La Quebrada de Humahuaca
Dimanche 20 septembre 2009.
En ce dimanche, je retrouve Patrick, un Français vivant à Salta depuis 15 ans, marié à une Argentine, et passionné par la nature et la culture de sa région. De très bon matin, nous quittons la ville à la découverte de la Quebrada de Humahuaca. Une Quebrada, c'est une vallée très profonde, une gorge. Celle que nous allons visiter aujourd'hui est orientée nord-sud, dans la Cordillère Orientale, et s'étend sur plus de 150 km, en gros de Tres Cruces au nord à Volcán au sud ; elle est traversée par la nationale 9, qui relie Buenos Aires à la Bolivie toute proche, et qui longe ici le cours du Rio Grande. La Quebrada de Humahuaca est inscrite depuis 2003 au Patrimoine Mondial de l'Unesco. Pour gagner du temps, au départ de Salta, nous empruntons d'abord l'autoroute jusqu'à General Güemes, puis de là un mélange de routes et d'autoroutes jusqu'à San Salvador de Jujuy (que tout le monde abrège en Jujuy), capitale de la province voisine du même nom. Très vite la précordillère apparaît, souvent masquée par des brumes matinales ou des nuages. Il va faire très beau, la journée s'annonce sous les meilleurs auspices.
Tout au long du chemin, je remarque au bord de la route de nombreux petits autels multicolores : ils sont dédiés à la Difunta Correa ou au Gauchito Gil, et sont autant de sanctuaires élevés à ces saints très populaires en Argentine, bien que non reconnus par l'Eglise (voir ici). La route est également bordée de villages ou de hameaux, dont les maisons sont de plus en plus souvent édifiées avec des briques de pisé (terre crue séchée au soleil) à mesure que nous progressons vers le nord. Le bas des montagnes est couvert d'une forêt subtropicale appelée la yunga. Nous atteignons enfin Jujuy. Vue de l'extérieur, c'est une ville assez hétéroclite, avec des immeubles modernes sans aucun cachet particulier, et entourée de faubourgs miséreux. Nous y repasserons et nous nous y arrêterons en fin de journée.
Après le passage de Volcán, nous entrons pour de bon dans la Quebrada : la route pénètre entre deux chaînes de la Cordillère orientale. Après avoir dépassé Tumbaya, nous arrivons à un grand croisement. Nous délaissons provisoirement la nationale 9 et le Rio Grande, et tournons à gauche en direction de la Cuesta de Lipán et du Chili, et arrivons au village de Purmamarca (510 habitants), à 2.192 m d'altitude. Le spectacle est grandiose, le village est en effet niché au pied d'une montagne multicolore appelée le Cerro de los Siete Colores (montagne aux Sept Couleurs). Depuis la route récemment refaite et du Rio Purmamarca, la vue est absolument époustouflante.
Tout au long du chemin, je remarque au bord de la route de nombreux petits autels multicolores : ils sont dédiés à la Difunta Correa ou au Gauchito Gil, et sont autant de sanctuaires élevés à ces saints très populaires en Argentine, bien que non reconnus par l'Eglise (voir ici). La route est également bordée de villages ou de hameaux, dont les maisons sont de plus en plus souvent édifiées avec des briques de pisé (terre crue séchée au soleil) à mesure que nous progressons vers le nord. Le bas des montagnes est couvert d'une forêt subtropicale appelée la yunga. Nous atteignons enfin Jujuy. Vue de l'extérieur, c'est une ville assez hétéroclite, avec des immeubles modernes sans aucun cachet particulier, et entourée de faubourgs miséreux. Nous y repasserons et nous nous y arrêterons en fin de journée.
Après le passage de Volcán, nous entrons pour de bon dans la Quebrada : la route pénètre entre deux chaînes de la Cordillère orientale. Après avoir dépassé Tumbaya, nous arrivons à un grand croisement. Nous délaissons provisoirement la nationale 9 et le Rio Grande, et tournons à gauche en direction de la Cuesta de Lipán et du Chili, et arrivons au village de Purmamarca (510 habitants), à 2.192 m d'altitude. Le spectacle est grandiose, le village est en effet niché au pied d'une montagne multicolore appelée le Cerro de los Siete Colores (montagne aux Sept Couleurs). Depuis la route récemment refaite et du Rio Purmamarca, la vue est absolument époustouflante.
En ce 20 septembre, nous ne sommes qu'à la veille du printemps austral, et le cours du Rio Purmamarca (tout comme celui du Rio Grande) est presque à sec ; tout juste ne s'écoule-t-il qu'un faible filet d'eau au milieu du lit de la rivière. Mais sous l'effet de la fonte des neiges dans les Andes, l'eau arrivera brutalement et transformera ce mince ruisseau en une grosse rivière tumultueuse. Les infrastructures construites par l'homme sont prévues pour s'adapter à ce brusque changement de débit. Le long du Rio Purmamarca, on note la présence de hameaux constitués de maisons de pisé, dont les habitants vont puiser l'eau directement dans la rivière.
