Contre vents et marées.

Ce matin, je me réveille avec l’impression d’avoir dormi dans un grand magasin, un parc pour moi tout seul. Je me fais une petite descente à l’anse et prépare mon départ, il est 6h quand je pars. Ce soir à minuit, j’ai entendu qu’il pleuvait fort, je suis content d’avoir eu mon abri.
Il mouille encore un peu, mais c’est surtout à cause de la brume, ce n’est pas encore ce matin, que je verrai la Gaspésie au soleil. Le littoral est bordé d’oiseaux, je scrute le large en espérant des phoques, mais en vain.
Je traverse Métis-sur-Mer, en apprenant beaucoup de choses, grâce aux panneaux en bordure de route: les espèces des oiseaux courants, le métier de gardien de phare, les naufrages causés par les difficultés de navigation du St Laurent,… Je n’ai pas encore pu déjeuner, j’ai tué mes réserves hier, mais en passant à la Baie des Sables, je trouve enfin un dépanneur ouvert. C’est bien beau de partir tôt, pour se permettre de trainer un peu plus en vélo, mais il n’y a rien d’ouvert avant 8h. C’est aussi seulement en arrivant à St-Ulric, que je trouve une poste ouverte et une supérette, où je renfloue mon stock et dépose les lettres écrites hier. En sortant le soleil a réussi à percer et les nuages qui se faisaient chasser, depuis une heure, ont laissé place au grand ciel bleu.
Rentrant à Matane, je découvre les bateaux de pêche à la crevette sur les quais, l’équipage décharge leurs cargaisons et répare les filets. Les crevettes de Matane sont réputées, mais vu que la saison n’est pas encore ouverte, je ne trouve pas de restaurant, il ne propose que du homard. Tant pis, je m’arrête au pied du phare pour me faire mon diner, fait de sandwichs.

Le vent commence à se lever et en repartant, la conduite est plus pénible. J’ai aussi pris trop de chose à la supérette, mes épaules fatiguent vite, je me repose tous les dix kilomètres. C’est fatigué que je m’arrête à Ste-Félicité, anciennement appelé la Pointe aux Massacres, car pendant l’installation des premiers villageois, on retrouvait beaucoup d’ossements sur les plages. Ce n’était pas un massacre finalement, mais certainement les restes des naufragés des navires anglais échoués, lors des premières tentatives de prise de Québec.
Continuant à Grosse Roche, la route commence à être plus vallonnée, je ne me plains pas, me mettre en danseuse pour grimper, laisse souffler mes fesses tassées depuis trop longtemps aujourd’hui. En chemin, je rencontre un auto-stoppeur de Québec, qui se rend à St Anne des Monts, pour pêcher. Il fait ça deux, trois fois par été, chaque année. Je le reverrai sûrement demain car je passerai dans cette ville.

A partir de maintenant, je suis en mode repérage d’un site de campement, je roule à contre-sens pour voir, si il y a un accès aux plages que je vois en bas. Quand soudain en traversant un pont, je vois une place à côté de la plage avec vue sur une anse. Je descends par un chemin à la fin du pont et me voici installé pour la nuit après une journée de 12h.

Grand Métis - Les Méchins 92 km

Matane

Grosses Roches

Les portes de la Gaspésie.

Des gouttes s’écoulent sur ma tente, il a plu pendant la nuit, les arbres s’égouttent sur ma toile.
Ayant de l’eau en abondance, ce matin, je pars aux toilettes me faire chauffer du chocolat chaud en poudre. Ce n’est pas ce que je préfère du chocolat à l’eau mais bon ça réchauffe.
En sortant, il pleut à grosses gouttes, le temps de traverser le parc, je suis trempé. Je m’engouffre dans ma tente, pour déjeuner avec mes bagels et mon nutella.
La pluie ne s’arrête pas, je reste donc dans ma tente jusque 10h, je profite d’une accalmie pour plier ma tente et partir. Vingt minutes plus tard, il retombe une averse heureusement, un préau au bord de l’eau m’abrite.
C’est marrant le pouvoir d’attraction de la mer, elle est toujours la même au fil des kilomètres, égale à elle même sur sa ligne d’horizon et malgré ça, je la fixe toujours comme si elle allait disparaître.
Mes coups de pédales mènent le rythme et c’est ainsi que sous la pluie, j’arrive aux portes de la Gaspésie. Voilà 11 jours que je suis parti et j’arrive ce matin à ma destination finale et en même temps, il me reste autant de kilomètres pour y venir, que pour y faire le tour.
Ste-Flavie, le premier village de la côte Gaspésienne. Là où je devrais revenir pour quitter cette terre car la boucle est ici à la place de l’église. Carrefour où la 132 Est coupe la 132 Ouest et où les deux chemins mènent à Percé pour à peu prêt la même distance. Je reste au bord de l’eau, me réservant la vallée de la Matépédia pour la fin.

Des hommes sortent de la mer, pour se rassembler et aller dans un même chemin. Nous voilà à l’auberge, restaurant, galerie d’art de Marcel Gagnon, qui à fait une œuvre, d’un ensemble de sculptures, grandeur nature, sortant des eaux pour venir sur les terres. Cette œuvre s’appelle « le rassemblement », sculpteur, peintre et écrivain, Marcel Gagnon est habitant de la ville, c’est un de ses fils qui a bâti, l’auberge, pour exposer les œuvres de la famille. Famille, où une grande partie sont peintres.

Il pleut de plus belle, il me reste 9km pour l’autre ville, quand en chemin, je m’arrête au parc de Métis, en me disant que je trouverai un abri. Le parc est ouvert, car des ouvriers préparent l’exposition qui ouvrira la saison. Le parc ouvre seulement à partir du 19 Juin, mail ils m’autorisent à faire un tour et à m’installer dans le parc si je veux en attendant la fin de la pluie. Je laisse mes affaires sous un préau et m’en vais faire mon tour du parc sous la pluie, avec mon poncho. En revenant, je m’installe pour manger, à l’abri où j’ai laissé mes affaires. La pluie ne s’arrêtant pas, je reste là à écrire.
15H20, la première fois de mon séjour, je suis à jour dans mon carnet de bord. Je pourrais désormais écrire au fil du temps. N’ayant plus rien à écrire, je pars faire un tour sur le littoral, en pensant rester ici pour la nuit.
C’est époustouflant, en sortant de la forêt, on tombe sur une baie, avec le brouillard le lieu est magique. Des tas d’oiseaux se trouvent là, en marchant, j’observe des mouettes, des canards, des pics,…

Avant de revenir, là où se trouvent mes affaires, je m’approprie un peu plus les lieux et me balade dans la forêt, où les écorces et les mousses mouillées donnent des couleurs éclatantes. De retour à mon abri, je sors du papier pour faire des lettres. Je viens d’écrire aux hermétiques à internet et ai placé ma tente après le départ des ouvriers, me voilà seul dans le parc.
Je me prépare un thé pour réchauffer mes entrailles et vais encore me balader dans mon nouveau chez moi. Une fois, mon inspection finie, je fais chauffer mes raviolis et vais déjà me coucher, n’ayant plus rien à faire et qu’il fait froid.

