Editorial n°14

Le déglingué et l’impossible


Les congressistes sont là. Grâce à leur détermination et aux cieux dégagés. Grâce à l’imposant travail de la commission d’organisation, qu’elle soit remerciée, bientôt chacun aura les instruments nécessaires pour s’orienter dans notre Méga-Congrès. Tout est en ordre pour permettre la conversation.

Nous avons commencé cette série du Journal du Congrès après Pâques, en parlant de la présence de Dieu dans le monde. C’était Lui qui, longtemps, fût le garant de l’ordre symbolique. Puis, cet ordre, il a fallu l’extraire de Dieu. Il a fallu, à l’époque de la mathesis universalis, que Descartes sépare Dieu et la raison, faisant de Dieu un lieu d’infini « incompréhensible » et créateur des vérités éternelles.

L’inconscient freudien, la raison après Freud, hérite de cet ordre symbolique, mais doublement troué. Il est troué du paradoxe que détectait Russell dans toute écriture logique possible. Dans les termes de sa lettre de 1902 à Frege : « Soit w le prédicat : être un prédicat qui ne peut être prédiqué de lui-même. W peut-il être prédiqué de lui-même ? Pour chaque réponse, son contraire s’ensuit. Nous devons donc conclure que w n’est pas un prédicat. De la même manière, il n’y a pas de classe (comme totalité) de ces classes qui, chacune prise comme une totalité, n’appartiennent pas à elles-mêmes. De cela je conclus que dans certaines circonstances un ensemble (Menge) défini ne forme pas une totalité. »

D’une part, nous avons le trou que forment ces ensembles, qui ne sont pas pour autant des totalités. Ils ne se ferment pas. D’autre part, il y a le trou du sujet lui-même, inconscient, ce qui veut dire plus exactement qu’il y a des idées qui se forment sans aucune nécessité de conscience. « Ce qu’il faut dire, c’est : je ne suis pas, là où je suis le jouet de ma pensée ; je pense à ce que je suis, là où je ne pense pas penser ».

Le Ciel de la Psychanalyse est doublement déglingué. Déjà Descartes se moquait de la régularité du ciel – tant vantée par d’autres, alors qu’il ne le trouvait vraiment pas si régulier que cela. Le ciel de l’Inconscient, quant à lui,  est vraiment ruiné. C’est sans doute pourquoi Freud préférait lire l’ordre de l’inconscient dans les ruines des villes comme Rome et Pompéi. Dans ce trou, ce déchirement, c’est là que vient se loger l’objet (a), dans ce ciel bizarre, au zénith comme l’avait souligné Jacques-Alain Miller dans le dire de Lacan. Un « élément intensif qui périme toute idée de mesure ».

Alors, cet ordre troué, muni de son objet intensivement dérangeant, mérite-t-il encore le nom d’ordre symbolique ?

Ne pourrait-on pas se contenter d’un rapport intensif avec un réel sans loi ? Non ! Le réel ne s’affronte pas en face, pas plus que la mort pour Freud. Pour aborder le réel, il faut en passer par le littoral des impossibles. C’est comme pour le sinthôme, il s’aborde par les semblants. L’ordre symbolique bizarre que nous connaissons et qu’éclaire la raison après Freud, a de beaux jours devant lui. C’est un ordre dispersé avec ses paradoxes surmoïques qui font que les gardiens de l’ordre sont souvent les premiers pêcheurs. On apprend aujourd’hui sur Slate que « des employés et contractuels de la Security and Exchange Commision (SEC), l’organisme fédéral américain de règlementation et de contrôle des marchés financiers, visitaient des sites pornographiques sur les ordinateurs de la SEC, selon une enquête de l’organisme obtenue par CNN [Ce n’était pas n’importe qui] plus de la moitié de ces employés étaient payés entre 99.000 et 223.000 dollars par an (soit entre 75.000 et 168.000 euros). « Il est pour le moins inquiétant que des haut fonctionnaires de la SEC passaient plus de temps à regarder du porno qu’à essayer d’empêcher les évènements qui ont amené notre économie au bord de l’effondrement», a déclaré le député républicain Darrell Issa, qui fait partie de la commission de la Chambre des représentants sur la réforme de la fonction publique. Les républicains, qui sont opposés à une trop grande régulation des marchés financiers, n’ont d’ailleurs pas tardé à utiliser l’affaire pour discréditer la SEC. » Tout est bon pour essayer d’éviter la réglementation des pratiques de voyou des fonds d’investissements, comme celui de John Paulson. Les coquins dénoncent les gendarmes comme voyous. C’est la dernière nouvelle bizarre dont fait état le Journal du Congrès. C’est maintenant du Congrès lui-même que viendront les surprises, dès lundi. Nous en aurons même des images. Il y aura un canal YouTube sur le blog de l’AMP. Stay Tuned !

A lundi, au Palais des Congrès,

Eric Laurent, le 23 avril 2010

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Échos d’ici et d’ailleurs au parfum du Congrès

Nimbé de fumé
Par Christiane Alberti (ECF)
C’est au coeur d’une Buenos Aires nimbée de fumée, que nous étions conviés,  il y a deux ans, à  examiner les objets a dans l’expérience analytique.
C’est un nuage de cendres qui aujourd’hui  fait l’actualité et comment ! au moment où s’ouvre le Congrés de l’AMP à Paris.
La fumée est toujours par essence le signe du fumeur (Lacan dans Encore), signe moins de quelque chose que d’un sujet, signe susceptible de provoquer le désir !

Nube cenicienta
Por Juan Fernando Perez (NEL)
Un grupo de miembros, asociados y amigos de la NEL (al rededor de 50, quizás algunos más), de varios países de Los Andes, el Caribe, América Central y USA, se preparan a llegar a París
a pesar de la nube cenicienta.  Nube inquietante, pero que nos ha aportado ya, además de la inquietud por no estar eventualmente con los colegas de la AMP en el Congreso,
la posibilidad de pensar desde otro ángulo nuestro tiempo.
Esperamos, entusiastas saludarles personalmente el lunes. À Bientôt.

Trous à volcan
Par Virginio Baio (SLP)

Une bouffée d’air de printemps m’a pris!… quand j’ai accepté des excuses de la part de quelques collègues, sans savoir pour autant de quelles excuses.
Ils avaient raison. L’heure n’est pas au “desertum fecerunt”, mais notre pays analytique est riche de trous, de trous à volcan.
Notre village de l’Europe analytique est traversé par un sprint enthousiaste des “nouveaux venus”.
C’est le rush vers Paris, vers la cause!  Ces trous à volcans qui poussent sont ces AE venus d’Europe à Pise pour nous lire Lacan;
ils partagent avec nous leur pratique. Ils sont ces “nouveaux venus à venir” qui esquissent des champs à analysant,…
C’est ces collègues qui viennent de partout, au travail des impasses du droit, de l’autisme, de l’École,…
Dans le désert des villes de toscane, la clinique de Lacan sobrement fait son chemin.
Petit enfant, j’étais collé aux portes du stade pour y entrer gratuitement et regarder les derniers minutes du match, pour applaudir le Maradona du village.
Là, pour les “nouveaux venus” les portes sont ouvertes dès le début. Pour un autre match.
En fait je jalouse de pouvoir devenir un “nouveau venu”,
qui joue dans la jeune équipe de barcelone de … Lacan – dera de l’Ecole. Ciao amici.

Caro diario
Por Damasia Amadeo de Freda (EOL)

Algunos hechos que sucedieron días antes de un esperado Congreso
Jueves 15. Un volcán en erupción no ensombrese al Buenos Aires psicoanalítico.
Viernes 16. Se cierra el espacio aéreo. Sobrevuela la incertidumbre.
Sabado 17. Una nube de cenizas opaca los ánimos.
Domigo 18. Las expectativas colapsan junto con los aeropuertos de Europa y las estaciones de tren.
Lunes 19. Un corredor de buenas noticias. Abre Charles de Gaulle!
Martes 20. El cielo se esclarece, la nube se disipa.
Miércoles 21. Nuestro Congreso no será Pompeya.
Lunes 26. Ernest, nuevamante “París será una fiesta”.

