1.Une idée récente
Dans un premier temps le principe était que l'Etat était "irresponsable" juridiquement. La nation ne pouvait mal faire, c'était le corollaire de la souveraineté nationale
Dans un 2ème temps au 19è siècle, ce principe a évolué en raison de la présence de + en + fréquente de l'Etat. L'administration est soumise au droit et à l'Etat de droit et doit répondre aux dommages qu'elle cause aux usagers ou aux personnes morales. Au principe d'irresponsabilité s'est substitué un système de responsabilité partielle et atténuée.. La responsabilité de l'Etat n'est ni générale ni absolue et elle a ses règles spécifiques.
C'est une idée récente mais qui a du mal à s'imposer, idée démocratique, souvent encore impossible dans de nombreux pays. Il s'agit de reconnaître le droit du particulier face à l'ordre public.
Etat cause des dommages , rupture de l'égalité , l'usager ou la personne morale peut demander réparation du préjudice devant le juge administratif.
Ce système de responsabilité va se renforcer vis à vis des victimes au travers de deux étapes essentielles :
la possibilité de mettre en cause la responsabilité du fonctionnaire
mais surtout la détermination des victimes respectives du fonctionnaire ou du service. Cette distinction va permettre de demander et d'obtenir réparation du préjudice.
Le régime juridique est un régime indépendant des règles du code civil. Il est parfaitement autonome à partir des règles élaborées peu à peu par le juge administratif
Cette responsabilité repose sur deux principes :
droit à un fonctionnement normal du Service Public
égalité du citoyen devant la charge publique (aucun particulier ne doit supporter plus qu'un autre la charge inhérente au fonctionnement du Service Public).
C'est d'abord l'oeuvre des juges qui ont élaboré des règles de droit commun avec à côté des régimes spéciaux élaborés par le Législateur pour correspondre à des activités spécifiques de l'administration.
exemple de régimes spéciaux :
- dommages causés par des véhicules de l'administration (juge judiciaire)
- responsabilités de l'Etat au nom de ces agents (Loi de 1937)
Derrière cette question de la responsabilité de l'Administration, il s'agit de savoir jusqu'où on peut et on doit étendre la "socialisation des risques" (faire supporter par la collectivité des dommages causés à quelques uns dans le cadre d'une activité d'intérêt commun).
Exemple : l'Administration fait sortir un prévenu, un malade mental mais s'il pose des problèmes : qui doit réparer ? comment ? jusqu'où peut-on dire que l'administration a commis une faute ? A partir de quels stades les aléas de l'activité de l'Administration ne doivent plus être considérés comme normaux?
Il existe donc un régime général complexe, nuancé, pragmatique dans lequel le juge tentera de trouver un équilibre entre l'intérêt de la victime et l'intérêt de l'Administration, en sachant que la mise en cause d'un fonctionnaire peut entraver le fonctionnement, décourager les fonctionnaires, grever les finances publiques? avec les meilleures intentions du monde.
De plus, le juge administratif porte un jugement sur l'action de l'Administration du Service Public, ce qui n'est pas toujours apprécié.
C'est la notion de faute qui fonde le régime de responsabilité, sanction devant frappée celui qui a commis une faute.
En 1870, l'abolition du système dit de " la garantie du fonctionnaire", régime quasi d'irresponsabilité juridique du fonctionnaire dans l'exercice de sa fonction, le Conseil d'Etat a, peu à peu distingué selon que la faute commise par le fonctionnaire est ou non détachable de ses fonctions
1.La faute personnelle
Définition possible : (Léon Blum) faute personnelle si l'acte dommageable révèle ou non l'Homme, avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences.
Exemple de faute personnelle :
Pas de définition d'ensemble. faute commise par l'Administration mais sans qu'on puisse considérer qu'il s'agit de la faute d'un agent en particulier.
La faute de service ne se présume pas. Il faut que la victime apporte la preuve qu'i y a eu faute de l'Administration. Mais le juge se met souvent à la place de la victime, la preuve étant souvent difficile à faire. Il suffit parfois d'un début de preuve, parfois que le juge inverse et suppose qu'il y a présomption de faute, l'Administration devant alors prouvée qu'il n'y a pas eu faute (ex: travaux dans un établissement, contracter une maladie au cours d'une hospitalisation).
