Petite histoire des ambulants
 
 
 
 
 
 

L'éclairage dans les wagons poste ambulants

Il existe deux types principaux de wagons postaux :
- les bureaux de poste ambulants, wagons où des employés de la Poste effectuent le tri des dépêches pendant le trajet d'une gare à une autre. Le premier date de 1845 et a été utilisé sur la ligne Paris-Rouen , les derniers ont circulé au milieu des années 1990 ;
- les allèges, destinées à transporter les dépêches et sans travail effectué durant le trajet ; le premier date de 1847 et a été utilisé sur la ligne Paris-Orléans, les derniers circulent toujours sous la forme des TGV postaux.


Allège et ambulant

Des formes hybrides existent également (wagons mixtes, wagons transformés) et le courrier a été également transporté , voire trié dans des fourgons ou des voitures particulières, notamment lors des conflits ou de circonstances exceptionnelles.
Cette étude ne concerne que les bureaux ambulants, les lieux de tri seuls nécessitant un éclairage continu , en principe de qualité, pendant toute la durée des trajets, de jour comme de nuit. Les allèges bénéficient, bien entendu des mêmes progrès que les ambulants.

L'éclairage diurne


Wagon à persiennes fictives.
Paris-Lyon (1862) (MP)

Les premiers wagons (Paris-Rouen 1845, Strasbourg-Mulhouse et Paris-Tours 1846) ne comprennent que quatre portières-baies, les casiers de tri occupant les parois intérieures des wagons et ne permettant pas l'installation de fenêtres.

L'éclairage s'avère vite insuffisant et à partir de 1848, le nouvel ambulant de 6,10 m du réseau Nord ,muni des quatre portières usuelles équipées de jalousies, bénéficie d'une invention : une toiture percée de 5 fenêtres à l'italienne garnies de glaces dépolies et de stores.

L'éclairage par baies latérales et 6 ou 8 châssis à tabatière selon les modèles, pratiqués dans les toitures, sera le seul utilisé pendant plus d'une quarantaine d'années. Insuffisant, il est doublé par des lampes à huile.
C'est en 1893, sur le modèle de 6,80 m, qu'une invention fondamentale, deux rangées de lanterneaux à châssis fixes sur la longueur du pavillon, va considérablement améliorer la vision diurne : la lumière solaire pénètre enfin largement et uniformément par le haut.
A partir de 1900, les lanterneaux vont faire partie intégrante des " 14 m " et des " 18 m " qui possèdent quatre doubles portières vitrées, plus 3 baies par côté, celle du milieu étant à châssis mobiles. D'abord à bords droits, ils vont être rapidement dotés d'une extrémité inclinée dite coupe-vent.

Le lanterneau va orner les wagons postaux jusqu'à la construction de l'ambulant UIC de 26,40 m de 1973 qui en sera dépourvu parce qu'il est doté d'un éclairage électrique fluorescent capable de remplacer la qualité de l'éclairage diurne.

Lanterneau et fenêtre sur porte
OCEM (1928)
Le parc ancien sera cependant utilisé jusqu'à la fin des bureaux ambulants et le wagon à lanterneau est devenu le symbole du wagon postal pour des générations de non-roulants !

L'éclairage nocturne


A l'exception de Strasbourg à Mulhouse, les premiers bureaux ambulants circulent la nuit. C'est pour cette raison que, dans un premier temps, on n'accorde que peu d'importance à l'éclairage diurne dans les wagons postaux.
Il ne semble pas que l'éclairage par chandelles - suif et mèche de coton - ait été utilisé. Pourtant des bougies demeurent en réserve en cas de panne.

L'éclairage par lampes à huile

Sur Paris à Rouen, Paris à Tours et Paris à Valenciennes, l'éclairage est dispensé par six lampes à huile de pur colza, selon le système dit de CARCEL, ou par d'autres lampes à mouvement, réglables, conformément à la soumission du 15 octobre 1847.

L 'huile végétale a la préférence sur l'huile minérale qui s'étale et s'enflamme trop facilement en cas de choc.
Elles passent au nombre de 8 pour les wagons de 7 m à partir de 1855.
Les lampes à huile sont accrochées dans les angles du bureau et au plafond.
Très vite cependant, elles sont posées sur des consoles, cercles en métal scellés aux casiers. L'évacuation de la fumée vers l'extérieur se fait par un conduit sortant par le toit.
" Les lampes répandent au plafond une lueur fumeuse, vacillante, mélancolique. Les Anglais les estiment admirablement adaptées au travail sur chemins de fer et supérieures aux leurs. "Duran et Plagnes, op. cit.

A la fin du XIX e siècle, de nouveaux moyens d'éclairage ont été inventés : l'éclairage au gaz et l'éclairage électrique. Mais, l'Administration a renouvelé le contrat de l'éclairage à l'huile expirant en 1905, à cause des coûts, décevant les espoirs de ceux qui entrevoyaient la généralisation des nouveaux systèmes.
La fin de la lampe à huile dans les ambulants français date de 1914.