Maisons de pisé le long
du Rio Purmamarca.
Le village est naturellement organisé autour de sa vieille église de pisé, toute blanche, dont la construction remonte à 1648. Elle est dédiée à Santa Rosa de Lima, la sainte la plus vénérée en Amérique latine. Sa charpente est faite de bois de cardon, c'est-à-dire de ces grands cactus candélabres qui parsèment le désert alentour. Devant, l'église, se trouve un parvis pavé en plan incliné qui conduit à un curieux portail en fer à cheval. Non loin de l'enclos, on peut admirer un majestueux agorrobo (caroubier) qui, selon certains, serait plus que millénaire...
Maisons de pisé le long
du Rio Purmamarca.
La corvée d'eau
sur le Rio Purmamarca.
sur le Rio Purmamarca.
Le village est naturellement organisé autour de sa vieille église de pisé, toute blanche, dont la construction remonte à 1648. Elle est dédiée à Santa Rosa de Lima, la sainte la plus vénérée en Amérique latine. Sa charpente est faite de bois de cardon, c'est-à-dire de ces grands cactus candélabres qui parsèment le désert alentour. Devant, l'église, se trouve un parvis pavé en plan incliné qui conduit à un curieux portail en fer à cheval. Non loin de l'enclos, on peut admirer un majestueux agorrobo (caroubier) qui, selon certains, serait plus que millénaire...
Le portail de l'enclos
de l'église de Purmamarca.
L'église Santa Rosa de Lima de Purmamarca date de 1648. Elle est
édifiée en pisé et sa charpente est
en bois de cardon (cactus).
L'agarrobo (caroubier)
séculaire de Purmamarca.
séculaire de Purmamarca.
Dès qu'on quitte l'église, et qu'on gravit les rues souvent escarpées du village, le regard se porte naturellement vers la montagne environnante, le fameux Cerro de los Siete Colores. Et on ne peut faire autrement que d'être émerveillé, c'est d'une beauté époustouflante, irréelle même. Le guide Lonely Planet parle d'une "spectaculaire formation ressemblant au délire en pâte d'amande d'un pâtissier mégalomane", c'est tout à fait cela !
Après ce premier arrêt remarquable à Purmamarca, nous rejoignons la nationale 9 pour remonter la Quebrada vers le nord, jusqu'à Humahuaca. Une quinzaine de kilomètres plus tard, nous arrivons à un village nommé Maimará, établi au pied du flanc occidental de la Quebrada. Sous l'effet de la tectonique des plaques, de très anciennes couches sédimentaires surgies de l'océan ont été déformées comme de vulgaires feuilles de papier. Elles dessinent sur la paroi de la montagne, sur quelque six kilomètres de longueur, une quinzaine de zigzags, parés d'extraordinaires couleurs. Ce lieu est appelé la Paleta del Pintor (la Palette du Peintre).
Huit kilomètres plus au nord, nous arrivons à Tilcara (4.360 habitants), à 2.461 m d'altitude. Ce bourg est surtout connu pour son Pucará, c'est à dire pour sa forteresse précolombienne - et même préincaïque -, établie au sommet d'une éminence. Le site, qui avait une importance stratégique entre les XIe et XVe siècles, n'a été découvert qu'en 1903 ; il a partiellement été restauré (et même reconstruit) au cours des années 1950 par une équipe d'archéologues de l'Université de Buenos Aires.
Les ruines restaurées du Pucará de Tilcara.
Ce site archéologique est situé dans un cadre particulièrement magnifique, en plein centre de la Quebrada de Humahuaca. Du haut de la colline, on jouit d'une vue à 360° sur la vallée du Rio Grande. Les ruines sont cernées à perte de vue par une multitude de cardones - de cactus candélabres -, qui sont utilisés localement comme bois de construction pour les charpentes des maisons et même des églises.
Un troupeau de lamas.
Strates géologiques contrariées.
A quelques kilomètres au nord de Tilcara, à côté du bourg de Huacalera, la nationale 9 traverse le tropique du Capricorne. De ce point précis (parallèle de 23° 26' 22" de latitude sud) à l'équateur, nous pénétrons en zone tropicale. En cette fin de matinée, il fait maintenant très chaud, et surtout l'air est d'une extrême sécheresse.
Paysage de la Quebrada de Humahuaca, au passage du tropique du Capricorne.
Nous arrivons finalement à notre destination, Humahuaca, aux alentours de midi. Ce bourg de quelque 8.000 habitants est situé à 2.989 m d'altitude. Un taux d'hygrométrie pratiquement nul, une raréfaction de l'oxygène et sans doute aussi la lumière écrasante confèrent à ce lieu une ambiance étrange, on se sent presque dans un autre monde, très minéral. La population est très majoritairement indienne. Ce qui me frappe, c'est qu'en dépit de la chaleur torride, la plupart des gens sont habillés comme en plein hiver, avec pulls et anoraks ; Patrick m'explique que les températures sont ici très changeantes (ce que je vérifierai d'ailleurs très bientôt), et que les Humahuaqueños ont l'habitude de sortir de chez eux avec toute leur garde-robe sur le dos...
