Archive for novembre, 2007

> Présomption d’innocence présidentielle

30 novembre 2007

Denis Gautier-Sauvagnac

Selon que vous vous appeliez Denis Gautier-Sauvagnac ou Abdelkader Mohamed, que vous soyez dirigeant d’entreprise ou chômeur, que vous habitiez Neuilly ou Villiers-le-Bel, vous ne bénéficierez pas de la même considération de la part du chef de l’Etat. En effet, votre innocence est présumée si vous êtes membre du patronat et auteur d’abus de bien social. À partir du moment où vous provenez de la banlieue, votre condamnation est prononcée et anticipée sur le jugement auquel vous avez droit. C’est ainsi que la république sarkozyste affiche ouvertement sa préférence pour les puissants. Elle peut le faire avec d’autant plus d’ostentation qu’elle le fait devant des commentateurs qui ont depuis longtemps oublié ce que leur brevet de journalisme contenait d’exigences. Devant le mutisme de ses interlocuteurs, le locataire de l’Elysée pouvait se targuer d’être le garant de l’indépendance de la justice alors qu’il venait de nous faire part de sa résolution à ne point respecter les règles de l’impartialité.

> Lutter contre les exclusions

26 novembre 2007

Exclusion

Solférino a adressé une lettre à quatorze socialistes, membre de cabinets ministériels, les informant de leur exclusion du parti. Il est tout de même intéressant d’observer que la direction socialiste a décider d’exclure, entre autres, Laure Kermen-Lecuir, déléguée nationale du PS et conseillère chez Martin Hirsh, Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Ainsi peut-on affirmer, comme je l’expérimente dans mon propre travail, que la lutte contre les exclusions ne ménage pas ses propres acteurs. Toute strauss-kahnienne qu’est Michèle Sabban, je ne comprends pas bien non plus le regain d’autoritarisme qui a assailli la secrétaire nationale comme en témoigne son article dans Le Monde. Souhaiter exclure dare-dare ceux des employés de Martin Hirsch qui continuent d’avoir des responsabilités au sein du Ps va au-delà d’une demande de plus de fermeté. Que l’on songe à la célérité avec laquelle mon parti s’est employé à instruire des dossiers à l’encontre de Roland Dumas ou Georges Frêche et l’on comprend un peu mieux ma surprise. Nemo auditur turpitudinem allegans me dirait Jean et je comprendrais qu’il faille demander à des responsables une mise en congé. Pourquoi pas ? De là à les expulser manu militari sans autre forme de procès, je me pose la question de savoir ce que deviennent les exécutifs départementaux qui entreprennent le revenu de solidarité active dont le principe était pourtant acté par le projet présidentiel de Ségolène Royal. Y aurait-il deux règles selon que l’on soit élu ou simple délégué national ? Dans ces conditions, c’est une panne d’équité qui caractériserait le Ps et non une panne d’autorité.

> La veuve M.

26 novembre 2007

Danielle Mitterrand

Dieu sait que je ne porte pas dans mon cœur les Mitterrand. Mais, tout compte fait, à bien choisir, je préfère François à Danielle. D’abord pour ce que le président a réalisé. Son bilan est loin d’être négligeable, c’est une évidence. Et deuxièmement parce que l’ancienne première dame se donne de plus en plus une allure de veuve Mao. Défendre le Che Guevara, se délecter de la défaite de 2002, chanter les louanges de la gauche radicale et admirer les agitateurs de la trempe de José Bové ou d’Olivier Besancenot lui donnent des faux airs d’égérie de la révolution culturelle.

Son antiaméricanisme frise l’obscurantisme, son altermondialiste l’angélisme et sa définition de la gauche le manichéisme.

Elle dit avoir risqué sa vie dans le cadre de son action au sein de France Libertés. Le souvenir que je conserve de son passage à Sarajevo n’est pas du registre qu’elle affectionnerait. Elle est arrivée et repartie sous la protection des blindés de la Forpronu. Avant et après son court passage, nous avons eu droit à un arrosage en règle de l’artillerie serbe et tout ça pour entendre dans la vieille académie des Beaux-Arts un discours des plus réactionnaires à la sauce amitié franco-serbe post-première guerre mondiale. Compte tenu de la position de son mari, elle nous a raconté n’importe quoi. Je me souviens lui avoir posé une question particulièrement saignante. Sa réponse fut sur le ton du mépris congénital.