St Luce - Grand Métis 24 km

Le rassemblement

Une journée chaude d’été.

Je me réveille à 6h comme d’habitude, la maison est vide, je m’installe donc à la table de cuisine pour écrire. Quand finalement les autres se réveillent à leur tour, Isabelle, puis les deux étudiantes anglaises, qu’elle héberge.
Trois Pistoles organise un échange avec des étudiants de l’Ontario, pour apprendre le français dans des familles d’accueil.
Isabelle me conseille un itinéraire pour éviter la 132 qui sert encore de remplacement à la 20 jusque Rimouski. C’est donc sur cet itinéraire que je pars une fois prêt. Je quitte les abords du fleuve pour monter sur les plateaux et prends le 2ème rang, de là on peut voir Trois-Pistoles avec le fleuve en contre bas. Je change de rang et me balade au milieu de champs, à une ferme je trouve même des épaves de Renault 5. Le 3ème rang suit le lac St-Mathieu, étroit mais étendu.
Il est tôt mais déjà la température est pénible, je profite du bord de l’eau pour me rafraichir un peu, puis repars vers St-Fabien. A chaque côte, je perds des litres, mon short va bientôt glisser tout seul de mes hanches si j’élimine autant tous les jours.
A St-Fabien, je fais des courses et en partant, en ayant mal chargé mon porte bagage, tout tombe sur la route, 50m plus loin. Je remets bien ça, mais à ce moment là, j’ai du perdre mon antivol, car le soir, je me suis rendu compte, ne plus l’avoir.
La route secondaire est finie je dois retourner sur la 132. On arrive au parc du Bic, un massif au bord du fleuve, avec plusieurs iles découpées de la côte. Nous sommes donc isolés de la brise du large et c’est une vraie torture pour moi ne supportant pas la chaleur, le sac me paraît plus pesant avec la fatigue et je cherche mon souffle pendant les montées, il fait 30° et nous sommes un 24 Mai.
La route est pénible, d’autant plus qu’il n’y a rien à voir. Jusqu’au moment où en rentrant dans Rimouski, je vois la rue de la gare, qui à l’air de descendre au fleuve. Délivrance, de la fraîcheur, de l’air, j’arrive à une plage et la chaleur disparait. Le vent souffle et apporte l’air frais, je revis.
Au bout du chemin, un cul de sac, car un parc commence, avec une partie piétonne et cycliste. Je me retrouve à faire celle piétonne car la piste cyclable est loin du bord et nous ne voyons rien des belvédères le long du parcours.
Le parc arrête au centre-ville, où la piste suit la promenade. Dans un autre parc plus loin, des gars font du skate-surf. Le coin est réputé pour son vent, si bien qu’à l’ombre, je commence à avoir froid. Je contine et arrive à Pointe au Père, où je fais un tour dans la marina et regarde partir le ferry menant à l’autre rive, à Forestville.
Depuis un peu plus d’un an, la ville est populaire, pour le sous-marin « Onondaga », ancien sous marin Canadien, exposé sur le quai, à côté du phare et du musée sur le naufrage de l’Empress of Ireland (paquebot faisant la liaison Québec-Irlande, qui fit naufrage dans l’estuaire du fleuve St-Laurent, suite à la collision avec un charbonnier norvégien par temps de brouillard, le 29 mai 1914, faisant 1012 victimes.)
Je fatigue déjà et pense me poser là, mais le parc est fort fréquenté, alors je roule encore au bord de l’eau à la recherche d’une place. J’arrive à l’entrée de St-Luce et passe devant un parc, avec toilette, c’est décidé, je m’arrête ici pour ce soir.
Il est 18h et je finis de mettre ma tente dans les fourrés à l’abri du vent. Ayant du riz à cuire, je me séquestre dans les toilettes pour faire chauffer mon eau, à l’abri des bourrasques. Quand j’ai fini, le soleil se couche, mais il se cache derrière la brume qui se lève. Au loin des lueurs éclairent le ciel.
Un tonnerre se faire entendre.

 

Trois Pistoles - Saint Luce 83 km

 

St Mathieu

St Fabien

 

Parc du Bic

Rimouski

 

Pointe au Pére

 

St Luce

 

 

 

Trois Pistoles

Incroyable, je pensais avoir froid en bordure du fleuve et au final c’est la nuit la plus chaude que j’ai eu. Au réveil, les montagnes au loin sont dans un voile, cela présage une journée chaude. En quittant le village, je retourne dans la campagne et arrive au croisement de la route des navigateurs, que je suis, et de la route des frontières, route qui longe le Maine et le Nouveau-Brunswick. Je reste avec les navigateurs et rentre dans Notre-Dame du Portage. Village au passé de résidences de vacances, le village fut aussi le point de passage de la route du portage, lieu de liaison entre le fleuve, la rive nord et sud, jusqu’aux rivières menant au Nouveau-Brunswick.

C’est marrant on a l’impression de se trouver dans un village côtier maritime, alors que nous sommes encore au fleuve. Pratiquement toutes les maisons ont un nom, comme on en donnerait à son bateau.
Après ça, j’arrive à Rivière du Loup, la vieille ville est en haut, mais ne voyant aucune indication, je ne m’y rends pas, je reste sur la 132. Au croisement avec la 185, je me pose encore la question, si je laisse tomber le Nouveau-Brunswick, ou si je m’y rends qu’en même. Je louche sur le panneau indiquant Edmundston, ville frontière Québec/Nouveau-Brunswick. Je me résigne à continuer sur la 132, pour profiter pleinement de la Gaspésie sans courir.
J’arrive à la pointe menant aux traversées, le vent souffle comme en pleine tempête, je retrouve un panneau de la route verte, mais le perds rapidement, me trouvant pris dans une course à pied organisée dans la ville. Cela m’amène à faire des détours pour retrouver la 132.