Nous allons déjeuner dans une auberge plutôt rustique, et je ne peux m'empêcher de goûter - non sans quelque honte - à de la viande de lama, servie avec de minuscules pommes de terre andines. C'est bon, mais plutôt ferme, rien à voir avec les délicieuses viandes que j'ai dégustées dans tout le reste de l'Argentine. En sortant de l'auberge, la luminosité est telle qu'elle en est presque douloureuse ; et surtout, je sens que chaque geste devient pénible, c'est le soroche, le mal des montagnes (que je n'avais pas éprouvé en Bolivie, à une altitude pourtant encore plus élevée). En marchant au hasard des rues, je m'aperçois qu'elles sont toutes pavées, et que les soubassements des maisons sont faits de pierre, héritage andin et inca qui a été réutilisé par le colonisateur espagnol.
Nous allons déjeuner dans une auberge plutôt rustique, et je ne peux m'empêcher de goûter - non sans quelque honte - à de la viande de lama, servie avec de minuscules pommes de terre andines. C'est bon, mais plutôt ferme, rien à voir avec les délicieuses viandes que j'ai dégustées dans tout le reste de l'Argentine. En sortant de l'auberge, la luminosité est telle qu'elle en est presque douloureuse ; et surtout, je sens que chaque geste devient pénible, c'est le soroche, le mal des montagnes (que je n'avais pas éprouvé en Bolivie, à une altitude pourtant encore plus élevée). En marchant au hasard des rues, je m'aperçois qu'elles sont toutes pavées, et que les soubassements des maisons sont faits de pierre, héritage andin et inca qui a été réutilisé par le colonisateur espagnol.
La cathédrale Nuestra Señora de la Candelaria y San Antonio est reconnaissable à ses deux grandes tours de pisé blanc. Elle a été édifiée en 1631, c'est l'église la plus ancienne de toute l'Argentine. Elle est jouxtée par la Plaza Sargento Gomez, sur laquelle se tient quotidiennement un marché artisanal, un peu trop touristique à mon goût.
A l'ouest de la place, un escalier de 103 marches mène à l'imposant Monumento a los Héroes de la Independencia (monument aux héros de l'Indépendance), réalisé en 1950. Un messager indien, haut de 10 m, y proclame la fin du joug colonial, thème récurrent dans la mythologie nationale argentine. En gravissant ces marches, je ressens tout particulièrement le mal de l'altitude...
Mais cette ascension pénible en valait véritablement la peine, car du haut du monument, la vue sur Humahuaca et la vallée est éblouissante (dans tous les sens du terme).
Les couleurs de Humahuaca.
Humahuaca est emblématique des villages andins avec ses maisons basses à
toits-terrasses.
En gravissant de nouvelles marches, on arrive au cimetière indien de Humahuaca, particulièrement coloré et fleuri.
En redescendant dans les rues de Humahuaca, je suis surpris d'y découvrir ce magasin d'artisanat équitable.
Près de l'ancienne gare (la ligne Jujuy-La Quiaca a été fermée dans les années 1980), la réalité est plus prosaïque que dans le centre...
Ainsi que m'en avait prévenu Patrick, le temps change brutalement aux alentours de 15 heures. Le vent se lève, créant de nombreux tourbillons de poussière au milieu des routes, et les températures baissent brutalement. Il devient vite nécessaire d'enfiler un pull.
Il est temps de songer à rentrer à Salta. A mesure que nous redescendons la Quebrada vers le sud, le ciel se couvre d'ailleurs, comme pour m'épargner le regret de quitter une si belle région. Nous faisons une courte halte à San Salvador de Jujuy, capitale provinciale (278.400 habitants, 1.201 m d'altitude) qui fait bien pâle figure face à toutes les merveilles que nous avons vues précédemment. Autour de la Plaza Belgrano s'élèvent les deux principaux bâtiments historiques de la ville : la cathédrale et la Casa de Gobierno (Palais du Gouvernement).
La cathédrale date de 1765. Mais elle a fortement été
remaniée au XIXe siècle, après la guerre d'Indépendance.
remaniée au XIXe siècle, après la guerre d'Indépendance.
Cette superbe chaire de l'Ecole de Cuzco (XVIIe siècle.)
est incontestablement le joyau de la cathédrale.
La Casa de Gobierno est un bâtiment néoclassique
d'inspiration française. Elle a été achevée en 1920.
Après cette belle incursion dans l'extrême nord de l'Argentine, nous regagnons Salta. L'étape suivante de mon voyage sera la Quebrada de las Conchas, au sud de Salta, en direction de Cafayate, étape qui fera l'objet du prochain article de ce blog.