Wagon ambulant vers 1850 (MP)

L'éclairage au gaz

Les voitures de voyageurs commencent à être éclairées au gaz à la fin de 1881. Cependant, il faut attendre les dernières années du siècle pour voir l'installation de becs d'éclairage du genre AUER, à incandescence.


Wagon ambulant pendant la
Première guerre mondiale (MP)
Il est installé dès 1895, notamment sur les réseaux Nord et Est.
Au nombre de 14 par wagon, ils équipent les modèles de "18 m" jusqu'en 1914, année qui voit par ailleurs la fin de la lampe à huile.

L'éclairage au gaz, s'il constitue un progrès certain, il n'en demeure pas moins qu'il est très souvent source d'incendie lors des tamponnements. En fait, le gaz a recueilli les faveurs des responsables de la Poste parce que le coût était inférieur à celui d'une installation électrique

.Le Parlement le condamne à la suite d'un débat après la catastrophe de Melun (novembre 1913) dans laquelle des postiers sont brûlés vifs par l'explosion d'un réservoir en contenant.
Il sera remplacé par l'éclairage électrique sur tous les wagons-poste à partir de 1918.

L'éclairage électrique

L'éclairage électrique apparaît sur quelques "14 m" en 1900 et il équipe 55 ambulants en 1905. Sa supériorité étant démontrée et reconnue sur les autres moyens d'éclairage, l'installation sur les wagons n'est retardée qu'à cause du surcoût occasionné par rapport aux autres moyens. Au même moment, 83 % du parc postal allemand (1564 wagons-poste) est équipé de l'éclairage électrique par accumulateurs !

La catastrophe de Melun ayant entraîné une prise de conscience de la dangerosité du gaz d'éclairage en cas d'accident, l'électrification des wagons est envisagée, mais retardée par la Première guerre mondiale.
L'éclairage électrique sera installé obligatoirement sur tous les wagons-poste à partir de 1918.

Dans les bureaux ambulants, l'éclairage se présente sous forme de grosses lampes au plafond et d'un éclairage moins important installé au-dessus des casiers de tri. L' abat-jour, fixe à l'origine, sera rapidement orientable pour permettre une meilleure vue sur les tables de tri.

L'énergie électrique est fournie par des batteries d'accumulateurs chargés aux stations, puis au moyen d'une dynamo actionnée par un des essieux de la voiture au moyen d'une large courroie lorsque le wagon se déplace. Il équipera tous les modèles construits après 1923 (et il fonctionne en Allemagne dès 1883 !)


Lampes élecriques dans un ambulant du musée.


Si le châssis, la batterie et la dynamo appartiennent aux PTT, les bogies sont propriété de la SNCF. En cas de cassure ou de perte de la courroie, la situation pouvait se révéler cocasse parfois puisque le remplacement devait se faire par un agent de la SNCF après émission d'un bon écrit et dûment daté…

Parfois, les ambulants faisaient un bond d'un siècle … en arrière ! Lors des manœuvres, chauffage et éclairage fonctionnent sur les accumulateurs et lorsque ceux-ci sont vides, force est de ressortir les bonnes vieilles bougies !



Rampe dans l'ambulant UIC
du musée
La dernière révolution dans l'éclairage des wagons-poste interviendra en 1973 avec la première construction d'un véhicule postal depuis 1937 . Il s'agit de l'ambulant UIC de 26,40 m , type 1974.

Dépourvu de lanterneau, il est doté d'un éclairage fluorescent sous forme de deux rampes continues situées au-dessus des tables de tri.

Les derniers ambulants ont bénéficié des progrès techniques avec éclairage à haut niveau d 'éclairement, batterie à grande capacité, Statodyne puissant et transformateur d'éclairage par source extérieure en rapport.


Sources et bibliographie

Jean DURAN et Rémy PLAGNES, L'époque héroïque des bureaux de poste ambulants des origines à 1914, CELO, 1983
Maurice KNEPPER et Claude POCHER, La Poste et le Rail, Ed. La Vie du Rail, 1999
Pierre DEMANGEON, Les conditions de travail dans les bureaux de poste ambulants, Colloque de la FNARH, Orléans juin 1999
Marcel BAGUET, Les postiers du rail, Association des Amis des PTT d'Alsace, 1995
Harry MIOSGA, 130 Jahre Bahnpost in Deutschland, Archiv für deutsche Postgeschichte, 1980.
D. BERTINOTTI, Artisans d'hier des communications d'aujourd'hui 1850-1950 , Exposition des Archives Nationales (9 avril-8 juin 1981)

Documents : Musée des ambulants, Musée de la Poste (MP) et collection particulière.