La psychologie des investisseurs: la finance comportementale

Les cours de Bourse ne réagissent pas uniquement à des facteurs rationnels, comme les résultats financiers, les informations sur les entreprises ou l'annonce d'acquisitions. Les émotions des investisseurs sont au moins aussi importantes.

Mus par leur instinct grégaire, les investisseurs austères osent parfois négocier des actions à des cours très éloignés de leur "valeur équitable", tant vers le haut que vers le bas. La psychologie comportementale, qui constitue le moteur des décisions des investisseurs, est étudiée dans une science encore relativement jeune, la "finance comportementale".

Comportement irrationnel

À court terme, les cours des actions sont souvent ballottées au gré de sentiments typiquement humains, comme la peur et l'envie. Les investisseurs agissent souvent d'une manière irrationnelle, raison pour laquelle les cours des actions sont parfois beaucoup trop élevés, ou beaucoup trop bas. Un phénomène dont les investisseurs expérimentés, qui basent leurs décisions sur les fondamentaux et se focalisent sur le long terme, peuvent tirer profit. Ainsi, les actions "TMT" (actions des secteurs de la technologie, des médias et des télécommunications) cotaient à des cours absurdement élevés en 2000. Les investisseurs achetaient les actions sans réfléchir, par crainte de manquer le train, au seul motif que ceux qui avaient acheté quelques années auparavant affichaient des gains de centaines de pour-cent. Cette cupidité a complètement éclipsé la rationalité des décisions. Au retour du bâton, les Bourses ont perdu plusieurs dizaines de pour-cent. En 2003, les cours avaient tellement baissé que personne ne voulait encore des actions, par crainte de tout perdre. Bien que les actions se soient négociées à l'époque à des cours ridiculement bas, la peur empêchait de nombreux investisseurs d'acheter. Nous vous présentons ici quelques exemples de comportements et nous vous expliquons certaines manières d'identifier les pièges.

Sur réaction et excès

Il est plus difficile de prévoir la Bourse que le temps qu'il fera, et c'est la raison pour laquelle les analystes boursiers sont encore plus suivis que les présentateurs de la météo. Les investisseurs sont surtout sensibles à la puissance des signaux émis par les analystes. Plus les messages sont forts, par exemple, un changement d'opinion brusque de "vendre" à " acheter", plus les réactions des investisseurs seront brutales. Des enquêtes révèlent que réagir à ces signaux forts n'est pas payant à long terme. Car souvent, les modifications de notations les plus spectaculaires proviennent des analystes les moins expérimentés. Les experts qui ont de la bouteille ont en effet adapté leurs pronostics depuis longtemps.

Souvent, des sur réactions interviennent aussi après la publication de chiffres trimestriels. Ces dernières années, même des multinationales comme Apple ont vu leur cours fluctuer de plus de 50% après la publication de résultats dont les investisseurs ont énormément grossi l'importance. De telles sur réactions créent des opportunités pour les investisseurs qui pensent à un peu plus long terme que trois mois.

Il est difficile de briser une tendance

Une action ou un secteur en hausse attire sans cesse de nouveaux investisseurs. Une action ou un secteur en baisse est mis au ban du marché et ne parvient guère à séduire de nouveaux actionnaires. Dans de telles situations, c'est la tendance, le point de départ de l'analyse technique, qui détermine l'opinion dominante. À court terme, suivre la tendance peut s'avérer très payant. À long terme, le comportement grégaire entraîne une perte de rationalité. Ceux qui laissent de côté leurs sentiments peuvent alors acquérir des actions bon marché.

Les pertes font plus mal que les gains font du bien

L'esprit humain réagit mal aux "pertes". Les enquêtes révèlent qu'une perte est ressentie deux plus fort que la joie que l'on retire d'un bénéfice. C'est pourquoi de nombreux investisseurs souffrent du syndrome "get-it-even", que l'on pourrait traduire par "donne-lui un peu de temps": ils refusent de vendre à perte une action peu performante. Cette stratégie est néfaste pour le revenu à long terme d'un portefeuille et peut provoquer des accidents. La victime la plus célèbre du syndrome "get-it-even" est Nick Leeson, qui, en accumulant les pertes, a mené la banque Barings à la faillite.