Cacouna, lieu de villégiature anglophone et lieu de mon arrêt vaisselle. En descendant à la crique, il y a un parc avec toilettes, vu que je n’ai pas de quoi graisser mes plats, ma cuisine d’hier avec les saucisses était un peu accrocheuse, je profite donc du lavabo pour faire ma vaisselle, à l’eau froide et au savon.
Dans les kilomètres suivant la 132, accueille, les voitures de la 20, qui s’arrêtent ici, il y a plus de circulation, mais la voie à droite est bien large pour moi rouler sans crainte. Porté par le vent, je fuse, si bien que mes pédales ne suivent plus, je dois faire du 40km/h au moins. Je fais alors 10km sans m’en rendre compte et même si je roule vite, la route est pénible à cause de la chaleur. Il est prévu 28°, aujourd’hui.
Dés que je vois la route verte partant en forêt, je m’y engage, cela devrait me rafraichir. Mais le chemin monte sec et ce qui devrait me rafraichir, devient encore plus pénible. Il me restait seulement 9km et je les fais en 1 heure.
En arrivant à Isle Verte, je ne reprends pas la route verte, car elle me ralentit et retourne sur la 132 pour avancer plus vite. C’est alors rapidement que j’arrive à Trois Pistoles, je traverse le pont de la rivière du même nom du patelin et tourne à droite pour grimper un peu et aller voir la chute et les rapides, une fois la haut, je profite de la fraicheur de l’eau, car je dégouline. Et dire qu’il est prévu encore plus chaud demain.
Dans la descente, je croise de nouveau la route verte, appelée ici, littoral basque, vu que la 132 remonte dans les terres, je reste donc au bord de l’eau. Plus loin je trouve une gréve avec toilette et lavabo, je pense installer ma tente, mais comme il est assez tôt, je décide de continuer encore.
C’est comme ça que j’arrive à un chemin m’amenant à un fronton de pelote basque, étonné d’en trouver ici, je m’y arrête, d’autant plus qu’il y a un bar. Je prends une mousse fraiche et m’installe à une table avec des habitants qui m’invitent. J’en apprends alors beaucoup sur l’histoire des Basques et de l’île aux Basques, qui se trouve au large sur le fleuve à niveau de la ville.

Les Basques, bien avant la venue de Jacques-Cartier, connaissaient déjà les lieux et venaient chasser la baleine et commercer avec les indiens. Ils ne rentraient pas sur les terres respectant les pactes avec les indiens, mais l’île aux Basques, leur servait de port d’attache pour dépecer les baleines, faire fondre la graisse et vendre aux indiens, avant de rentrer chez eux.
On prétend même que Jacques-Cartier a connu le chemin des terres Canadiennes en commençant comme matelot sur des navires Basques, venant ici. C’est une fois capitaine, qu’il est revenu pour la France comme explorateur.

L’après-midi avance et une soirée barbecue se prépare, invité à coucher chez Isabelle, je suis convié à la soirée. Nous prenons donc mon vélo et allons faire des courses. Une fois chez Isabelle, je me prends une douche et nous repartons pour chez Kim, là où la soirée est prévue.
La soirée se déroule bien et j’apprends encore de nombreuses choses sur le Québec. Ayant l’occasion d’avoir de la viande, je me prends deux steaks de 200g chaque et des morceaux de poulet. La soirée s’achève avec un petit feu, et je m’endors tranquillement sur ma chaise, à cause de la fatigue de la journée.
Nous rentrons chez Isabelle et retrouve mon sommeil rapidement, sur le canapé du salon.

St André - Trois Pistoles 72 km

Rivière du Loup

Cacouna

Fronton Basque

Le petit phare.

Ce matin bonne douche au réveil et pan cakes au sirop d’érable, il faut se faire des petits plaisirs parfois.
Les clés rendues je pars visiter le parc aux sculptures, la plupart son faites de bois, il faut vraiment que je m’essaie à cette pratique. La sculpture m’attire de plus en plus. Je me dis pourquoi pas le bois aussi, en plus de la soudure. Je quitte lentement le village, appréciant les jolies bâtisses. Sur la route menant à St Roch des Aulnaies, je regarde la région de Charlevoix, qui est de l’autre côté du fleuve. On y voit bien les Éboulements et l’île aux Courdres.
En sortant du village, une piste cyclable longe les marais salants, je passe un massif rocheux, puis suis en contre bas de la Pocatiére. Je viens de quitter les Chaudières-Appalaches pour le Bas du Saint Laurent, Je ne visite pas la ville, mais reste plus au fleuve, la piste continue encore le temps de rejoindre la 132, aux portes de Rivière-Ouelle. En m’arrêtant à une épicerie, je vois qu’ils font aussi café-internet; Je demande et le gérant me propose 2$ pour 15 minutes. Il me donne son portable et je m’installe. Je regarde alors mes mails de réponse à mon précédent mail de nouvelles. Puis écris un nouveau courriel, pour rendre compte de mes derniers jours, quand la connexion lâche, rien de grave, j’avais copié avant. L’ordinateur ne veut plus se connecter, j’appelle le gars et il m’avoue que je suis son premier client et que le système n’est pas encore au point. Finalement, il me fait la connexion gratuite, mais on n’arrive pas à régler le problème, il faut donc alors qu’il aille chercher son câble internet en rallonge pour que je puisse donner des nouvelles sans attendre que le sans fil se décide.

Ma bonne action de la journée étant faite en ayant rassuré mes proches, je continue, mais la route quitte le fleuve pour se retrouver en campagne, je roule vite pour me rendre de nouveau au bord de l’eau en arrivant à Kamouraska, je fais une sieste sur le quai, en écoutant le récit de mes voisins de banc, deux jeunes de la vingtaine, un gars, une fille, qui cette dernière revient fraichement de France et dont son principal souvenir est la facilité d’approvisionnement et les bons prix de l’alcool. Chaque anecdote est rattachée à une bouteille, un alcool différent avec l’insistance sur le prix modique pour la qualité tout de même présente.
Plus loin dans les méandres des petites rues j’arrive à la place de l’église et à une boulangerie, pain et brioche aux raisins, agrandissant mes provisions. Des montréalais me voient avec mon bardas et m’accostent, curieux de savoir où je vais, ils me conseillent un camping au village suivant, où tu peux te poser sur le bord du fleuve.
Je m’y rends donc et voilà que le camping est 20$ pour la nuit, c’est moins cher qu’un hôtel, mais dans un sens ça me fait chier de payer 20$ pour devoir poser ma tente et dormir dans mon sac de couchage. Je continue en me disant que je trouverai bien moi même une place au bord du fleuve. J’arrive alors à St-André, où un chemin mène à la batture. Encore une fois, je rencontre des montréalais, décidément un peu de soleil et un week-end prolongé et les voilà de sortie. Ils sont impressionnés par mon parcours, la femme essaie de soulever mon sac, mais il ne bouge pas du sol.
Au loin je vois un petit phare, je me rends jusque là et vois que c’est un faux, il sert juste à accueillir les gens pour observer les oiseaux, le coucher de soleil,…, table et chaises sont à disposition.
Je pense m’installer ici sur l’herbe un peu plus loin pour être un peu moins victime du vent.
Mais avant ça, je fais un tour de village à la recherche d’eau, des petits vieux faisant une vente de garage, me remplissent mes gourdes, je suis prêt à profiter de mon poste au bord du fleuve. La tente installée, je me poste au bout de la jetée pour profiter du silence des lieux et écrire un peu.
Le soleil se couchant, les gens arrivent, une famille s’installe dans le phare pour faire leur repas, mince je devrais trouver une autre place pour protéger mon réchaud du vent. Le soleil couché, je retourne à ma tente, en essayant d’allumer mon réchaud pour faire des pâtes et les saucisses achetées à la ferme, pas moyen, le vent souffle les flammes malgré mes protections, en faisant un brise vent avec mon matelas. Il y a une grange à côté, je m’y rends donc et vais faire ma cuisine. Ayant oublié ma lampe et ma faim me tiraillant, je bâcle un peu mes cuissons. De retour à ma tente, je mange donc mes pâtes et mes saucisses semi-cuites.