Un paquebot Monréal – Rotterdan…
Por  Anne Béraud (NLS)

L’agitation parisienne nous parvient : ça respire, ça palpite, et nous le sentons au-delà de l’océan. On trépigne d’impatience de se rendre à l’évènement.
Pour être au RV, le nécessaire avion nous a fait quelques frayeurs…
Les cendres crachées par le volcan ont contraint le ciel au silence. Nous avons cru être retenus en otage, coincés de ce côté-ci de l’Atlantique.
J’ai envisagé le paquebot Montréal-Rotterdam par exemple…
autre temps, autre rythme…, mais justement le rythme effréné dans lequel tourbillonnent nos vies actuelles rendaient la chose difficile.
Puis l’espoir a repris au fil des vols qui repartaient.
Mais les premiers, mardi, ramenaient en France les voyageurs restés coincés au Québec sans emporter d’autres passagers…
Demain, nous devrions arriver à monter dans l’avion pour rejoindre Paris et son congrès finement préparé, ciselé… et si désirable après l’avoir cru inaccessible… À bientôt

Ficciones
Por Oscar Ventura (ELP)
Es posible, me pregunto, leer una sola vez Tlön, Uqbar, Orbis Tertius ? Puede ser.
Tal vez, leer a Borges sea sólo la ficción de leer. Quizás también leer a Borges es como leer a Joyce. No se los puede dejar de leer, hay algo allí que no cesa de escribirse.  Y no se trata tan solo de un rasgo de nostalgia imaginaria, la evocación que puede producir el pensamiento entre las sombras de Palermo y las calles de Dublín. ¡¡¡No es sólo eso!!!, casi les grita Lacan a sus alumnos. Para el que escucha, es una interpretación… No es sólo el Borges sorprendido; sorprendido por Borges. En un parque, en Estados Unidos, o en la transparencia de “Borges y yo” cuando escribe: “Sería exagerado decir que nuestra relación es hostil; yo vivo, yo me dejo vivir, para que Borges pueda tramar su literatura y esa literatura me justifica…”  No es solo que Leopold Bloom y Stephen Dedalus puedan ser Borges hablando con él mismo. Sin duda no es poco, sin embargo hay más para el que quiera asomarse. La ceguera puede transmutarse en nitidez, como lo estrafalario puede destrozar la lengua, hasta hacerla estallar. Son las buenas formas, anticipadas, nobles, del estallido de los semblantes. Y probablemente una brújula privilegiada para orientarse en  D’un discours qui ne serait pas du semblant.

Borges recomendaba, en un relato breve, muy breve, los viajes en globo a los viajes en avión. Entre otras cosas, les parecían más seguros y menos claustrofóbicos, la lentitud del aterrizaje esclarece las ideas. Sin duda es una buena opción para desplazarse por una Europa en erupción volcánica, donde lo que en realidad tiembla y se hace ceniza es su semblante mismo. ¿Puede haber mejor clima para nuestro Congreso? Difícil. Cuando la construcción de un nuevo semblante para el discurso analítico se impone. Las mejores cosas, se hacen bajo la urgencia… Son una tormenta de ideas. Es nuestro volcán. No toda la atmósfera del País del Psicoanálisis está atravesada por los surcos de la aletósfera, por el empuje a una formalización imposible, en ella habita aún, sin duda, la sed del inmortal, ese que ya se sabe muerto.

Y ahí está París, hoy, mañana mismo, es el testimonio de que el futuro ya llegó. Y que todavía está por realizarse. Tal vez por ello me preguntaba si es posible leer una sola vez…  TLÖN no lo permite, maxime cuando el inglés, el francés y el mero español habrán desaparecido, y uno se sorprende ante esa indecisa “traducción quevediana” del “Urn Burial de Browne” que bajo ningún concepto Borges, ha querido dar a la imprenta. Quizás lo más interesante es esa cosa, que de París, no daremos jamás a la imprenta, porque escribirla, la volverá tan necesaria como inútil.

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Dossier de publications des Écoles de l’AMP

En décembre 2009, Jacques Alain Miller lance l’idée d’un dossier présentant les publications des Ecoles de l’AMP selon cette règle du jeu :
les Présidents des Ecoles  établissent la liste des publications papier et électroniques, chaque publication envoie son document de présentation
selon un mode d’emploi précisé.
Stupéfaction, la plupart des documents envoyés s’avèrent informatiquement intraitables.
Nous voilà avec ces multiples symptômes à prendre en compte dans leur singularité et à faire passer par le chat de l’aiguille des nécessités techniques.
Vous apprécierez le résultat quand un exemplaire vous en sera donné dans votre dossier au Palais des Congrès lundi matin.

Pour la Commission d’organisation du Congrès,
Anne-Charlotte Gauthier


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FÊTE DE CLÔTURE DU CONGRÈS AMP
Vendredi 30 avril 2010, au Cabaret sauvage

Le Cabaret Sauvage, avec son toit en forme de chapiteau, se situe dans le parc de la Villette  à côté du Périphérique

Programme

Accueil extérieur au son de l’accordéon

21 h : Ouverture des portes et accueil dans le hall où une coupe de champagne sera offerte.

21 h 30 : Ouverture de la salle de bal et installation du public.

21 h 45 : « Entre ciel et terre », numéro de voltige accompagné par une violoniste et une violoncelliste

22 h : 1er Set du Royal Majestic Orchestra (musique afro-cubaine et latino)

22 h 45 : Tango pour nos amis argentins

23 h : « Les filles volantes », numéro de voltige

23 h 15 : 2e Set de l’orchestre

Minuit : DJ Smoky

Pour la Commission d’organisation, Thierry Jacquemin
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Editorial n°13

Les semblants de l’hystérie et notre choix éthique



Quelle est donc la grande perturbation du sujet qui répond au trou dans l’Autre ? Que produit ce recouvrement de deux manques, qui peut se décrire comme un plein ou un « vrai trou ». Nous avons vu comment la dépression, comme maladie de l’idéal, s’est portée candidate. Elle a été retenue par Big Pharma comme la plus facile à appareiller à des molécules dont la diffusion de masse peut s’effectuer sans effets secondaires. Pour les névroses, leur recul est clair. On le constate à partir d’hypothèses très différentes : le déclin de l’image du père, l’assouplissement du surmoi maternel, le recul des interdits, le changement de statut de la culpabilité. Il faut remarquer que ces caractéristiques s’appliquent davantage à la névrose obsessionnelle qu’à l’hystérie.

Du côté de la psychose, on se souvient que Deleuze et Guattari avaient essayé de faire de l’axe schizophrénie-paranoïa le cadre de la maladie moderne. Certes, ils parlaient de la schizophrénie comme processus, et pour eux la paranoïa était cristallisation, arrêt du processus. Ils avançaient que la schizophrénie, comme processus, avec sa terrible ironie, « c’est notre maladie à nous hommes modernes. La fin de l’histoire n’a pas d’autre sens ». Leur tentative s’inscrivait à la suite de l’enseignement de Lacan qui avait fait de la paranoïa la maladie la plus profonde de l’être humain, « l’état natif » du sujet. Lacan rejoignait Mélanie Klein qui avait fait de la « position schizo-paranoïde » la première cristallisation du Moi. L’hypothèse paranoïaque prend toute sa valeur dans l’interprétation qu’en donne le cours de Jacques-Alain Miller de cette année. Comme la science partage avec la paranoïa un point de forclusion, le scientisme est une variante de la grande paranoïa contemporaine. La description de l’Autre comme un grand équilibre paranoïaque a été rénovée par la réduction cognitive du lien social à la théorie des jeux. Les modèles mathématiques mis en circulation par le complexe militaro-industriel à l’époque de la Guerre Froide se sont transmis comme méthode de gestion à l’administration civile. Quels que soient les affrontements et les déchirements des démocraties, on pouvait concevoir une politique conduisant à l’équilibre. Même si chacun ne coopérait avec personne, si chacun était seul contre tous, un « équilibre de Nash » pouvait être atteint. Cette conception du lien social a conquis la technostructure. Elle témoigne de la grande force de séduction de la paranoïa.