Je ne lirai pas son livre et les socialistes auraient tout à gagner à prendre leurs distances avec ces idéologues de salon qui ont fait les beaux temps de la première gauche mais nous étouffent encore aujourd’hui du poids de leur bien-pensance.

> Lettre SD31

23 novembre 2007

Lettre numéro 12

Au sommaire, notre position au sujet du traité de Lisbonne, un compte-rendu de la venue de Pierre Moscovici parmi nous et une contribution sur le développement durable.

Téléchargement de la lettre au format pdf.

> Mandat unique : la pétition

21 novembre 2007

Daumier

Les municipales ne sont pas une élection comme les autres. Voici une pétition pour que l’édition 2008 soit l’occasion d’un déclin du cumul.

Adresse : http://oeuvrer.org/.

> Les socialistes et la nation à Lafitte-Vigordane

20 novembre 2007

Nation

Accueillis par Joseph Toffolon, secrétaire de la section du Fousseret, et François Gouazé, maire de Lafitte-Vigordane depuis 1995, dans un équipement public flambant neuf, les militants de Haute-Garonne se sont donné rendez-vous pour traiter de la question nationale au travers des thèmes des institutions et de la laïcité.

Au travers la problématique des institutions, c’est de la place de l’Etat, des pouvoirs locaux et de la participation démocratique dont il a été question.

Jean-Michel Ducomte, militant socialiste, président national de la Ligue de l’enseignement et professeur de Sciences politiques, a diagnostiqué le désarroi idéologique qui assaille le camp du progrès. Ce trouble atteint les partis politiques, les syndicats et sans doute un peu moins la société civile. Il n’empêche que le débat sur nos institutions entre en résonance avec notre mémoire collective, ses moments de dévoiement comme ceux de déploiement.

Le régime parlementaire de la Cinquième république est dominé par l’exécutif. Les effets du quinquennat et de l’inversion des calendriers électoraux ont accentué la prépondérance présidentielle. Pour Jean-Michel Ducomte, seul le rétablissement de temporalités parlementaires, gouvernementales et présidentielles différentes peut assurer l’équilibre des pouvoirs. Pour cela trois solutions s’offrent à nous. La première est présidentielle. La France a certes un tropisme exécutif, mais notre pays connaît une réelle difficulté à faire l’apprentissage d’une stricte séparation des pouvoirs notamment en ce qui concerne l’autonomie du pouvoir judiciaire. La deuxième formule est celle du régime parlementaire. Le quinquennat rend cette solution improbable. La dernière voie est celle d’un aménagement des institutions actuelles sans entraîner de modifications majeures. C’est le chemin emprunté par le comité Balladur. Cette proposition n’envisage aucun rééquilibrage des pouvoirs et encourage une convergence des majorités trop grande.

Les socialistes doivent faire de l’indépendance du pouvoir judiciaire leur priorité. Mais s’ils veulent voir le rôle de l’Etat réaffirmé, ils doivent éclaircir les modalités d’affectation des compétences entre échelon européen, pouvoir national et collectivités locales. Il faut contrer les remises en cause de l’arbitrage public. Le « Grenelle de l’environnement » montre l’enjeu d’une redéfinition de la responsabilité centrale des pouvoirs publics. En ce qui concerne l’Europe, il est nécessaire de faire partager à nos voisins la vision d’une Europe-puissance. Pour la décentralisation, il est indispensable de lutter contre la dispersion. En ce qui concerne la réforme de la carte judiciaire, il serait plus judicieux de commencer par redéfinir notre carte administrative. Si la gauche ne le fait pas, personne ne le fera. Enfin, il faut autant que faire se peut, éviter les substituts de l’action publique.