St Jean Port Joli - St André 75 km

St Jean Port Joli

St Roch des Aulnaies

La Pocatière

Kamouraska

St André

Saint Jean Port Joli

Je me couche avec le coucher de soleil à la fenêtre et me réveille avec le lever. J’ai l’impression de partir de plus en plus tôt, ce matin à 7h je suis prêt.
Escale à St-Raphaël pour mon petit déjeuner sur le parvis de l’église; Le village a beaucoup de charme, en arrivant, j’ai pris le chemin de l’écureuil, délicat en voiture mais parfait en VTT. On passe dans un tunnel boisé, où se trouve des terrains de culture de sirop d’érable; C’est impressionnant d’ingéniosité les installations. La forêt n’est pas faite que d’arbres mais aussi d’un enchevêtrement de tubes, chaque tube à un embout à mettre au tronc de l’érable et chaque tube fait circuler ainsi le sirop, jusqu’à un tuyau plus large qui lui amène le sirop à la cabane où on le récolte. Après mon tour du village, je découvre un circuit cyclable qui longe le Sault. On prend le chemin du pouvoir et arrive à une place où l’on peut se poser à des rapides.
Le circuit fini je m’en vais dans les campagnes en direction de Montmagny. Des autres montagnes me regardent, mais celles-ci sont de l’autre bord du fleuve, les Laurentides. Je suis entièrement dans un autre décor, ici place aux champs avec vue sur les abords du fleuve. La route était pas mal fréquentée, je tourne à gauche pour me rendre directement au bord du fleuve à Berthier sur Mer. Là je déguste une pâtisserie, faite de pâte d’amandes avec une poire, un régal, je conseille de passer à la boulangerie « Le joyeux pétrin » sur la route principale. Le tour de la ville se termine par un petit tour au port avec vue sur l’île d’Orléans et j’arrive sur la route verte, piste cyclable qui va être mon fil d’Ariane jusqu’en Gaspésie. La route verte suit la 132, la plupart du temps mais la quitte par endroit et devrait prendre des routes plus pittoresques.
J’arrive assez vite à Montmagny, la route est plate ici, donc mon jeu de pédales est plus rapide. En l’espace de 500m, je me fais couper la chique 5 fois, par des gens ne respectant pas la piste cyclable. Je regrette alors mon calme des montagnes, mais la piste tombe dans un parc et me voilà de nouveau apaisé observant les canards.
La route 132 est parsemée de panneaux « Halte gourmande », le boulanger de Berthier, en faisait partie. Ici, j’arrive à une ferme avec ce panneau, vendant de la viande directement, je m’empresse d’y aller pour prendre des tranches de rumsteack et des saucisses pour demain soir. Les villages que je traverse ensuite, ne sont pas forcément bien attrayants. C’est le long de la 132, que je profite de la vue, des petites plages se dessinent par ci par là, au grè des marées, car déjà là les marées influencent le fleuve. Mon coup de cœur de la journée, c’est en arrivant à St Jean Port Joli. En rentrant dans la ville des escaliers, je ne peux pas m’empêcher d’y aller pour y voir une vue plus haute sur le fleuve.
Je fais la rencontre d’une grand-mère et son petit fils à qui je partage mon histoire. A côté se trouve une forge, en y passant , on entend le marteau frapper l’enclume, je rentre donc et je rencontre, Clermont, un ancien forestier, qui à la retraite a construit le bâtiment qui lui sert de forge et de magasin d’antiquités.
Pour ma part, je me fais le cadeau d’une vieille plaque d’immatriculation, ne trouvant pas de plaque de 84, je pris celle de 74, pourquoi? Juste par amour des couleurs.
Mon nouvel ami, me propose de coucher à l’hôtel-restaurant, car je viens de lui dire que je pense séjourner en hôtel, ce soir. Il me donne aussi une adresse pour faire le linge, je n’ai plus rien à me mettre.
En sortant je revois mamie et bout d’chou qui se trouvent être la femme et le petit fils de Clermont, ils habitent juste la maison à côté de la forge.
Je reprends alors ma route, avec hâte pour retrouver une bonne douche, le village est étendu sur des kilomètres, je pense toujours arriver mais en vain. Je croise la route de nombres sculpteurs, le village est un centre important pour la sculpture, essentiellement sur bois. Certains sont vraiment bons, d’autres plus simplement commercial. Finalement j’arrive à destination, je prends ma chambre et vide de suite mon sac pour le remplir à nouveau de mes vêtements uniquement. Je remonte la rue principale pour trouver le lavomatic. Une fois sur place, il n’y a pas de mini-dose en vente, je vais à l’épicerie, que des grosses bouteilles. Une femme fait son jardin, je vais donc la voir et lui demande un peu de lessive. Elle revient avec un pot rempli pour que je sois tranquille pour tout le voyage.
Je peux retourner aux machines, sur les lieux, je me dessape, gardant uniquement mon pantalon, et reste torse nu car je lave tout le reste.
En attendant le cycle, je rattrape mon retard d’écriture et ai seulement une visite. Je suis tout propre, tout du moins mon linge, prêt pour une autre semaine de camping. Sur le chemin du retour à l’hôtel, je fais mon petit tour dans le village et déboule par finir sur le quai.
Le coucher de soleil me laisse encore du répit pour aller au parc, quand je vois parmi les gens rassemblés sur le quai une silhouette faisant des grands signes, ne connaissant personne, je n’y prête pas attention, je continue à avancer et ai l’impression que cette silhouette me désigne, je me montre alors et me désigne moi même et la silhouette hoche de la tête. Je m’approche et vois que c’est mon forgeron de cet après-midi, avec le soleil dans les yeux, je ne l’avais pas reconnu.
Nous causons alors de voyage, lui en a fait pas mal sur le continent, des road-trips en moto avec sa BMW du Dakar. Terreneuve, Alaska, traversée du Canada, quelques parties des États-Unis ,…
Des amis à lui débarquent et le sujet part sur l’histoire du patelin, histoire maritime, culturelle,… J’apprends donc qu’il y a une rencontre internationale de sculptures tout les deux ans, le parc à côté est décoré par quelques unes.
Le débat change de nouveau puis part sur la nationalité Québécoise. J’apprends encore beaucoup de chose ce soir et pendant ce temps le soleil se couche, je prends quelques photos, en attachant mes oreilles à la conversation. La soirée se découle et la nuit tombe, il est temps pour mes compagnons de débat de rentrer chez eux. Comme il fait noir je remets ma visite du parc à demain.
A l’hôtel, je m’installe au restaurant en bas, et m’engouffre une poutine et une tarte à la rhubarbe, puis retrouve ma chambre. J’allume la télé pour mettre de la musique et tombe sur un concert de Queen à Montréal en 1981, je me laisse alors bercer par Freddy.