C’est pourquoi le rappel du dernier numéro de la revue Quarto a tout son sens. Elle affirme la « tentation de l’hystérie » comme il y avait la « tentation de l’Occident ». La revue formule cette tentation sous la forme d’une question pour le 21ème siècle: « Comment les civilisations vont-elles supporter qu’il n’y ait pas La femme » ? L’hystérie pour le Lacan du Séminaire 18, c’est celle qui soutient le désir des femmes, à partir de ce qui n’est pas pour toute femme. « C’est pourquoi ce désir se soutient d’être insatisfait ». L’hystérique, dit en raccourci Jacques-Alain Miller, cité par Quarto, c’est « tout le monde ». C’est « être comme tout le monde ». En ce sens, c’est l’hystérie qui se révèle comme la grande névrose de l’époque. Certes, il faut la prendre dans toute sa complexité, celle que, dans les termes de son enseignement classique, Lacan distingue du « mécanisme hystérique », qui révèle la structure commune du désir. « On fait de l’hystérie la névrose la plus avancée, parce que la plus proche de l’achèvement génital. Il nous faut, selon cette conception diachronique, la mettre au terme de la maturation infantile, mais aussi à son départ, puisque la clinique nous montre qu’il nous faut bien, dans l’échelle névrotique, la considérer au contraire comme a plus primaire, car c’est sur elle que s’édifient les constructions de la névrose obsessionnelle. D’autre part, les relations de l’hystérie avec la psychose, avec la schizophrénie, sont évidentes, et ont été soulignées. »

L’hystérie comme discours reprend cette distinction entre l’hystérie mécanisme et l’hystérie  névrose. Elle inclut la multiplicité de ces perspectives et de ces points de vue. Elle interroge aussi les frontières et les recouvrements de domaine moins avec la schizophrénie qui a perdu son pouvoir descriptif qu’avec la « psychose ordinaire », au sens où nous utilisons ce terme. Il faudrait ajouter enfin pour le sujet contemporain, les efforts pour fixer sa représentation dans les nouvelles maladies de la mentalité, les symptômes pulsionnels addictifs, et l’épidémie d’autisme, réalisant le dénouage entre le pur corps machine et le signifiant-chiffre, sans rapport avec l’autre imaginaire. Par cette pluralité même, il nous faut sans doute renoncer à la définition d’une seule « grande névrose narcissique ».

Lacan, considérait que le recouvrement de la structure du sujet et celle  des impasses dans l’Autre ne nous laisse qu’un choix éthique. Il nous faut choisir « entre la folie et la débilité ». Si l’on admet le développement précédent, cela définit parfaitement l’état de notre civilisation. Quel est le meilleur choix du point de vue du sinthôme ? Nous le verrons bientôt, le Congrès commence lundi. Chacun y présentera son choix.

Demain, ce sera le dernier numéro du Journal du Congrès.

A demain,
Eric Laurent, le 22 avril 2010, 18 heures 30

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Un mot pour les 1486 inscrits

La commission d’organisation vous invite au voyage,
vous prendrez votre valise à l’accueil, une clé (USB) ainsi qu’une enveloppe (grande) à votre nom
et vous partirez pour cette aventure étrange qui durera cinq jours en pays inconnu, reconnu, méconnu
toujours surpris, jamais étonné.

Pour l’enregistrement, venez à 8h lundi 26 avril au 2è étage du Palais des Congrès
et nous ne nous quitterons plus jusqu’au 30 avril tard dans la nuit du cabaret sauvage.

Cette invitation au voyage ne s’est pas faite sans difficultés,
deux graphistes,
un routeur,
une équipe soudée et joyeuse,
des traiteurs,
et un raton laveur
furent nécessaires et tant d’autres ingrédients…
Mais je retourne en cuisine, la sauce est sur le feu et quand vous arriverez, il faut que tout soit prêt.


Pour la Commission d’organisation, Anne Ganivet-Poumellec

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Editorial n°12

Les deux côtés de l’Atlantique


Même la Norvège et l’Allemagne ouvrent leur espace aérien. C’est dire. Les congressistes rejoignent Paris. Nous en avons de multiples témoignages. C’est souvent dans l’inconfort, pour les premiers en mélangeant route, train et avion, puis pour les autres en suivant avec retard des voies aériennes plus directes. L’épisode se referme. Les deux rives de l’Atlantique se rejoignent. Les symptômes demeurent. Mais lesquels ?

Au moins deux conceptions s’opposent pour apprécier les rapports du sujet et des impasses de la civilisation, son désordre symbolique fondamental. L’une est qu’à mesure que le lien social s’affaiblit, l’individu est accablé par des responsabilités et des épreuves inédites qui l’épuisent. Sous la rubrique de pathologies du lien social, on met les addictions, les troubles du comportement, le stress et la souffrance au travail, mais aussi celle des femmes et des exclus. La dépression, l’anxiété, le traumatisme ou la fatigue psychique se présentent comme l’envers même de toute description du lien social, nouvelles Erynnies, elles l’accompagnent comme une ombre.

On peut aussi considérer que ce n’est qu’un question de langage et non d’envers. Le langage de la souffrance psychique, l’idée que la société peut faire souffrir serait une idée à prendre avec des pincettes. Nous nous trouverions devant un phénomène comme ces plaintes sur l’insécurité. Il faudrait séparer l’insécurité du sentiment d’insécurité, et de doctes experts viendraient se succéder pour nous enseigner qu’il n’y a aucune raison de ne pas se sentir en sécurité dans le giron de l’Autre contemporain.

D’où vient le désordre ressenti? Vient-il de l’impossible des idéaux ou d’une manifestation de l’individualisme qui se retrouve contre lui-même ? En lieu et place des interdits, les troubles contemporains seraient avant tout ceux des « séductions morbides des idéaux » qui le contraignent à devenir lui-même. Un sociologue veut résoudre la question par une expérience mentale. En opposant deux « sociétés » ou civilisations, l’Amérique et l’Europe, ancrées dans des discours constitutifs et des mythologies opposées. L’opposition se lit de façon récurrente dans tous les grands débats sur l’invention du lien social contemporain, mais plus récemment sur la réinvention du système de santé américain. Pour les Européens, ce serait le délitement du lien, de la solidarité, des idéaux, qui fait porter sur l’individu le poids de l’assertion personnelle. Pour les Américains, le seul idéal dont la civilisation aurait besoin est le self et son double, le self-governement, couple solidaire de l’autonomie et de la communauté qui se gouverne elle-même. En un sens, le sujet « américain », tout entier anticipant sur le futur serait celui qui serait vraiment délivré des idéaux pour produire une identification commune, propre à la culture populaire, le mainstream commun à tous. L’encombrement des idéaux en Europe aurait deux conséquences : la nostalgie du temps où ils existaient, la production d’une posture « anti-moderne » d’une part, et d’autre part la souffrance que leur impuissance entraîne. La réduction des idéaux au trognon du self aurait l’avantage de produire un sujet vraiment en phase avec la modernité, au-delà de toute nostalgie. L’Amérique, avenir de l’Europe et avenir de tous.

L’état de la politique américaine est là pour nous rappeler que l’impossible se rencontre des deux côtés de l’Atlantique. L’occident est solidaire au-delà de ses mythes. La vie politique US est suffisamment bloquée à tous les niveaux, depuis la chambre des représentants jusqu’au Sénat, en passant la rue, pour que l’on ait le sentiment que quelque chose du self ne se gouverne plus. L’accablement sous les menaces de mort du Président, du chef de la majorité, Nancy Pelosi, et de multiples représentants est inquiétant. Bill Clinton, dans sa position réinventée de Président d’ONG, sage médiateur, appelle à se méfier de la haine. Les partisans des Tea-Party manifestent rageusement pendant ce temps. Quelque chose paraît bloqué dans l’optimisme américain du changement.

Est-ce durable, est-ce un coup de feu passager, une éruption qui s’éloignera comme le nuage semble le faire ? Nous l’espérons pour le bien des démocraties, mais qui sait ? La pulsion de mort a des malices que l’ordre symbolique met parfois beaucoup de temps à réduire. Au-delà des sociomanes qui veulent tout réduire à des formes de langages collectif, la perspective d’inspiration psychanalytique qui met en avant le poids des idéaux du sujet est trop courte. Dans cet usage, le terme d’idéal est trop ambigu. Il faut encore distinguer le plan imaginaire du moi-idéal et le plan symbolique où se détermine l’impasse. Lacan aussi, dans les années cinquante, parlait de la « grande névrose narcissique » de l’époque. Il a ensuite élaboré les différentes dimensions Réel, Symbolique, Imaginaire et leurs délicats nouage. La séduction des idéaux imaginaires est à la mesure de l’impossibilité ou de l’impuissance de traiter le réel par ses idéaux. Les dispositifs symboliques ne cessent pas moins d’exister et leurs réinventions sont possibles. Comment ? Par les petits coups de pouce ou bourrades (Nudge) prônés par le comportementalisme économique ? Que ce soit pour la régulation du ciel unique Européen ou la régulation des banques après la révélation des manœuvres incroyables de Goldman-Sachs, la « Firme », il semble plutôt que cela procède par rencontre d’un impossible. C’est la « stratégie du choc », non pas celle d’un complot, mais celle du choc du réel.  Par là il y a chance de produire un ordre symbolique renouvelé. Une assertion de certitude anticipée (Yes we can !) qui ne soit pas un rêve aux réveils difficiles.
A demain,
Eric Laurent, le 21 avril 2010. 18 heures.

