Note de lecture

Liliana Donzis introduit son travail d'une touche personnelle intéressante ; d'un effet de style, voulu ou non, par l'articulation de quelques signifiants judicieusement choisis qui ne sont pas sans évoquer l'activité d'une femme à " son métier à tisser ".
Je tenais à souligner l'attrait de cette présentation et cette facilité d'introduire un sujet assez complexe.
La première partie intitulée :
La mémoire éthique s 'inscrivant avec la lettre de l'oubli. Elle est celle du temps freudien… Moment où Freud introduit une théorie de la mémoire comme étant une écriture, ponctuée par la discontinuité du système de perception. C'est ainsi que s'organisera, que se mettra en place " l'idée du temps " : c'est-à-dire, dans cette discontinuité et dans la notion d'un avant et un après, d'une trace laissée, d'une trace effacée…et réactualisée.
La mémoire devra nécessairement passer par l'oubli ; oubli inauguré par le refoulement originaire qui lui ne réapparaîtra plus jamais et qui cependant demeurera actif, attractif pour des nouvelles impressions recueillies par le système perceptif. Cet oubli étant là comme marqué du refoulement et cependant, nécessaire à un possible déchiffrement des traces.
Le retour de l'oublié ne peut prétendre à toute la vérité des points de départ puisque cet oubli est là comme marque du refoulement.
La deuxième partie intitulée : La mémoire, voile fantasmatique d'un temps en acte
Il y a donc impossibilité à retrouver tout le passé, car la mémoire ne reprend consistance que dans le temps, dans l'instant. L'oubli, que Liliana Donzis inscrit du côté de " la mortification " du sujet par le signifiant, laisse la possibilité à un moment donné que quelque chose puisse se faire entendre du sujet.
La mémoire peut être considérée comme un voile permettant d'ignorer un réel qui serait ainsi protégé. C'est ainsi que peut être entendue cette nécessité de notre culture de XXème siècle de réclamer la Mémoire des génocides et de la Shoah, ignominie du réel du sexe et de la mort.
Cette mémoire de l'extermination dans l'univers concentrationnaire est une mémoire chiffrée, sans reconnaissance de la place d'un sujet : pas de nomination, pas de nom propre, mais désignation par des noms communs, des noms de choses, des numéros.
La mémoire n'est-elle qu'un temps atemporel propice aux coupures et aux silences !…
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La temporalité…Freud s 'est intéressé à cette notion dès le début de ses recherches à propos de l'inconscient, du temps de l'inconscient qui est atemporel ; l'inconscient ne connaît pas le temps, il ne connaît pas la durée ainsi que l'inaltérité du refoulé par rapport au temps.
Nous savons que les traumatismes de l'enfance opèrent après-coup. " Comme s'il s'agissait d'expériences nouvelles " Ce qui va conduire Freud à développer l'idée d'un avant et d'un après, d'une rythmicité.
Le temps a donc des effets sur l'appareil psychique et la mémoire est un de ces effets. Cette mémoire est en relation étroite avec le corps puisque sous l'influence de la tension que procure l'excitation pulsionnelle et de l'intensité d'une impression. Le mécanisme est simple : c'est à partir d'une première empreinte, suivie d'une succession d'inscriptions ou traces mnésiques. C'est cette trace qui est appelée à s'effacer du système conscient pour réapparaître en se réactualisant dans certains souvenirs avec la même vivacité que pour la première fois.
Cette première inscription de la mémoire par le corps, est étroitement liée à la notion d'intensité d'une impression et, le vécu subjectif du temps s'attachera étroitement à l'importance de cette intensité… et à sa durée.
Voilà très brièvement quelques points de la théorie freudienne sur la mémoire et le temps. Bien sûr la rencontre de la psychanalyse avec le temps se retrouve dans la pratique : la remémoration, le transfert, les scansions, la répétition…

lecture de NICOLE MERCIER, AFI