 

St Nérée - St Jean Port Joli 89 km

Bernache du Canada

St-Raphaël

 

Berthier sur Mer

Montmagny

 

Chez Clermont

 

St Jean Port Joli

 

Mon hôtel

 

 

Paysage enchanteur et vent désenchanteur.

Je me réveille courbaturé de ma nuit dans le sillage d’une roue. Cela me permet de partir tôt et d’être sur la route un peu avant 8h. Je continue donc ma belle route forestière. Au bout de celle-ci, je change de chemin pour une autre belle route un peu avant 8h. Je continue donc ma belle route forestière. Au bout de celle-ci je change de chemin pour une autre belle route et je me rends compte que je suis sur un circuit cycliste « le montagnard », pas très significatif car c’est pas mal plat à part l’habituelle série de 6 km de bosses il n’y a rien de montagnard. Il faudrait plutôt faire attention aux chasseurs, qu’aux montagnes, car de partout on voit les panneaux « chasseurs à l’affût » et en voyant l’état de certains panneaux routiers, même là sur la route, je suis à moité rassuré. J’arrive à St-Cyprien, où j’achète mon petit lait chocolaté pour mes céréales, je pense continuer ma route jusqu’au bout, mais la caissière m’affirme que la route arrive en terre assez vite. Je tourne donc à gauche vers St-Justine.
En chemin, je m’arrête pour mon bol et rêve déjà du St-Laurent car ici, ce n’est toujours pas intéressant comme paysage. Forêts à perte de vue et faible vallonnement, je me demande pourquoi les Appalaches, de « Chaudiére-Appalaches ». En arrivant à St-Justine, je jubile une côte, je peux profiter de mes bonnes vitesses, là haut, à la place de l’église, on a vue sur l’horizon. Derrière moi forêt plate et devant moi monts vallonnés s’entremêlant. Je ne suis pas forcément sado-maso, mais bon je préfère ce que je vois devant, car même si c’est plus dur, il y a des chances d’avoir de meilleurs paysages.
Je médite allongé sur mon herbe à écrire et profiter de la vue. Il est temps de gravir ces montées. Je découvre une autre partie de la région et me voici plus enchanté. On retrouve les forêts, mais les lacets des monts, laissent mystérieusement leur trésor, pour cela, il faut user de coup de pédales, c’est là que l’on découvre alors un petit marais, une zone lunaire du Québec, des prairies et leurs toiles de fond sur les vallons alentours. C’est ici que je rencontre Claude, qui se dit être gérant et profite de son temps à voyager par télé interposée, étant à sec, il remplit mes gourdes et je le quitte pour repartir vers St Luc. J’ai l’impression de parler toujours de pause et de bouffe mais vu que je n’ai pas beaucoup de stock de réserve, je m’arrête souvent chez les dépanneurs, ici je prends un petit pâté et du pain pour le manger un peu plus haut.
Les villages sont pas mal isolés, un seul chemin qui y mène est asphalté, le reste est de la terre alors me voilà reparti pour un chemin de terre. 20 km de terre avant le prochain village, c’est bien désertique et soudain au milieu de nulle part, un groupe de mobile-home avec un petit jardin se trouve là, surement des chasseurs qui viennent s’installer pour les saisons car ce n’est vraiment pas pratique. Plus loin un petit cours d’eau permettant de se rafraichir crée une sorte de gorge de 3m sur 500m de long, ainsi une cuvette d’eau reste là. Les gamins de la maison d’à côté doivent assurément s’y baigner en été. Me voilà au sommet de la montagne, au loin des monts du Canton que j’ai passé déjà il y a deux-trois jours. Le temps passe vite et les kilomètres passés me rapproche de la Gaspésie, jour après jour.
Ce qui monte doit descendre, je m’exécute alors et me trouve maintenant à monter les Appalaches, avant les aplats du bord du fleuve. Il se trouve aussi que la montée est trop abrupte et en cailloux, je patine sur place, voir même je recule. Je monte alors à pied et même comme cela c’est pénible, je mets bien 20 minutes à finir tout ça, sans exagérer, je pense bien que c’est un 18% d’inclinaison. Tous les 100 m je reprends mon souffle. Arrivé en haut mes bras me brûlent, heureusement que je n’ai pas seulement entraîné mes jambes, sinon je serais resté en bas.
Au sommet, un animal attend ma venue, au milieu de la route sans bouger, il s’agit d’une couleuvre, je passe à côté sans l’énerver, j’ai déjà assez de piqures avec les mouches noires. Je descends ainsi jusque St Damien, comme hier ma journée est déjà longue, mais je continue pour encore un village autrement dit une quinzaine de kilomètres. Les montagnes sont finies, mais il persiste des côtes et avec la fatigue, je commence à râler tout seul, surtout que mon moral s’était préparé à autre chose quand un gars à St-Damien m’a dit «  Ohhhhhh pas de problème, tu verras ça descend jusqu’au fleuve maintenant » Comme quoi, il n’y a pas mieux que le vélo pour ressentir le relief d’un pays.