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Le Concert du mercredi 28 avril

18h30 à 20h00

Salle Bleu
Retransmission salles 241 – 242A – 242B – 243
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Journal du Congrès n°11

Par Eric Laurent

Qu’appelle-t-on normal dans l’aléthosphère ?


Retour progressif à la normale. C’est la couleur du jour. Voyons d’abord la cartographie du ciel. Eurocontrol annonce que 14000 vols pourront avoir lieu aujourd’hui soit environ la moitié des vols habituels en Europe pour un mardi. Air France annonce sur son site, en date de mardi matin huit heures, que les vols longs courriers sont assurés normalement au départ de Paris-Charles de Gaulle et Orly. Les avions pour le sud de la France partent d’Orly. Pour l’Europe, cela dépend. La situation des autres aéroports européens s’améliore, surtout au sud, avec quelques confusions au nord. A 14 heures, un A380 s’est posé en provenance de New York avec 541 passagers. Le directeur du Congrès, Luis Solano, qui surveille attentivement la situation de Madrid-Barajas et Paris-Charles de Gaulle annonce à 15 heures que trois vols en provenance de Buenos Aires arrivent cet après-midi. Un vol arrive ce soir à Roissy en provenance de Buenos Aires et deux en provenance du Brésil : Rio et Sao Paulo. Il surveille aussi Ezeiza-Buenos Aires. Il confirme à 18 heures que le seul vol vers l’Europe annulé aujourd’hui au départ de Buenos Aires est celui de la British Airways. Les deux vols d’Iberia, un d’Aerolineas Argentinas vers Madrid, le vol d’Air-Europa vers Madrid, le vol d’Air France vers Paris, partent ou vont bientôt partir. Alitalia et Lufthansa aussi, vers Rome et Francfort.

Bo Redeborn, directeur du réseau à Eurocontrol, est optimiste. Selon lui, il pourrait ne plus y avoir de problème après jeudi. De même Olivier Jankovec, directeur général de ACI Europe, regroupant 400 aéroports dans 46 pays, affirme que « l’on va enfin sortir de ce cauchemar ». Les représentants du lobby aérien poussent à plus d’ouverture. Prudent, le ministre français Jean-Louis Borloo a eu besoin mardi matin de se défendre : le gouvernement n’a pas cédé aux pressions des compagnies aériennes en ouvrant des corridors de vol.

Les cinq jours d’indécision qui précèdent laissent un goût amer. L’IATA a des mots très durs envers la bureaucratie européenne : « aucun calcul de risque, pas de consultation avec les professionnels, pas de leadership ». L’administration s’est appuyée uniquement sur des modèles mathématiques en reculant le moment de faire des mesures sur la concentration effective des particules de silice dans l’air. On s’aperçoit que ces administrations manquent d’avions à hélices équipés pour la mesure, n’ont pas envisagé de faire appel à des drones, etc. La méthode retenue pour estimer les risques est rustique. On fait voler des avions sans passagers et on démonte complètement les moteurs de l’avion test toutes les quatre ou six heures.

L’enjeu de ces renvois de responsabilités a une double finalité. D’une part, les compagnies aériennes ont bien l’intention d’obtenir des compensations de la part des états pour compenser leur manque à gagner. D’autre part, l’IATA et Eurocontrol voient dans cette catastrophe l’occasion de conclure les vingt années de discussion sur la nécessité de faire exister un système unifié européen autonome, le Single European Sky qui attend son heure. L’IATA va tenter la gestion par la crise, la « stratégie du choc », comme dirait Naomi Klein.

Du côté du volcan, la situation est meilleure. C’est confirmé par l’empirique police islandaise qui s’est rendue au plus près du volcan : « Le panache qui s’élève au dessus du volcan est plus petit et plus clair, ce qui signifie qu’il y a moins de cendres. » La science va dans le même sens. Sigrun Hreinsdottir, géophysicienne de l’université d’Islande, nouvelle venue à suivre, constate toujours une contraction du volcan. Elle est surprise des déclarations des autorités britanniques selon lesquelles l’éruption s’intensifiait et qu’un nouveau nuage de cendres se dirigeait vers le Royaume-Uni. On le sent, une nouvelle querelle se prépare entre les autorités islandaises et les services nationaux du trafic aérien (NATS) britanniques. Cette querelle risque aussi d’être douloureuse étant donné le contexte et la persistance du débat sur les responsabilités de la dette islandaise de 5 milliards de dollars essentiellement envers des investisseurs anglais et hollandais. Les conflits d’interprétation seront allégés par le fait que la cartographie se modifie toutes les six heures et que « les conditions sur lesquelles on travaille changent rapidement et de façon dynamique ». Si quelqu’un a fait une erreur de lecture, elle est vite effacée.

Enfin, last but not least, les vents sont avec nous. L’organisation météorologique mondiale confirme aujourd’hui de Genève que le changement de régime des vents en fin de semaine va repousser les nuages. La situation anticyclonique actuelle qui assure un si beau temps sur l’Europe, de Madrid à Londres, en passant par Paris n’aide pas beaucoup à dissiper le nuage. Dès vendredi, la situation va changer quand « une forte basse pression » va se développer au dessus de l’Islande, avec pluie pour lessiver les cendres. Levez-vous, ô orages désirés !

Nous avons tenu le congrès de 2008 à Buenos Aires en avril, trois mois avant le déclenchement de la pire dépression depuis 1929. Nous tenons le congrès 2010 une semaine après le déclenchement de la crise aérienne la pire en temps de paix. Nous allons de records en records, hors normes. La rencontre internationale en juillet 2009 était prévue au milieu d’une épidémie de grippe majeure où Buenos Aires, après Mexico, a été le laboratoire qui a permis de mesurer l’impact exact du virus H1N1 sur de larges populations ayant accès à un système de santé. Nous avons pu reprogrammer en novembre une « semaine lacanienne » à Buenos Aires qui a condensé trois événements en un seul, inédit et incroyable. L’après-coup de l’épidémie mondiale permet maintenant de mettre en cause profondément les procédures de détermination des normes de l’OMS. Nous n’allons pas cesser d’apprendre comment les normes du « normal » qui régit l’aléthosphère ne cessent de s’élaborer de façon conflictuelle.

A demain,

Eric Laurent, 18 :30

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Fête de Clôture


30 avril 2010 à partir de 20h30


Cabaret Sauvage

Bal

Visitez le site du Cabaret Sauvage
http://www.cabaretsauvage.com/presentation.php

Pour venir au Cabaret Sauvage
Parc de la Villette
Accès piéton par le 59, bd Mac Donald

Métro : Porte de la Villette (Ligne 7)

Navettes spéciales à partir de 20h00 depuis la Place du Chatelet

Bus : Arrêt Porte de la Villette
PC2 Porte d’Italie / Porte de la Villette
PC3 Porte Maillot / Porte des Lilas
75 Pont Neuf
139 Saint-Ouen Place d’Armes
150 Pierrefitte / Stains
152 Le Blanc-Mesnil
249 Dugny Centre Ville
609 C Stalingrad / Aulnay sous Bois
Bus de nuit : Garges Sarcelles / Aubervilliers Pantin Quatre Chemins

Parking Villette Nord / Cité des Sciences
entrée au 61 bd Mac Donald

Il y aura un service de bus spécial du Congrès qui partira de la place du Chatelet au Cabaret Sauvage,
toutes les demi heures dès 20h00 et retour vers Chatelet à partir de 23h00 et jusqu’à 1h00 du matin.
Une borne taxi spécial a été prévue.

Commission d’Organisation
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Editorial n°10

Par Eric Laurent

Principe de précaution et cellule de crise

Au 21ème siècle, la définition du bien commun n’est pas simple. Les autorités européennes qui ont fermé l’espace aérien européen ont plongé dans des limbes imprévues, près de sept millions de passagers dans le monde, répartis dans 313 aéroports. Les autorités persistent à répéter qu’elles ont fait leur devoir au nom du principe de précaution. Il semble cependant que le Président Medvedev a réussi à se glisser entre les nuages pour rejoindre Cracovie. Mme Merkel, elle, est rentrée des Etats-Unis en passant par Lisbonne, puis Rome en avion, puis une voiture jusqu’à Bozen, Tyrol du Sud. Puis, le lendemain, un bus lui fit parcourir les 850 kilomètres restant jusqu’à Berlin. Parmi ces 7 millions de passagers, donc, toutes sortes de situations. Pour rapatrier les 150 000 anglais qui sont sur le continent, l’Angleterre, en campagne électorale, ne lésine pas sur les moyens : 80 000 places supplémentaires en Eurostar et la Royal Navy. Le HMS Albion, navire de débarquement, est en route vers l’Espagne. Pour les 150 000 français aussi en rade, c’est la mobilisation. Les Français de New York sont sollicités pour loger les 5 000 compatriotes en souffrance. On prévoit le renforcement sur le continent de liaisons par train et cars ainsi que l’hébergement pour les voyageurs démunis. Les aéroports du Sud de la France sont prêts à travailler en surcapacité. Par ailleurs « toutes les dérogations possibles et imaginables » vont être accordées à la circulation des cars. Donc, d’un côté le principe de précaution, de l’autre la dérogation. La tension dialectique devient intéressante.