La question de la légitimité politique est également posée. Il faut élargir le périmètre du droit de vote aux étrangers et aux plus jeunes. Au-delà du pouvoir des élus, nous devons reconstituer des structures de contestation. Il faut savoir à nouveau allier une critique radicale de la société et une pratique intelligente des institutions. C’est à ce prix que nous reconstruirons de la durée politique en conjuguant mémoire, projet et action. Rien n’est pire que l’instantanéïsme ou l’écrasement du temps politique. Pour cela, une articulation vivante entre société civile, partie politique et syndicat reste à trouver et à bâtir.

En ce qui concerne la laïcité, les échanges ont porté sur les nouvelles batailles de la pierre angulaire du projet républicain. Francis Sancerry, conseiller général, a rappelé le principe de séparation des sociétés civile et religieuse comme l’idéal de tolérance contenu dans le principe constitutionnel de laïcité.

La citoyenneté suppose qu’on se mette à distance de ses appartenances communautaires, et notamment religieuses, mais notre monde moderne encourage de moins en moins cette prise de recul. La plupart du temps certains de nos compatriotes sont renvoyés vers leurs racines. Des professions entières sont touchées par le phénomène : médecins, enseignants, travailleurs sociaux. Il faut rappeler que le respect du cadre légal ne peut souffrir la discussion quelle que soit son opinion personnelle. Si l’émancipation qui est à l’origine du projet laïque semble rétrograder, ce n’est pas une raison pour que les socialistes se résolvent à cette régression de l’esprit public. C’est toute la question du vivre ensemble qui est en cause.

Aussi, être tolérant ne doit pas signifier être indifférent. Le défi consiste à adosser à notre citoyenneté un certain nombre de valeurs qui lui donnerait plus de force et sans doute aussi plus de transparence.

La nation pose la question du comment faire société. Nos institutions et le principe de laïcité sont des outils pour construire un projet d’intégration. C’est pourquoi la nation ne doit pas être un concept-refuge. Il faut suivre l’itinéraire politique d’Ernest Renan qui faisait de la république « un plébiscite de tous les jours. » Notre défi d’hommes et femmes de gauche consiste à recréer les conditions d’affirmation de l’espace public. Ce projet est ancien. Il est identitaire et demeure inachevé.

Prochains rendez-vous : « les socialistes et le marché, » samedi 8 décembre 2007 à Saint-Jean et « les socialistes et l’individu, » samedi 12 janvier 2008 à Tournefeuille.

> Marie-Christine Jaillet

16 novembre 2007

Marie-Christine Jaillet

Lundi 19 novembre 2007 à 20h00 à la fédération.
Rencontre-débat à l’initiative de la section Toulouse 1 et de son dynamique secrétaire de section Stépahe Carassou.

Marie-Christine Jaillet, géographe-urbaniste, est directrice du Centre interdisciplinaire d’études urbaines de l’université Toulouse-Le Mirail. Sa présence à la réunion permettra d’analyser la situation du centre-ville toulousain et la question de la centralité et de la périphéricité. En schématisant, deux modèles d’organisation urbaine se profilent.

Le modèle monocentrique correspond à un centre-ville qui reste fort. Ce schéma répond aux besoins des centres de décision des entreprises et de l’administration. La centralité, la concentration et la proximité des sites de prestige apparaissent privilégiés avec toutefois le développement de zones attractives spécialisées à l’extérieur. Toulouse peut être rangé dans ce modèle.

Toutefois, la tendance à la perte de densité de la ville se développe avec l’étalement résidentiel et la tendance à l’entre-soi avec les résidences gardiennées se bâtit sur le modèle des « gated cities » à l’américaine. A Toulouse plus qu’ailleurs, ces deux tendances ont le vent en poupe et déqualifient la centralité comme espace public.

Par opposition, le modèle polycentrique se caractérise par un centre-ville qui voit son importance économique s’éroder, tandis que la périphérie connaît un développement plus attractif grâce à l’émergence d’autres villes dans leur périphérie. La relation centre/périphérie se déroule souvent dans le contexte de la restructuration industrielle. Toulouse n’est pas concernée par ce type de développement.