Une faute simple suffit pour engager la responsabilité de l'administration dans ses activités normales mais il faudra une faute lourde lorsque l'action de l'Administration comporte des aléas et ceci pour ne pas pénaliser la fonction de l'Etat
Exemple :
Cas ou une faute simple suffira :
renseignements inexacts
cas ou une faute lourde sera nécessaire :
théorie élaborée par le juge administratif
1.les rapports de l'Administration et de la victime
a)le cumul des fautes
exemple :
fermeture du bureau d'une administration quelques minutes avant heures prévues : faute de service, et altercation musclée de l'agent et d'un usager : faute personnelle
Dans ce cas la victime peut mettre en cause soit le fonctionnaire soit le service
b)le cumul des responsabilités
Dans ce cas la victime peut engager une action contre l'administration, voire contre l'agent même parfois si le lien est faible entre l'activité de l'administration et la faute de l'agent
En général, l'action se fera plutôt contre l'Administration (plus de chance d'être indemnisé)
Victime
Faute de service Juge judiciaire Faute personnel Juge administratif
administration fonctionnaire
Assez rarement
utilisée mais par contre plus souvent des sanctions
disciplinaires Action récursoire
Création originale en grande partie dûe au Conseil d'Etat dans le souci de la protection des victimes ; responsabilité subsidiaire, secondaire par rapport à la responsabilité pour faute.
La victime doit seulement prouvée un lien de causalité entre le dommage subi et l'activité de l'administration, la seule exonération possible étant la "force majeure", événement imprévisible ou s'il y a faute de la victime
Lorsque que l'Administration fait courir à l'usager des risques exceptionnels pour accomplir un bien commun on considère que la victime a droit à des indemnités sans qu'il y ait besoin d'établir la faute.
Exemple :
Une activité de l'Administration doit profiter à tous, être conforme à l'intérêt général mais elle peut constituer une charge trop lourde reposant sur quelques uns, le principe d'égalité nécessite la réparation de la charge sur tous .
exemple : expulsion autorisée par le juge judiciaire rarement exécutée par les forces de l'ordre (crainte de troubles de l'ordre public, placement des enfants, ?). Mais le propriétaire ne reçoit plus ses loyers. Dans ce cas il peut intenter un recours auprès du juge administratif; son droit de propriétaire étant bafoué et le principe d'égalité étant rompu. Il sera indemnisé pat l'Etat.
A.la compétence contentieuse
De la compétence du juge administratif (sauf si la Loi prévoit autrement, cf au dessus)
B.la réparation
1.l'imputabilité
Il s'agit de rechercher qu'elle est la personne morale qui doit indemniser (Etat, collectivité territoriale, établissements, ?) en principe, celle qui en charge le service.
2.Les caractères du préjudice
On dit que le préjudice doit être certain, actuel, et direct. Très rarement il peut être éventuel (ex: perte d'une chance). Il doit correspondre à un intérêt légitime conforme à l'ordre public (ex : on ne peut pas reprocher à l'Administration de refuser l'ouverture de commerce illicites !!)
3.L'évaluation du préjudice
Il se fera au moment du jugement (à cause de l'érosion monétaire) mais le juge administratif veille toujours à ne pas trop grever le budget de l'Etat (plus de responsabilités de l'Etat mais moindre indemnisation).
Conclusion
En condamnant l'Administration à indemniser, le juge opère un contrôle indirect du Service Public dans la mesure où il sanctionne l'activité du service et l'amène ainsi à corriger son mode de fonctionnement.
Mais jusqu'où le juge peut-il étendre ce contrôle, cette idée d'indemnisation, de responsabilité sans gêner l'activité de l'Administration. D'où le grand pragmatisme de ce régime de mise en responsabilité de l'Administration. Tentative de maintenir un équilibre toujours en évolution entre la nécessaire protection des usagers et des victimes de l'Administration et d'autre part, la nécessité de ne pas paralyser l'action du Service Public par une mis en cause excessive, voire abusive de l'Administration et de ses fonctionnaires.
Attention : Ce cours concerne le système général du droit administratif qui ne doit pas être confondu avec les régimes particuliers (ex : instits) ni avec le fait qu'un directeur peut être mis en cause civilement et pénalement.