Du côté des compagnies aériennes, on trouve que les autorités ont surréagi au nom du principe de précaution. « Nous sommes assez avancés dans cette crise pour exprimer notre insatisfaction sur la façon dont les gouvernements ont géré la crise » a déclaré le directeur de l’IATA, Giovanni Bisignani. Il a aussi parlé de « pagaille européenne » et « d’embarras pour l’Europe ». Le directeur de la Lufthansa, dont les actions ont perdu 5% en Bourse, a critiqué les autorités lundi matin, pour ne pas avoir procédé à un calcul de concentration des cendres dans l’atmosphère « apparemment, jusqu’à 8 000 mètres, il n’y a pas de cendres volcaniques ».

Les contrôleurs aériens sont, bien entendu, pour. On ne prend jamais assez de précautions. Mais les compagnies privées procèdent à des essais pour essayer de forcer le nuage d’une façon ou d’une autre. Un Airbus-380 d’essai va monter jusqu’à 12 000 mètres pour voir ce qu’il en est. A 14 heures, Air France déclare qu’aucune anomalie n’a été révélée à l’issue des cinq vols d’évaluation effectués dimanche. A 15 heures 30, c’est au tour du directeur général de la Compagnie aérienne British Airways de déclarer que la fermeture de l’espace aérien britannique est inutile. A 16 heures 15, la Lufthansa annonce qu’elle va pouvoir rapatrier 15 000 passagers, profitant d’une autorisation obtenue pour 50 avions longs-courriers. Même l’OTAN a affirmé que le nuage n’affectait pas ses opérations, bien qu’une responsable américain a fait état d’un problème sur un moteur de chasseur F-16. Les responsables sont-ils vraiment responsables ?

Que peut-on attendre ? Les avis divergent. La fonte de la totalité du glacier va-t-elle stopper l’activité explosive et donc la projection de cendres, ou la teneur en silice plus grande des cendres indique-t-elle un potentiel explosif plus élevé ? Prenant à contre-pied les prophètes du pire, en début d’après-midi de ce lundi, une géophysicienne islandaise annonce que « le volume de cendres rejeté a beaucoup baissé et la colonne ne dépasse plus les 3000 mètres, soit moins de la moitié de ce qu’elle était au plus fort de l’éruption ». Peut-on lui faire confiance ? Le vulcanologue qui a passé sa vie à étudier le volcan Eyjafjöll situé sous le glacier Eyjafjallajokull était, ironie de l’histoire, en Congrès à Paris lorsque l’éruption a commencé. Il est bloqué ici. L’éruption elle-même peut durer plusieurs semaines, mais l’important ce sont les cendres. On attend des vents du sud-ouest en fin de semaine pour rejeter les nuages vers le nord et laisser passer les avions. Va-t-on vers une Europe durablement soumise aux girouettes ?

Ne faudra-t-il pas prendre des risques, calculés bien sûr, et ne pas se soumettre entièrement aux interdictions protectrices ? L’Europe va-t-elle confirmer son espace de discours comme celui d’une « norme sans force » ou d’un « risk adverse power » ?

Nous saurons tout cela à mesure que la situation va évoluer. La cellule de crise mise en place par l’AMP est attentive aux détails. Nous sommes prêts à envisager toutes sortes de développements et à rester en contact par vidéo conférence ou streaming avec toute l’AMP. Quoi qu’il en soit, les aléas du déroulement des événements nous renseigneront sur la structure de l’ordre symbolique dans le 21ème siècle que nous anticipons.

A demain,  le 19 avril 2010, 17 :15

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Editorial n° 9

Par Éric Laurent


Les failles de la terre et du ciel : conséquences pour la cure.

Nous connaissons donc depuis hier le thème du Congrès 2012 : « L’ordre symbolique au XXIème siècle », complété par un sous-titre décisif , « Il n’est plus ce qu’il était. Quelles conséquences pour la cure ? ». Pour le titre, nous le connaissons le jour même où deux ruptures dans l’aléthosphère font voir la fragilité de l’ordre du siècle. La première rupture est due à un volcan Islandais qui porte un nom très difficile à déchiffrer et à prononcer pour les ignorants des langues nordiques. Ce n’est pas du gallois mais c’est tout de même dur. Le volcan est en irruption pour la première fois depuis 1823 et toute l’Europe est bouleversée dans son trafic aérien. Les messages échangés habituellement en mauvais américain entre tour de contrôle et pilotes sont réduits au silence. Autre rupture, celle-là due aux mesures d’austérité. Le Président Obama a décidé la fin d’un programme spatial. Fin officielle du programme Constellation vaguement compensée par les espoirs d’aller polluer la planète Mars, peut-être aux calendes grecques, dans un partenariat public-privé bien sûr. D’ici là les sondes parleront entre elles. Il reste la voix d’Obama pour essayer d’extraire l’Amérique de la dépression. Nous sommes sensibles à tout moment aux disruptions de l’ordre symbolique qui nous entoure, surtout si nous nous rappelons qu’il n’y a pas eu de telle altération de l’espace aérien, de tel vidage du ciel, depuis le 11 septembre 2001. Dans ces failles, voilà l’avion révélé comme déchet.

Les huit éditoriaux précédents présentaient l’articulation du nouveau désordre symbolique avec des manifestations cliniques inédites. Une dimension sinthômatique se manifeste qui ne rentre pas facilement dans les petites cases des discours établis et ne se prête pas plus au remède proposé pour remédier à l’insuffisance des discours : le chiffrage. L’ordre du discours est marqué d’une faille, c’est ce qui, selon la psychanalyse, ne cesse de s’écrire. C’est pourquoi, comme l’a montré Jacques Alain Miller dans sa « fantaisie » lors du congrès de l’AMP à Comandatuba en 2004, la civilisation qui est la nôtre consonne avec le discours analytique. Faille dans l’ordre naturel de la nature ou faille dans les impasses de la civilisation, le discours psychanalytique aborde l’ordre symbolique par son défaut que même la poésie ne peut rémunérer. La psychanalyse est comme le Taoïsme face à l’ordre pédagogique du Confucianisme : elle fait le pari du sans modèle, du vide. « L’Homme prend pour modèle la terre, la terre prend pour modèle le ciel, le ciel prend pour modèle le tao, le tao prend pour modèle ce qui est tel par soi même », comme l’on traduit ce dit attribué à Lao Tseu dans le Tao-Te-king. Comme le dit François Cheng, le Tao « se dévoile tout aussi bien, sinon davantage, dans ce qui se devine, dans ce qui affleure au creux des interstices ». La visite proposée durant notre Congrès, de l’exposition qui vient d’ouvrir au Grand Palais sur « La voie du Tao, un autre chemin de l’être », nous le rappellera. C’est en Chine justement que la loi des hommes est en train de réaliser une atteinte très remarquable à la paix des semblants qui régissent le monde. Il ne s’agit pas d’une atteinte de plus aux droits de l’homme dont le régime est coutumier. Il s’agit de la mise au jour chaque fois plus patente de l’atteinte à la loi biologique du sex-ratio qui semble garantir l’ordre de la jouissance et faire en sorte qu’il y ait « à chacun sa chacune et à Lacan sa lacune » comme le disait le proverbe normalien des années soixante. La Chine est « le pays le plus masculin du monde » et 24 millions d’hommes en âge de se marier pourraient ne pas trouver d’épouse. La combinaison du patriarcat traditionnel et de la politique de l’enfant unique que les autorités imposent aux populations, a fabriqué une impasse terrible.