Je coupe une piste cyclable, qui ne peut pas m’être utile pour où je me rends, mais néanmoins je profite d’un toilette chimique qui s’y trouve. Car pouvoir profiter d’un siège, sans devoir enterrer mes besoins est devenu un luxe que j’apprécie. En sortant, une voiture s’arrête à niveau de la piste, les deux jeunes couillons s’amusent à faire des départs arrêtés sur la route en me regardant et pour finir, passent sur la piste avec leur voiture pour rouler comme des dingues. Je prie pour eux qu’ils ne rencontrent personne.

J’arrive enfin à St Nérée, où je m’arrête au dépanneur, pour un petit melon, des chips et une bière. Repas de fête pour un jour de fête, cela fait déjà une semaine que je suis parti. En sortant de la ville, je m’installe dans un pré à côté des installations sportives pour une fois j’ai une vue dégagée plein Ouest, je profite alors du coucher de soleil en festoyant.

Ravignan - St-Nérée 75 km

Chasseur à l'affut

St-Justine

Couleuvre

Vue de ma fenêtre

Fin des Cantons, place à la Chaudière.

La rivière qui me berçait dans son lit se fait nommer la Chaudière, pas pour sa température, mais juste pour faire parler les curieux. En commençant ma journée, je fais route avec elle, me voilà avec un nouveau compagnon de route. Large comme un de nos fleuves, elle serpente entre les terres agricoles. Elle m’emmène à St Ludger, où je me rends au dépanneur pour prendre du lait chocolaté, je descends la ville pour arriver au pont et déjeuner avec ma compagne.
Depuis St Ignace, le bol de céréales avec banane et lait chocolaté, sont devenus un rituel pour moi. De quoi bien commencer la journée. C’est donc plein comme une oie que je peine à remonter la ville. La route défile et se ressemble, le paysage est plus plat, je quitte les Cantons de l’Est pour rentrer dans les Chaudières-Appalaches.
Enfin plat est une façon de parler, le paysage est dénué de grandes montagnes, mais les côtes sont toujours abondantes. Je remplis mes gourdes à un camping que je croise. C’est fou, j’ai l’impression que les campings sont toujours réservés aux caravanes et autres logements mobiles, à part dans les parcs, je ne vois jamais de campement de tentes. Oups je suis bête à quoi servirait le gros 4*4, si c’est juste pour porter une tente pour dormir dehors au camping.
Je suis toujours à me faire porter par le courant de la rivière qui me mène à St-Gédéon. Je traverse le village et contrairement aux Cantons, je ne trouve pas beaucoup de charme, trop de choses à l’abandon, de tas de débarras dehors. En quittant le village, je dois aussi prendre congé de ma guide car nos routes se séparent. La rupture est dure à surmonter jusqu’à ce que mon chemin arrête de monter. Je domine le décor qui m’entoure les derniers hautes montagnes sont déjà fort loin.

Je m’arrête au bord de la route pour prendre une ferme, quand le propriétaire sort de celle-ci. Gaspard, il a repris cette ferme, il y a 27ans et depuis tout va, il fait du biologique. C’est pas contraignant m’explique t-il et tu vends mieux, donc ce n’est que des avantages pour lui. J’apprends tout des réformes agricoles du Québec. Je lui demande quelque chose sur la carte mais il m’explique qu’il est illettré. Pour l’administration de la ferme, c’est son frère qui s’en occupe, il est du village d’à côté. Justement son frère arrive pour manger, je les laisse et repars à ma virée.
Arrivant à St-Théophile, je prends ma pause dîner. Je suis à quelques mètres de la frontière américaine. En repartant cela est flagrant, car il n’est pas rare de voir des vendus, faisant flotter la bannière étoilée, plutôt que les fleurs de lys du Québec. La route que je dois prendre pour aller à St Côme Linière est un petit 20km de terre. Tout du long, je découvre le Québec profond, voir plutôt l’Amérique profonde, carcasses de voitures, taudis, dés qu’une voiture ou un autobus d’école passe je ne vois plus rien, la route n’est pas de terre, elle est de poussière et de roche. Plus loin les habitations laissent place à la forêt sur 10 km, donc 6 km fait de bosses continues. Je désespérais mais arrive tout de même à St Côme.
Le village avait pratiquement entièrement brûlé en 1926, par un incident. Par la bravoure des habitants, la ville a été reconstruite dans sa quasi entièreté avant l’hiver.
Mon étape aurait du finir ici, mais pour rattraper mon retard je pense me rendre plus loin. Prochaine étape St Prosper, je carbure assez vite et ne prête plus trop d’attention au paysage, je ne trouve pas le coin agréable, il faut que je me rende le plus loin possible pour aujourd’hui. Arrivé à St Prosper, je traverse la ville sans pause et continue dans ma lancée, je suis de nouveau sur des terrains forestiers, mais la route est fraichement refaite, il est bientôt 19h, si je veux manger avant la nuit, il est sage d’arrêter. J’avais vu des bonnes places avant mais maintenant, je n’ai que de la forêt touffue. Je m’essaie à rentrer dans certain sentier, mais en voyant que le sol n’est plat à aucun endroit, je fais demi-tour même au bord des trois cours d’eau que je passe les berges ne sont pas assez larges. C’est à la dernière traversée de pont que je vois une petit trouée dans les arbres, je ne fais plus le difficile je m’y installe, ma place pour dormir est dans une tranchée de roue mais je ferai avec. A peine le temps de déguster mais pâtes sauce tomate, que le ciel est déjà couleur violacé-rosé.
Dommage que je n’ai pas de recul, je profiterais des couchers de soleil en Gaspésie.