> Rendez-vous avec Pierre Cohen

16 novembre 2007

Pierre Cohen

« Depuis quelques semaines, de nombreux Toulousains issus de tous horizons travaillent avec moi à établir un diagnostic objectif, un état des lieux de Toulouse, chacun apportant son expérience, sa connaissance, sa compétence. Je souhaite que ce premier diagnostic soit enrichi de votre regard, de votre sagacité, de votre critique. A cet effet, j’organise quatre réunions thématiques pour entendre vos suggestions et vos propositions. »

Mercredi 21 novembre 18h30, maison de quartier de Bagatelle.
Parlons de Toulouse, les solidarités, générations, petite enfance, santé, discriminations, sécurité.

Vendredi 23 novembre 21h, salle du Sénéchal.
Parlons de Toulouse, métropole internationale, développement économique, recherche, territoires, tourisme.

Lundi 26 novembre 21h, salle dancing la Roseraie.
Parlons de Toulouse, la proximité, éducation, culture, sports, vie associative, citoyenneté.

Mercredi 28 novembre 21h, salle Bourbaki.
Parlons de Toulouse : le développement durable, environnement, urbanisme, logement, transports, économie.

> Tout ce que vous voulez savoir sur Jean-Luc M.

15 novembre 2007

Jean-Luc Moudenc

Extrait du blog d’Hervé Torchet :

« Jean-Luc Moudenc est issu d’un milieu modeste. Lorsque j’ai fait sa connaissance, en 1986, il résidait à Toulouse, chemin de Ramelet-Moundi, Les Toulousains jugeront.

« Il a adhéré au Centre des Démocrates Sociaux en 1977. Il était alors âgé de seize ou dix-sept ans.

« Ce parti avait été créé l’année précédente par la réunion du Centre Démocrate de Jean Lecanuet et du Centre Démocratie et Progrès (CDP) de Jacques Duhamel. Le CDP était issu d’une fraction du Centre Démocrate (essentiellement des parlementaires) qui, entre les deux tours de l’élection présidentielle de 1969, avait rejoint le camp de Georges Pompidou contre le propre candidat du Centre Démocrate, Alain Poher.

« Lecanuet, qui avait entre-temps tenté l’aventure du Mouvement Réformateur avec les Radicaux de Jean-Jacques Servan Schreiber, avait pris en 1976 la présidence du nouveau parti et prendrait celle du nouveau conglomérat englobant aussi les Radicaux, les Sociaux-Démocrates et les Républicains Indépendants, l’année suivante : ce serait l’Union pour la Démocratie Française (UDF).

« Lorsque j’ai fait sa connaissance, dans l’été 1986 donc, en Ardèche lors d’une Université d’Été, Jean-Luc Moudenc était déjà silencieux et compassé comme un cardinal. Il adoptait le ton qui fait qu’on le croit toujours à mi-voix. Ce qui frappait en lui était son nez. »

Lire la suite.

> « Tous de Sarajevo » par Mireille Robin

9 novembre 2007

Baščaršija

Peu de temps près mon retour des deuxièmes Rencontres littéraires de Sarajevo, un ami de Belgrade m’écrivit : « Nous sommes tous de Sarajevo, seulement beaucoup d’entre nous l’ignore. »

Cette phrase sibylline m’interpella autant qu’elle m’intrigua. Certes, cet ami écrivain ayant délibérément pris le parti de se placer toujours du côté des victimes pouvait vouloir dire tout simplement que Sarajevo étant devenue son long siège le symbole de la souffrance, elle était désormais, par là même, la patrie de tous ceux qui souffrent ou compatissent. Cependant, je sentais qu’il ne faisait pas uniquement référence au passé récent.

Plutôt que lui demander des éclaircissements, j’ai préféré réfléchir à ce que sa phrase pouvait signifier pour moi. Etais-je de Sarajevo sans le savoir, et comment ?

Je dois avouer tout d’abord que j’ai eu mauvaise conscience par rapport à cette ville. Ayant vécu sept ans en Yougoslavie à l’époque bénie où l’on n’aurait pu envisager que le pays s’autodéchirerait ainsi, y étant retournée ensuite au moins une ou deux fois l’an jusqu’au début de la guerre, je n’avais jamais pris le temps d’aller à Sarajevo. Et pourtant, ce n’était pas l’envie qui manquait, car partout je n’avais entendu que louanges à son sujet. Sarajevo était, de l’avis de tous, un endroit où l’on savait pratiquer l’art de vivre, où l’on se sentait bien, un lieu quasi paradisiaque. Quoi qu’il en soit, d’année en année, le projet de la visiter enfin avait été sans cesse ajourné.