Devant la faute des semblants qui se radicalise, un double désir se fait jour, selon la loi d’airain du Surmoi. D’un côté un appel sécuritaire envahissant et la mise en place d’une société de surveillance avec son panoptique fou. De l’autre la fascination pour se vivre comme une machine enfin délivrée des semblants. Une logique implacable va de « l’acéphale » de Bataille à l’homme neuronal de Changeux. Ce sont des étapes, dans la mise au point à l’aide du discours de la science, de l’homme « libéré ». Dans ce fantasme masculin, quelle place pour une femme ? Bataille répond que le lien social n’est pas fondé sur le meurtre du père comme le croyait Freud mais sur le meurtre d’une femme. Il rêve d’une société secrète qui répéterait le geste. Lacan pense à l’opposé que c’est la femme qui est fatale et que le discours analytique permet qu’elle ne soit fatale qu’à l’universel féminin abstrait. Grâce à la psychanalyse, une femme est fatale à « La femme » qui n’existe pas.

Mais maintenant vient le difficile : « Quelles conséquences pour la cure ? ». Le rôle et la place du principe d’autorité dans la cure est atteint. On ne peut pas s’en tirer avec un supplément d’ordre ni avec des semblants pompeux. Nous sommes à l’époque où un Michel Onfray peut essayer de faire rire en appliquant à la psychanalyse le système délirant qu’il a mis au point dans sa lecture à ras de terre des philosophes les plus divers. Comment cette boussole affolée, particulière à l’époque, permet-elle néanmoins de conduire les cures ? La question se pose en partie double. C’est pourquoi, dans le Journal des Journées 78, Jacques-Alain Miller interrogeait : « Comment un psychanalyste qui ne saurait pas s’orienter dans la société où il vit et travaille, dans les débats qui agitent celle-ci, serait-il apte à prendre en charge les destinées de l’institution analytique ? Rien de plus actuel que la grande idée que Lacan se faisait du psychanalyste en 1953 (c’était avant d’avoir dû en rabattre, vu son expérience des psychanalystes effectifs), et l’injonction qu’il lui adresse (Ecrits, p.321) : « Qu’il connaisse bien la spire où son époque l’entraîne dans l’œuvre continuée de Babel, et qu’il sache sa fonction d’interprète dans la discorde des langages. » (…) Puisque la psychanalyse est au 21e siècle une question de société, un problème de civilisation, il y a un choix forcé (…) Cela veut dire : témoigner en acte de notre position, comme psychanalystes, non pas seulement dans « la cure », mais dans « la cité ». ». C’est à partir de son ancrage dans le nouvel ordre symbolique que l’analyste saura faire usage des signifiants maîtres pour pouvoir occuper la place d’un partenaire qui a chance de répondre. Il lui faut tenir compte des impasses de la civilisation, ce que Lacan appelle en 1953, la discorde des langages.

Dimanche dernier, lors du Forum je soulignais comment Lacan situait la place du psychanalyste au regard de « la politique de la névrose ». Alors que les autres discours, spécialement la religion, n’ont compté que sur le Nom du Père, la psychanalyse a ajouté le phallus. Or « s’il y a quelque chose qui caractérise le phallus [c’est] d’être assurément ce dont ne sort aucune parole ». Et au sein même de l’équivalence entre Phallus et Nom-du-Père lorsque l’hystérique contemporaine appelle le Père : « ce dont il s’agit c’est que quelqu’un parle ». Ainsi définie, cette fonction du père devient « produit du discours analytique ». Comment, dans la discorde de l’ordre symbolique contemporain, rester le partenaire qui a la chance de répondre dans la cure ? Voilà l’enjeu du brainstorming du jeudi. 20 personnes ont été sollicitées pour s’essayer à répondre selon leur point de vue singulier, durant cinq minutes chacune. Pas de neuroimaging, du brainstorming, c’est-à-dire un échange d’idées rythmé, après un exposé d’orientation.

A lundi.

Eric Laurent, 16 avril 2010.

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Liste des intervenants à la séance de Brainstorming
Jeudi 29 après midi

ALVARENGA Elisa (EBP)

ARENAS Alicia (NEL)

AROMI Ana (ELP)

BRODSKY Graciela (EOL)

BROUSSE Marie-Hélène (ECF)

CHAMORRO Jorge (EOL)

CUÑAT ARIAS, Carmen (ELP)

FREDA Francisco-Hugo (ECF)

GALIMBERTI Fabio (SLP)

GOLDENBERG Mario (EOL)

LAURENT Dominique (ECF)

LAZARUS-MATET Catherine (ECF)

LEGUIL François (ECF)

NAPARSTEK Fabian (EOL)

NEMIROVSKY Frida (EOL)

SELDES Ricardo (EOL)

SOLANO Esthela (ECF)

STEVENS Alexandre (NLS)

TARRAB Mauricio EOL)

ZACK Oscar (EOL)
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Editorial n° 8

Par Éric Laurent

L’ordre mortifère et l’ordre sinthômatique

Le Forum-Psy du 7 février avait comme titre « Evaluer tue ». Nous y avons développé une lecture polyphonique de la série des suicides à France Telecom, leurs significations et leurs énigmes. Aujourd’hui paraît un livre particulier « Pendant qu’ils comptent les morts », long entretien entre un ancien salarié, Marin Ledrun, et une psychiatre, Brigitte Font le Bret. Pour la première fois sont rendues publiques dans le détail les méthodes, la langue du harcèlement managérial, les conséquences subjectives de la surveillance de tous les instants subie par les salariés, avec le chiffrage de toute leur activité. La publication du livre vient après la décision du Parquet de Paris, jeudi 8 avril, d’ouvrir une information judiciaire pour « harcèlement moral et insuffisance du document d’évaluation des risques ». La base en est le rapport de l’inspection du travail remis en février, mettant en cause globalement « la politique de réorganisation et de management » menée depuis 2006.

Après de timides ouvertures critiques de la justice envers les méthodes des entreprises, c’est l’ouverture en fanfare d’un débat public qui n’est pas prêt de se refermer. C’est l’échec patent de la politique de noyage de poisson menée par le Centre d’analyse stratégique, héritier du commissariat au plan, ses rapports sur la difficulté scientifique de corréler stress et suicide d’une part, et de mesurer objectivement la perte d’estime de soi d’autre part. C’est aussi l’échec de la politique de la nouvelle direction. Elle est double. D’une part reconnaître implicitement les méfaits des méthodes promues depuis 2006 – on ne les condamne pas, on dit simplement qu’il n’y aura plus de mobilités forcées et que la hiérarchie ne sera plus sourde à la souffrance sociale des salariés. D’autre part, la direction annonce « vouloir remettre du collectif dans les rémunérations ». Elle reconnaît, implicitement là aussi, qu’elle était allée trop loin dans la persécution individualisée du chiffrage des performances de chacun.

« Remettre du collectif » dans les rémunérations consiste à élaborer un nouvel index chiffré censé mesurer la satisfaction des salariés dans leur travail. Il porte le nom d’index de « performance sociale de l’entreprise ». Il procèdera sans doute par questionnaires élaborés par le cabinet Technologia qui en est à un troisième rapport sur l’état de l’entreprise qui reste aussi mauvais. La stratégie de communication était claire : annoncer un nouvel index, plus tendre, et demander que l’on travaille dorénavant en silence en se faisant oublier des medias. C’est la recommandation faite par le Centre d’analyse stratégique. La meilleure façon d’arrêter une épidémie de suicides c’est de ne plus en parler dans les medias. Un exemple viennois d’une épidémie de suicides dans le métro vient à l’appui. Elle a été stoppée quand on a réussi à empêcher les medias d’en parler. C’est complètement méconnaître la spécificité des suicides qui visent l’entreprise. Par cet acte, les sujets s’adressent à l’Autre de la civilisation et témoignent au sens le plus fort du terme, que le monde du travail a été ravagé par la fétichisation du chiffre.

La stratégie de l’édredon par changement d’index n’a pas marché et ne marchera pas. Les bouches s’ouvrent. Le 12 avril, un responsable régional de « La Poste » convoquait une réunion ayant pour but « la chasse et l’extermination des vendeurs zéro ». La lettre a été rendue publique par un syndicat et la presse s’en est fait l’écho. Communiqué embarrassé de la Direction centrale de l’entreprise, mutation de l’auteur n’ont pas tardé.

Quelque chose de la langue managériale va sans doute changer pour éviter les pataquès à répétition. Quelque chose de cette langue était devenu fou, ivre de violence, rempli d’une démesure qui dit la vérité mortelle des soit disant mesures. Il y a de multiples formes de silence, par exemple le silence d’après le bien dire et le silence de la pulsion de mort. Le débat public qui ne cesse de s’amplifier permet de sortir du silence de mort. Souhaitons qu’il puisse, après un long temps pour comprendre, trouver une conclusion sur une plus haute forme du silence.