Audet - Ravignan 90km

Saint-Ludger

St-Théophile

St Côme - Linière

Mont et Lac Mégantic

Je finis de me préparer quand Doris me demande combien je prends d’œufs. Nous prenons alors le petit déjeuner, en profitant de la vue. Le parc ouvre à 9h alors nous partons pour le Mont Mégantic. Pour éviter du kilométrage pour le plaisir nous mettons mes bagages et mon nouveau vélo dans la voiture, puis nous partons pour un des plus hauts sommets du Québec. Nous arrivons en avance, alors nous faisons un tour et Doris m’explique ce que l’on peut voir au centre d’astronomie du parc. Nous échangeons nos théories sur l’après ère de l’espace parasitaire du genre humain que nous sommes. Nous sommes d’accord que la terre arrivera à se défendre contre nous, avant que nous détruisons notre espace vital. Il y a eu un avant nous, il y aura sans aucun doute un après nous, l’espèce humaine ne compte que pour un coup de cil dans la création de l’univers, au prochain clin d’œil nous risquons de ne plus être là, si l’on continue dans la voie où nous avançons depuis déjà trop longtemps.
Le parc ouvre et nous montons donc après avoir payé l’accès. Sa fille a eu un accident grave dans la descente du mont, en voiture avec des amis, depuis elle se trouve handicapée, une erreur de jeunesse comme dit Doris. Sur le Mont Mégantic, se trouve l’observatoire du Québec, le site est protégé comme meilleur ciel étoilé. De là haut nous voyons à des kilomètres à la ronde, l’envie de retourner à la montagne devient prégnante. De l’autre bord, il y a le Mont St-Joseph, où nous allons aussi.
Le mont est un lieu de pèlerinage pour St-Joseph, à l’époque la région était propice aux ouragans, alors les villageois de Val-Racine ont érigé une croix et les tempêtes furent plus clémentes. Dés lors une chapelle a été installée et les ascensions du mont sont courantes pour les messes d’été. Du mont St-Joseph, nous voyons davantage le Lac Mégantic à 40km qui paraît à côté, il faut que je retrouve cette sensation de plénitude après l’ascension d’une montagne, ce dépassement de soi pour avoir comme cadeau une vue imprenable sur le monde et nous remettre à notre place comme petite chose que nous sommes. L’horloge tourne et il est temps que je recommence à pédaler, il est alors temps de dire au revoir à ma rencontre bénite. Pour bien reprendre les choses où je les avais laissées je reprends un chemin de terre.

Je râlais le premier jour mais au final c’est là que l’on découvre le mieux le Québec profond. J’arrive à Val-Racine j’ai l’impression d’être la seule âme vivante du patelin pas un chien qui aboie, pas une tondeuse qui marche, pas d’enfants qui jouent, rien. Je fais quelques photos quand je distingue au loin deux silhouettes. Une belle femme brune marche au milieu de la route, une petite blonde sur un tricycle, sa fille, l’accompagne. Les deux me saluent avec un grand sourire et continuent leur balade dans cette rue inhabiteé. Je fais de même mais dans la direction opposée et grimpe les côtes qui se suivent dans ma progression. Le vélo fonctionne parfaitement, j’arrive à rester sur mon vélo tout le temps; Mes cuisses brûlent plus qu’en marchant mais la satisfaction est plus grande. 14 km plus loin et de nombreux arrêts photos, j’arrive à Piopolis, qui est en plein travaux, sur son artère principale. Je me rends compte alors que mes gardes boues seront regrettés à la prochaine pluie, déjà là d’avoir roulé sur 500m sur de la boue j’en ai plein ma gueule et mon porte bagage.
Je bifurque sur le chemin du grenier car d’après Doris on y a une vue imprenable sur le lac Mégantic, en effet tout le long du chemin, on longe la côte, découvrant à chaque tournant, un nouveau point de vue. Le chemin fini en cul de sac, je tourne alors avant pour revenir sur la 263, mais me pose avant dans un pré pour manger et profiter de la vue.

De retour sur la grande route je me rends à Marston, nous sommes plus loin du lac, donc les arbres nous le cache, mais une fois dans la ville, je peux reprendre un chemin qui longe de nouveau le lac, j’en profite alors. Le chemin amène à un parc, avec une plage, je fais une halte et vais remplir mes gourdes dans les vestiaires. Il y a des douches, si je n’avais pas été chez Doris, elles auraient pu être utiles.
Plusieurs groupes de jeunes sont là à jouer au beach volley, parler, flirter et boire de la Budweiser. C’est une bonne place pour trainer surtout l’été quand le lac est bien chaud.
Ma route ne s’arrête pas là et continue jusqu’au Lac Mégantic, plus seulement le lac, mais la ville. Je trouve un Métro, alors je fais mes provisions pour le soir et le lendemain. Après ça je vais voir le quai. J’ai bien fait de passer par le chemin du grenier, car ici la vue n’est pas si bien que ça.
Ayant pris du retard avec mon ostie d’ancien vélo, je vais plus loin encore en prenant le chemin du barrage, le chemin débute bien, mais devient en terre après ça, j’aime les chemins de terre, plutôt que les gros axes, mais en fin de journée faire des montées descentes dans des caillasses ça achève vite le moral. Il est temps que je trouve une place.
Je suis bientôt au bout du chemin, quand une rivière se fait entendre à ma droite, slalomant avec la route, j’arrive à un champ, le traverse et arrive en surplomb de la rivière. Je laisse mon vélo caché dans les arbres au bout du champ et descends mes affaires, pour installer ma tente en bordure de l’eau.
Je décide de m’y baigner, mais j’ai bien du mal à immerger plus que mes jambes, je prends une dernière respiration et me laisse tomber. L’eau est glaciale, je fais quelques brasses et reviens quand je vois que le courant m’emporte facilement comme il le ferait d’un tronc mort. Je me lave donc rapidement et ressors me sécher avant que la température baisse avec le coucher du soleil. Je prépare mes habits chauds et vais faire des clichés de rapides, puis finis par écrire quelques lignes sur mon carnet.
Le soleil se couche et ne voulant pas me faire surprendre par la nuit, je prépare déjà mon souper. Pour ma première journée de vélo sans stress mécanique, je m’endors paisiblement.

Mont Mégantic - Audet 60 km

Mont Mégantic

Mont St-Joseph

Val-Racine

Piopolis

Lac Mégantic

La Chaudière

Un mal pour un bien.