C’est donc la Sarajevo meurtrie par la guerre que j’ai découverte. Et encore, pas directement. Par les livres que j’ai été amenée à traduire. Le déménagement de Dzevad Karahasan, le Livre des adieux d’Izet Sarajlic, le Sarajevo mode d’emploi d’Ozren Kebo, et de nombreux autres encore. Si bien que lorsque j’ai enfin mis les pieds en avril 1995, quelques mois après la paix de Dayton, je n’ignorais presque plus rien de sa topographie. Il suffisait depuis les bords de la Miljacka, de replacer dans le bon ordre les quartiers qui montent à l’assaut des collines.

Seulement, la Sarajevo que je découvrais était une ville blessée, brisée étalant partout ses plaies. Elle n’avait plus grand-chose à voir avec celle que j’avais désiré connaître. Ce n’était plus un endroit où l’on se sentait bien : on y avait mal.

En fait, si sans cesse j’avais renoncé à m’y rendre, n’était-ce pas un peu de la même façon que je repousse d’année en année le séjour que je projette de faire à Ouessant ? Il est des lieux, des îles (et Sarajevo en est une, Abdulah Sidran le lui fait dire : Je suis une île au cœur du monde) que l’on investit de rêve et où l’on préfère ne pas poser le pied, de peur que la réalité ne soit pas à la hauteur du rêve. N’était-ce pas déjà à une ville rêvée que le poète Nerkesi (1) adressait, au XVIIe siècle, son Ode à la belle ville de Sarajevo :

Mon âme est envahie de tristesse à la pensée de quitter Sarajevo — ô c’est une blessure vive de quitter mes amis de Sarajevo.
On croit pouvoir y vivre longtemps — en mille lieux de Sarajevo coulent, source de vie, des fontaines.
Les jours d’hiver, pourtant, le froid étreint Sarajevo : les graves vieillards et les jeunes gens se réunissent dans l’intimité des maisons parlantes.
Mais quand viennent le printemps et le temps de la floraison, les roseraies de Sarajevo sont un paradis.
La rumeur des adorateurs du vin s’élève au ciel, le monde entier retentit des cris des joyeux buveurs de Sarajevo.
Le verre à la main, ils se retirent en compagnie de leurs favoris dans l’ombre des jardins de Sarajevo.
À l’écart, versent des larmes et pleurent et soupirent les amoureux de Sarajevo.
J’ignore à quoi ressemblent les houris, beautés du paradis — il faudrait les voir — mais ici-bas passent pour les plus belles les femmes de Sarajevo.
Nous laisserons aux dévots le paradis et les houris – aux amoureux ne suffisent-elles pas, les filles de Sarajevo ?
Comment mon cœur, par Dieu, pourrait-il leur résister quand au passage me mitraillent les yeux noirs de Sarajevo ?
Comme la lune, les belles font jubiler l’âme de l’homme attristé ; elles vous poussent parfois au bord des larmes, les amantes de Sarajevo.
Je suis le narcisse dans la prairie du monde et le rossignol nostalgique des belles mélodies de Sarajevo.
Tantôt tu sanglotes, tantôt tu souris comme la rose, ô triste Nerkesi — ainsi vont les choses à Sarajevo .
(2)

Oui, mais il arrive que ce rêve, d’aucuns le cassent, parce que sa beauté les dérange. Et alors on n’a plus rien…

C’est peut-être de ce rêve-là que nous sommes tous, bien que beaucoup d’entre nous l’ignorent.