Aujourd’hui, nous levons le voile sur la matinée du jeudi 29 avril. C’est la seule séquence du Congrès explicitement consacrée à son thème : Semblants et Sinthôme. Elle est là encore distribuée en trois séries d’exposés et se conclut par l’intervention de Jacques Aubert. Il a fallu repenser plusieurs fois la composition de cette séquence puisque deux des exposants prévus depuis longtemps, Leonardo Gorostiza et Anne Lysy, ont été récemment nommés AE. La grande surprise vient maintenant. Les attentes qui entourent le Congrès pourront-elles se reporter sur le Congrès suivant ? Son titre, qui s’inscrit dans la série des ternaires dégagés par Jacques-Alain Miller lors du Congrès de Buenos-Aires en 2008, est une borne de départ. Il est large et solide et pourra affronter toutes les bourrasques.

C’est « l’ordre symbolique au XXIème siècle » avec son sous-titre « Il n’est plus ce qu’il était. Quelles conséquences pour la cure ? ». Vous le voyez, le brainstorming devra prendre en compte la tyrannie de la transparence. Comment sera-t-il organisé ? Vous le saurez demain.

A demain,
Eric Laurent, le 15 avril 2010

Correspondance

Vorrei sottolineare l’importanza dell’osservazione di Jesus Santiago sulle due differenti posizioni (topologiche) del sinthomo. Solo il riferimento al sembiante permette di articolarle diversamente. Nel sinthomo come esaustione dell’interpretazione, infatti, il simbolico ha svolto il suo compito di dialettizzare l’immaginario e si propone come “rinnovato” nell’inanellamento S+∑. Il sinthomo come la mia “dinguerie”, invece, è il quarto anello del nodo quando non fa corpo con il simbolico, che quindi è incapace di mettere a fuoco l’immagine ed è preso in un gioco di falsi sembianti (una sorta di alimentazione forzata). Mettere questa dinguerie sotto transfert è il compito dove l’analista si distingue dall’operatore della “salute mentale” e puo’ condurre il soggetto al gusto della parola. La mentalità infatti è a sua volta un falso sembiante, che non ha la forza di supplire al mito e alla caduta degli dei.
Carlo Vigano’

Réponse

Le Nom-du Père est un symptôme. Il fait quatrième rond de ficelle nécessaire à ce que le nœud tienne. Mettre à sa place le sinthôme conçu comme résidu de l’interprétation est fécond. J’aime aussi cette proposition de Vigano selon laquelle la mentalité est un mythe fragile, un faux-semblant.
EL

Programme du jeudi 29 avril

Brainstorming day

Matin : Semblants et sinthôme


9h30 – 10h30
Semblants phalliques
Présidents : Vicente Palomera, Monica Torres

Savoir dire le non
Marie-Hélène Blancard
Les semblants dans le contrôle, le réel de la formation du psychanalyste
Romulo Ferreira da Silva
Le semblant entre un homme et une femme
Silvia Tendlarz

10h30 – 11h30
Au-delà du semblant : le reste
Présidents : Ronald Portillo, Sandra Grostein

El falo y sus cifras
Miquel Bassols
Le phallus, résidu qui vérifie
Rose-Paule Vinciguerra
A alterida do falo no corpo feminino
Ana-Lydia Santiago

11h30 à 12h00
Pause café

12h – 13h
Le bord et ses conséquences
Présidents : Lucia d’Angelo, Philippe La Sagna

Bord de semblant
Pierre Malengreau
Psychanalyser au siècle du fétichisme généralisé
Pierre-Gilles Guegen
Au bon heur d’une dram
Jacques Aubert

Après-midi : Brainstorming

15h – 16h

Président de séance: Dominique Miller
Conférence d’Eric Laurent

16h – 18h
Brainstorming sur le thème du Prochain Congrès de l’AMP

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Editorial n° 7

Par Éric Laurent

Les particularités du sinthôme

C’est au Chili que le cardinal-évêque de Frascati, secrétaire d’Etat de la curie Romaine depuis 2006, camerlingue depuis 2007 a, lundi 12 avril, énoncé une proposition clinique aventurée. « De nombreux psychiatres et psychologues ont démontré qu’il n’existe pas de relation entre le célibat et la pédophilie mais beaucoup d’autres ont démontré qu’il existait un lien entre l’homosexualité et la pédophilie ». Aujourd’hui, le porte parole du Vatican a pris ses distances devant le tollé, en renvoyant à un débat de spécialistes. En revanche, le porte parole du Ministère des affaires étrangères français – où nous serons reçus le lundi 26 avril – s’est indigné et a souligné que « la France rappelle son engagement résolu contre les discriminations et les préjugés liés à l’orientation sexuelle et l’identité de genre ». Tarcisio Bertone s’appuie sur une clinique du choix d’objet, faisant fi de la distinction des âges et pratiquant l’amalgame. Roland Vinexer, président du mouvement pour l’intégration et la libération homosexuelle au Chili a immédiatement fait objection en rappelant que l’un des scandales majeurs de prêtre pédophile au Chili avait mis en cause un ecclésiastique mettant enceinte une adolescente. Il choisit donc une clinique centrée spécifiquement sur l’âge, quel que soit le sexe. On pourrait ajouter aussi l’étrange cas du Père Maciel, prêtre mexicain fondateur de la rigoureuse et fortunée congrégation de la « Légion du Christ ». Elle éduque actuellement l’élite mexicaine. Le 3 mars 2010, une mexicaine qui affirme avoir eu pendant trente ans une relation conjugale avec Marcial Maciel a témoigné avec ses trois fils, hors d’un prétoire, à la radio, sur les mœurs de ce sujet hors du commun. Deux ans après la mort de Maciel en janvier 2008, qui s’était retiré en « pénitence » sur décision du Vatican, deux de ses fils dénoncent les viols et autres abus dont ils auraient été victimes de la part de leur père, surtout quand ils voyageaient ensemble. Leur mère, Blanca Estela Lara a connu Maciel en 1976 quand elle avait 19 ans, déjà un enfant, et lui 56 ans. Elle ne se doutait pas de son identité car il a fourni des papiers sous deux noms différents pour reconnaître ses deux enfants. Il se disait cadre d’une grande compagnie pétrolière ou bien encore agent de la CIA. C’est un article de 1997 dans une revue avec photo qui lui a révélé l’identité de celui qu’elle appelait « son dieu ». Elle a rompu avec lui en 1999 après que son fils lui eût révélé les abus sexuels. Ce fils a semble-t-il cherché à obtenir une compensation financière de la Légion du Christ en échange de son silence. L’affaire est donc complexe et mobilisera sans nul doute et l’Eglise et la justice civile. Il n’est pas sûr que dans des cas pareils, l’on puisse atteindre une objectivité clinique rassurante où les sujets s’inscriraient dans des cases bien délimitées. L’obligation de déférer les ecclésiastiques coupables d’actes sexuellement délictueux devant les autorités civiles selon une procédure mise en ligne aux yeux de tous sur le site du Vatican ce lundi, témoigne du virage décisif des autorités de l’Eglise et de la façon dont elle est soumise à la tyrannie de la transparence. Cette orientation avait été amorcée par le Pape actuel mais maintenue discrète. Elle donnait lieu dans les faits à des procédures internes. C’est maintenant le moment de conclure. Pourra-t-on gagner dans ce passage à la justice des hommes en clarté clinique ? Ce n’est pas certain. Les difficultés de l’expertise dont témoignaient nos collègues lors de l’après-midi du Forum de dimanche – qu’avait précédé un numéro très intéressant de « Mental » – augurent mal des clarté que nous obtiendrons. La criminologie contemporaine, par les embarras qui lui sont propres, renvoie surtout à ce que nous ne voulons pas voir en nous de notre méchanceté d’humain.