La température a bien chuté pendant la nuit, en sortant de ma tente, je vois du givre dessus. Je rallume un feu pour me réchauffer après ma toilette. Je trouve mon idée, d’avoir traversé la rivière, idiote, car l’eau est glaciale ce matin et je dois faire trois aller-retour pour retourner sur l’autre rive avec l’ensemble de mes affaires.
Il est 8h, le village dort encore, un bus scolaire fait son passage, il n’y a qu’un seul enfant qui l’attend.
C’est de pire en pire, chaque montée je dois descendre de mon vélo pour avancer, mes étapes vont en prendre un coup, c’est impossible de faire mes 80km comme ça. 1 h que j’ai commencé, ma journée et je suis à St-Malo, seulement 9km de fait. Au carrefour du village, je croise l’ancien maire, il me dit que le village est le plus haut du Québec, 580m et que sa petite fille a fait partie, des finalistes de Star Académie et qu’elle prépare un clip. Monsieur le Maire me dit aussi que je dois aller à la tour du village pour avoir vue sur tous les environs. C’est donc avec toute ces informations primordiales, que je monte le village et arrive à la tour, je m’imaginais un donjon, mais c’est une tour d’observation. De la haut en effet on voit tout, le New Hamsphire, le Mont Oxford, le Mont Mégantic,…
Je médite perché ainsi, en réenvisageant mon projet. J’enfourche mon boulet et descends jusque St-Isidore, toute la route est en descente, si bien que j’arrive à bon port sans devoir pousser mon vélo. Je n’ai pas encore déjeuner, je m’arrête donc chez un dépanneur pour y acheter, banane, cheerios et lait chocolaté. M’installant sur le banc devant le magasin, je me fais mon festin, portion glouton.
Je continue par un chemin de terre, me disant, que quitte à devoir rouler tranquille autant rouler sans trop de circulation. Les vues sont magnifiques des forêts à perte de vue et la ligne frontalière. Les vaches sont les seuls témoins de mon passage. Enfin non; il y a aussi cet idiot de chien aboyant pour rien, qui me tape sur le système.
Une pente de 15% sur bien 2-3km se déroule devant moi, je fonce tout en étant vigilant aux cailloux et crevasses tapissant le parcours. En face une pente de la même catégorie mais dans l’inclinaison inverse m’attend. J’arrive à monter 1/5 de la pente mais dois tirer mon vélo sur le reste. Cela peut paraître reposant de marcher à côté de son vélo, mais quand celui-ci fait plus de 25kg, il faut oublier toute notion de repos.
J’arrive à St-Mathias, en suivant la 210, je fais une pause avant de repartir pour des chemins de terre. J’ai bien envie de faire du pouce. Je me lance qu’en même, la première descente arrive je peux enfin rouler. Je pédale à fond pour rattraper du temps. J’ai l’impression de jouer à un jeu de voiture où tu dois éviter les autres voitures. Je slalom entre trous et cailloux pour avoir le meilleur revêtement, j’évite un gros cailloux quand tout de suite après un creux arrive, coup de guidon à droite et je l’évite, pour tomber sur un autre avec en bordure des graviers. Je me dis que si je vais dans le graviers à cette vitesse je risque de déraper. Trop tard je n’ai plus de question à me poser, je viens de prendre la crevasse. Sacrée secousse, ma roue arrière frotte sur le cadre, mais finie la descente. En bas, ma roue s’arrête toute seule, la roue est voilée et est collée à mon cadre à cause du choc.
Au même moment, une voiture arrive, je mets mon pouce et le gars m’embarque. Guy, il s’appelle, un gars de Chartierville et qui fait des aller-retour depuis ce matin car il déménage à St-Malo. 46 ans qu’il était à Chartierville, il est né ici, nous passons devant la maison de ses parents. Puis il me dépose au carrefour du village. Je suis content d’avoir fait du stop car la route était atroce, même le camion avait du mal dans certaines montées.
J’ai le choix, soit je vais au Sud et passe la frontière à 2km, soit je vais au Nord, pour la Patrie. Je vais au Nord et m’arrête à l’église pour regarder ma roue, cause désespérée, acte désespéré, je démonte ma roue et essaie avec mes pieds de redresser la roue. Évidemment rien ne bouge; Je me trouve alors avec mon vélo et mon pouce tendu, 5 minutes, d’attente et des gars me prennent. Des bucherons, ils s’arrêtent à la Patrie, donc ils m’y déposent. De là j’essaie de me renseigner sur l’éventualité d’un magasin de vélo dans le secteur. On me dit qu’il n’y a rien, il faut me rendre à Lac Mégantic, à 45km. Satané vélo de merde, je me trouve à m’interroger sur son sort finalement la décision est prise je l’abandonne.
Il fallait bien se dire que je n’allais pas faire toute la route comme ça. Je cumule les problèmes, dérailleur merdique, roue voilée et frein gauche cassé. Tu as rempli la part de contrat comme tu as pu mon fidèle destrier. Je récupère ma fixation de sac guidon, mon porte bagage puis aussi la selle qui est bonne.
Maintenant il me faut trouver une voiture et me faire conduire au Lac Mégantic, là bas je trouverais une nouvelle bécane. Pour me remettre de mes émotions, je vais prendre une bière, au bar du coin. Je demande une bière, le gars me donne une 75cl, parfait je vais prendre le temps d’écrire. Mes camarades de comptoir m’interrompent dans mon écriture, interpellés par ce drôle de touriste, chargé comme un baudet? Je raconte alors mon histoire à mes camarades, le patron me donne la publicité de Canada Tire, Je pourrais m’y trouver un vélo pour 200-300$. C’est pas le tip-top mais le mien ne l’était pas non plus du moment que les vitesses tiennent un mois ça me suffit.
Ma bière est finie, je quitte donc mes compères, pour m’en aller faire du pouce. Le temps de faire 50m,  une voiture s’arrête. La dame m’avoue que chargé comme je suis, elle ne pensait pas prendre de risque en s’arrêtant. Elle habite Notre-Dame des Bois, le village voisin, ça me permet déjà de m’avancer. Le temps d’arriver, je refais le récit de ma journée et avoue mon ambition d’acheter un vélo. Elle se souvient alors avoir un vélo dont elle ne se sert pas et me propose de passer voir ce qu’il en est. Nous voilà chez elle, nous sortons le bicycle et tout à l’air d’aller, je gonfle les pneus et vais le tester. Parfait, les vitesses passent toutes et il y a même un petit plateau, utile pour les côtes du secteur. C’est un VTT, un vélo plus lourd que le mien, mais bon lui au moins il roule. Adjugé, je le prends, mon ange gardien me l’offre, m’avouant l’avoir eu en cadeau. Nous fêtons notre rencontre providentielle sur la terrasse avec une petite bière. La vue est fascinante, les lignes frontalières sont devant nous. La maison est isolée et bien située. La discussion en vient sur le Mont Mégantic, je me tâtais d’y aller car il faut le monter. Elle me propose alors d’y aller, ma gêne, ne fait rien et nous voilà partis. Malheureusement le parc est déjà fermé.
Nous revenons à la maison et ma bienfaitrice me propose de rester pour la nuit et me dit même qu’elle me conduira demain au Mont Mégantic. Je ne sais trop quoi dire devant tant de gentillesse et finalement je n’ai rien à dire, nous sommes déjà de nouveau chez elle.
En rentrant, je bosse sur le vélo pour remettre mon attache au guidon et mon porte bagage, je change la selle, car la mienne et plus souple. Nous mangeons et parlons longtemps avant de nous séparer. Mon hôte, Doris, nous avons seulement fait les présentations en rentrant à la maison, me prépare un lit, des serviettes et me laisse l’étage, elle, prend l’étage du bas. J’ai aussi la possibilité d’aller sur le net, j’envoie donc un mail à mon entourage pour rassurer sur mon état de santé. Après une bonne douche et une séance d’écriture je me couche en profitant du confort.

St Venant de Paquette - Notre-Dame des Bois 86 km

St Malo

Chez Doris