Ce rêve, il m’ semblé par moments, durant ces dernières Rencontres littéraires de Sarajevo, et surtout lors des soirées en « petits comités » passé avec Thierry, Björn, Yvon, Senadin, Rajko et tant d’autres, ou bien encore chez Abdulah Sidran à Gorazde, le sentir revivre un peu. Et si ce n’était qu’un rêve d’humanité ? Si Sarajevo, en raison des cultures et des religions qui s’y sont côtoyées et interpénétrées depuis toujours, était l’endroit idéal pour se sentir tout simplement humain ?

Les futures Rencontres contribueront certainement à revivifier ce rêve ancien. J’aimerais qu’à l’avenir on vienne à Sarajevo non plus comme on va sa recueillir sur une tombe, mais pour le reconstruire.

Source : Carnet de Sarajevo 1, Éditions Gallimard, 2002.

Mireille Robin est traductrice de ce que l’on nommait jadis le serbo-croate, et maintenant le serbe, le croate et le bosniaque (sans doute bientôt également le monténégrin). Elle a traduit en français une soixantaine de romans, essais, recueils de nouvelles et de poésie, pièces de théâtre et films.

(1) Muhamed Nerkesi es-Saraji est né à Sarajevo en 1592. Il écrivait en turc et en persan.

(2) Traduction Mireille Robin, adaptée par jacques Bertin.

> Mirna Bosna ! par Brina Svit

7 novembre 2007

Brina Svit

J’ai perdu mon père il y a dix jours. Ecrire, c’est n’avoir plus de père. C’est la première fois que je formule cette phrase, même si j’y pense depuis longtemps. J’ai toujours écrit contre mes parents, contre ma mère et contre mon père. Et aujourd’hui quand je m’apprête à écrire quelque chose sur Sarajevo, sur mon récent séjour dans cette ville, sur les gens que j’y ai rencontrés, sur le sens de ces rencontres, je n’arrive pas à le dissocier de mon père.

Quand j’étais enfant, il avait une expression favorite qu’il utilisait à tout bout de champ. Il me disait à table : Finis ces trois morceaux de viande et mirna Bosna ! Il haussait les épaules en direction de ma mère : D’accord, ce sera comme tu voudras et mirna Bosna. Je l’ai entendu dire à ses collègues — il était économiste : Messieurs, il faudra qu’on e serre la ceinture, mirna Bosna… Je savais que c’était une expression dédramatisante, pacifiante, que ça voulait dire quelque chose comme : qu’on en finisse, qu’on n’en parle plus, que tout ira bien… Je comprenais parfaitement les deux mots qui la composaient : mirna qui veut dire tranquille, paisible, pacifique, et Bosna qui est Bosnie. Mais le sens historique et irrationnel de cette curieuse expression slovène que je pourrais traduire par « paix en Bosnie », ou « Bosnie pacifique », m’échappait complètement. Pour moi, mirna Bosna appartenait à mon père, c’était sa marque déposée. Ça allait avec son café turc et son amour pour le héros oriental Nasreddin Hodja qui a d’ailleurs largement déteint sur moi. Ça allait aussi avec l’idée que je me faisais de la Bosnie. Et quand je suis allée à Sarajevo pour la première fois, bien avant la guerre, j’ai pu vérifier sur place que cette expression de mon père était aussi large d’esprit que celui de cette ville.

Aujourd’hui plus personne ne l’utilise en slovène. Elle est désuète et anachronique. J’ai essayé de lui donner un peu de vigueur dans mon dernier roman en la mettant dans la bouche de ma prima donna slovène. Et je la glisse de temps en temps dans ma conversation. Je la prononce sans ironie ni décalage, même si je vois qu’elle est interprétée ainsi. Je l’utilise comme le faisait mon père : avec un accent têtu d’esprit large. Un accent d’espoir aussi. Quand je me suis promenée dans les rues de Sarajevo les derniers jours de septembre… Quand j’ai bu un café turc dans un petit magasin de Baščaršija avec les propriétaires… Quand on a chanté avec les participants des Rencontres européennes du livre autour d’une table de la même Baščaršija… Quand j’ai parlé avec Francis à son bureau du Centre André Malraux en face du marché Markale… C’était comme un sentiment familier, une phrase au bout de la langue. Aujourd’hui je peux la dire : Il faut que cela continue… et mirna Bosna.

