statique et symétrique (le cercle) était dans la réalité spatio-temporelle, une forme ouverte, dynamique, asymétrique comme un pas de vis, un ressort de lit ou une spirale.'
.XIX. CIRCLE DRAWN IN TIME (cercle
dessiné dans le temps) S.W. Hayter
Fig 110, page 227, 'New Ways of gravure', 1981, New-York, Watson-Guptill
Publications
Si on introduit le temps, cela ajoute une autre dimension qui est présente dans tout ce que nous faisons, dans notre vie quotidienne. Ceci est complètement différent des autres dimensions spatiales évoquées précédemment. "Vous ne pouvez jamais marcher deux fois dans la même rivière." disait Empedocles, car la rivière a changé, vous avez changé et même les alentours ont peu à peu changé. Tout vieillit à différentes allures donc même le simple cercle est une abstraction fondamentale hors du temps. Dans l'espace-temps ce serait une spirale. Dans ce contexte, on ne peut réaliser de rotation que dans une absence de temps - sans le temps, ce qui positivement est irréalisable.
Fig.152. Un cercle projeté dans la dimension temporelle crée une spirale
Cela n'a rien à voir avec un cercle projeté dans l'espace, dans la troisième dimension
où il deviendrait une sphère. Dans la théorie de la relativité, il existe une
différence radicale entre les dimensions de l'espace et du temps que l'on soupçonne ici.
'---/Dans ce contexte, on ne peut réaliser de rotation que dans l' absence de facteur temps - c'est à dire dans l' intemporel, ce qui positivement est irréalisable. L'observation de ces formes dans un miroir provoquera dans tous les cas, une inversion de direction, intérieur en extérieur, montée en descente.'
Fig.153. Spirale exécutée dans une direction diminuant vers
le bas.
L'image reflétée dans le miroir semble montrer une direction ascendante.
C'est une image en quatre dimensions, incluant une dimension définitivement temporelle.
On peut très concrètement remarquer cette inversion de direction lorsqu'on passe de
l'hémisphère nord à l'hémisphère sud, dans la spirale que forme l'eau qui se vide.
Dans le nord elle suit le mouvement inverse des aiguilles d'une montre et dans le sud,
celui des aiguilles d'une montre.
.XX. SEPTEMBER, S.W. Hayter
Peinture à l'huile sur toile, Catalogue de la Galerie Jean-Claude Riedel, 1988,
Paris
Voici un exemple de toutes ces courbes jouant ensembles. Des courbes caténaires, des
ellipses, des paraboles, des cercles sur des lignes verticales et horizontales presque
effacées, jouent ensembles en disparaissant et réapparaissant, en se chevauchant. Des
formes différentes se joignent pour entrer dans le tableau. Une feuille émerge de la
droite. La peinture ruisselle avec l'automnale lumière du soleil que suggère un cercle
au-dessus d'un lac à peine indiqué.