Source : Carnet de Sarajevo 1, Éditions Gallimard, 2002.

Brina Svit vit entre la Slovénie et Paris et travaille en tant que journaliste et critique littéraire. Son premier roman Con Brio (Gallimard) a eu un retentissement international et a été traduit dans plusieurs pays d’Europe. Elle a publié en 2001 Mort d’une prima donna slovène, également chez Gallimard.

> Toulouse mérite mieux !

6 novembre 2007

Parti socialiste toulousain

À Toulouse, après trente ans de pouvoir, la droite est fatiguée, usée, divisée. Elle se trompe, manque de vision, de souffle. Elle ne sait pas anticiper, s’appuyer sur l’expérience de nos aînés, sur l’enthousiasme des jeunes, sur tous les talents.

Quand la droite toulousaine s’essaie à la démocratie de proximité, elle étouffe le débat citoyen et confond concertation et communication paillette. Elle ne s’intéresse pas à la jeunesse : elle ignore leurs attentes qu’ils soient étudiants, actifs ou à la recherche d’un emploi. Elle approuve, accompagne, amplifie la libéralisation des services publics. Elle est coupable de fracturer la ville, d’abandonner les plus faibles, de les exclure. Quand la droite toulousaine parle d’environnement, c’est une façade : pour l’eau, les déchets, le logement, les transports, la seule loi du marché conduit à plus de nuisances et moins de services. Quand la droite toulousaine cherche à innover, c’est qu’elle copie les autres et méprise ces propres ressources citoyennes. La droite toulousaine isole Toulouse. Son absence de volonté pour travailler avec les autres collectivités locales pénalise Toulouse et l’empêche de jouer un rôle en Europe.

Toulouse mérite mieux ! Toulouse a besoin d’un avenir qui redonne de l’espoir, qui combatte les discriminations, qui l’engage dans le développement durable, pour plus de solidarité, pour la construction d’une métropole régionale forte et équilibrée. Les socialistes proposent un nouveau maire aux toulousains : Pierre Cohen, député de Toulouse, pour qu’il rassemble toute la gauche, et au-delà, celles et ceux qui veulent réussir l’avenir de Toulouse !

À télécharger pour diffuser : tract.pdf

> De Doux dingues

6 novembre 2007

De Doux dingues

« De Doux dingues » est une pièce de théâtre que j’ai eu le plaisir, à défaut du talent, de jouer en amateur à Saint-Hilaire-de-Riez avec une troupe des plus sympathiques.

C’est aussi l’impression que me donne, à quelques rares exceptions, la plupart des humanitaires que j’ai pu côtoyer en Bosnie-Herzégovine à l’époque de Csce. J’en ai même parfois fait partie. Je sais donc à peu près de quoi je parle. Les périodes de guerre voient débarquer un certain nombre de gens assez dérangés en provenance de pays en paix vers les zones de conflit. Les anciens militaires figurent en bonne place dans ce périple des temps modernes. Sans doute ont-il du mal à se résoudre aux sociétés pacifiques. Et, comme souvent, l’enfer est pavé de bonnes intentions.

Cependant, il faut reconnaître que la plupart des ONG humanitaires ont, à un moment ou à un autre, contourné les lois en vigueur pour faire face à l’urgence et braver l’indifférence.

Mais s’il est permis de ne pas rester assis au fond de son fauteuil lorsque l’essentiel est en cause, la transgression consiste à donner des leçons de morale et à se permettre à l’étranger ce que l’on se s’autoriserait jamais chez soi. Cette ligne rouge ne peut être impunément franchie. Enfin, aucune cause ne saurait s’affranchir de la vérité. Celle-ci ne peut être escamotée comme le rappelait déjà en juin dernier Rony Brauman.

> Pierre Moscovici à Toulouse

5 novembre 2007

Pierre Moscovici

Présentation du Manifeste pour un socialisme nouveau, mardi 13 novembre à 20h30 à la fédération (2 bis rue Lejeune, M° Compans Caffarelli) autour de Pierre Moscovici, député du Doubs et secrétaire national.

Pour information : http://sd31.wordpress.com/
Pour tout contact : sd31@neuf.fr