Il n’y a pas que l’Eglise qui défère ses scandales sexuels aux tribunaux civils, mais aussi, selon une logique très freudienne, l’armée. Le procès, le 13 avril, d’un Général de l’Armée française en témoigne. Il est ancien chef de cabinet militaire de deux ministres de la Défense et avait dirigé le service d’information et de relations publiques des armées et l’Institut des hautes études de défense nationale. On l’avait beaucoup vu, à ces multiples titres, durant la guerre du Golfe. Il était retraité depuis 2002. Il comparaissait pour avoir téléchargé 3400 photos pornographiques mettant en scène des sévices sexuels sur les enfants des 6 à 12 ans, entre 2004 et 2008. Comment ce sujet couvert d’honneur, militant dans les zones d’engagement pour la protection des populations civiles, spécialement des femmes et des enfants, pouvait-il ressentir une excitation sexuelle devant de telles photos ? Il répond à la procureure et se l’explique à lui-même, alors que ces photos le « dégoûtent », par le fait qu’il souffrait d’une tumeur au cerveau dont il avait été opéré une première fois en 1981, puis, récemment, en 2006. Il se range de lui-même parmi les sujets dont les atteintes neurologiques frontales ont aboli « le sens logique, le sens critique ». Le chirurgien qui l’a opéré en 1981 a témoigné en ce sens. Il souhaite donc se compter parmi ces sujets que les travaux d’Antonio Darmasio ont mis en valeur. C’est sur la cartographie des atteintes qui provoquent des « libérations pulsionnelles », qu’il tente de localiser le moi, les fonctions de contrôle, voire le self, dans le cerveau. Dans le cas d’espèce, le sinthôme défie la libération simple et la cartographie cérébrale robuste. Les faits ont duré quatre ans, le sujet a été expertisé, et aucune « abolition du discernement » n’a été remarquée. Il a aussi fait preuve de prudence et de tact en dissimulant parfaitement cette compulsion à l’ensemble de sa famille et de ses proches. Décidément, dans sa particularité, le sinthôme, même dans sa dimension la plus primitive de « fait psychiatrique » défie l’assignation à résidence psycho-pathologique.

Lors du deuxième jour du Congrès, nous poursuivrons l’enquête sur les particularités du sinthôme à partir de l’horizon de la passe. Nous continuerons à entendre les témoignages des AE le matin, puis trois séries d’exposés l’après-midi. Une première série donne trois exemples par où l’horizon de la passe s’actualise dans la cure. Une deuxième série interroge l’articulation de la parole et de l’écrit dans l’expérience. Une dernière interroge la place de l’Ecole comme adresse de la cure.

Demain, nous saurons comment s’organise le jeudi 29. Nous connaîtrons enfin le thème du prochain Congrès de 2012.
 

A demain,
Eric Laurent, le 14 avril 2010

Programme du Mardi 27 avril

Aggiornamento della Passe (2)

Président : Eric Laurent

Matin

9h30h – 11h00

Témoignage des AE :

Patricia Bosquin (ECF)

Leonardo Gorostiza (EOL)

11h00 – 11h30 : Pause café

11h30 à 13h00

Anne Lysy (ECF)

Silvia Salman (EOL)

Après-midi

15h – 16h

Le pas vers la passe

Présidents : Luis Solano, Flory Kruger

Les temps démêlés Anaëlle Lebovits (ECF)

Passo dopo paso verso la mia passe. Raffaelle Calabria (SLP)

Un lapsus del analista Blanca Sanchez (EOL)

16h – 17h

La Parole et l’écrit dans la passe

Présidents : Luis Solano, Antonio di Ciaccia

El testimonio y los limites del « parlêtre » Samuel Basz (EOL)

Dictature de l’homogénéité ou droit à la jouissance autistique du Sinthome Tania Coelho (EBP)

Entre l’écrit et l’oral Nassia Linardou-Blanchet (NLS)

17h – 18h

L’objet de l’École

Présidents : Luis Solano, Jorge Forbes

Idiota Antoni Vicens (ELP)

L’École comme objet ? Catherine Lacaze-Paule (ECF)

Incidencias del analisis en la formacion del analista Diana Wolodarsky (EOL)

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Editorial n° 6

Par Éric Laurent

Recherches – Sinthôme

Deux bonnes nouvelles pour nous qui souffrons chroniquement de coups de blues ou de dépressions plus ou moins sévères. Les hallucinogènes sont de retour dans la panoplie des traitements possibles. Pour en témoigner, cette semaine à San Jose en Californie a lieu le plus important congrès sur la « science psychédélique » depuis quarante ans. Le retour de la psilocybine est très encadré. Il se fait dans une politique de rupture avec l’esprit 68. Pour éviter les dérapages d’alors, le retour du champignon se fait sous les deux sauvegardes de la science et de la religion. Du côté de la science, nous avons les essais rigoureux en double aveugle, l’absorption sous Petscan et des protocoles standard. Du côté religion, on met en avant que les mystiques traversent des expériences très comparables à celles qui sont obtenues sous hallucinogènes. La méditation, le yoga, permettent eux aussi de quitter son corps et de dépasser l’enfermement dans le moi pour atteindre une conscience « océanique », aurait dit Freud. Science et spiritualité viennent ainsi se rejoindre dans des noces toujours bien vues aux USA. Elles se retrouvent bénies par l’imagerie cérébrale qui nos prouve que le cerveau est câblé pour ces expériences d’union avec le monde. Il doit bien y avoir un avantage évolutif quelque part, bien que le promoteur de cette perspective souligne avec raison que « d’un autre côté, l’amour universel n’est pas toujours adapté ». Quoi qu’il en soit, un psychothérapeute à la retraite, atteint d’un méchant cancer et déprimé par les traitements douloureux auxquels il est astreint y a trouvé un réconfort plus sûr que les habituels antidépresseurs. Il a trouvé une formule frappante pour cette expérience : « D’un coup, tout ce qui était familier a commencé à s’évaporer. Imaginez que vous tombez d’un bateau dans l’océan, vous vous retournez, le bateau a disparu. Et puis l’eau disparaît. Et puis vous disparaissez vous-même. » C’est vraiment le sentiment océanique. Comme la psilocybine est une substance naturelle, il n’est pas sûr que l’on poursuive très loin les essais thérapeutiques. Big Pharma n’est pas très intéressé, seules les universités le sont.

L’autre bonne nouvelle est plus terre à terre. Elle est connue par une dépêche assez confuse de l’AFP. « Des chercheurs ont découvert une molécule qui pourrait avoir un impact sur la genèse des neurones et dont l’absence pourrait provoquer des états anxieux et donc la dépression. La molécule, la MIF (Macrophage migration inhibitory factor) a un « « impact (…) sur l’état anxieux et/ou dépressif du rat que l’on peut percevoir par un changement de comportement », a indiqué l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) dans un communiqué. Une équipe de chercheurs dirigée par la responsable du Laboratoire de génétique comportementale, Carmen Sandi, a découvert que son absence inhibe la production de gènes et « génère une augmentation des comportements anxieux et dépressifs ». 

L’équipe espère développer grâce à la molécule des médicaments contre la dépression, qui touche 121 millions de personnes dans le monde selon l’Organisation mondiale de la Santé. « Cette découverte indique que la MIF est potentiellement significative pour le traitement dans le déficit de genèse de neurones, de même que les problèmes liés à l’anxiété, la dépression ou la cognition », a précisé Mme Sandi dans le communiqué. »

L’enthousiasme de Mme Sandi pour annoncer à toute vitesse le passage de résultats obtenus sur la dépression du rat à des médicaments pour 121 millions d’humains est bien dans l’esprit de la nouvelle EPFL, toute imbue d’évaluation de la rentabilité des recherches qui s’y mènent. Un brûlot qui la vise, écrit par le physicien Libero Zuppiroli sous le titre « La bulle universitaire. Faut-il poursuivre le rêve américain ? » a causé un petit scandale dans la confédération. C’est un symptôme de plus à rajouter dans notre clinique de l’affolement du discours universitaire par l’évaluation et l’adoption des « bonnes pratiques » de la good governance. De l’hallucinogène au gène, nous restons hallucinés et déjà Pierrette voit en pensée le médicament – pot au lait qui fondera tout un département sponsorisé par Big Pharma.

De notre côté, c’est avec enthousiasme que nous présentons pour la première fois le programme du premier jour de congrès. C’est aussi un compte-rendu de recherches.

Dans ce premier jour d’Aggiornamento de la Passe, nous commençons d’entrée par le témoignage de quatre AE et trois séries d’interventions qui interrogent de façon nouvelle les semblants de la passe à partir de l’horizon du sinthôme. Effets subjectifs de renouvellement garantis. Demain le deuxième jour.

* * *

Correspondance Par Jesus Santiago

Ainda sob o impacto da sua interpretação do episódio Tiger Woods, me veio a questão concernente aos limites do uso da categoria de ‘sinthoma’. Na leitura do ‘Coisa de finesse’, às vezes fica a impressão – a meu ver equivocada –, de que só podemos conceber o sinthoma como o que se depura como incurável no âmbito do trabalho de decifração sobre o Sinn do sintoma. Quando você se refere a ‘sujeitos surpreendidos na precipatação de seu sinthoma’, abre-se uma via fértil para um uso clínico, mais extensivo, do mesmo. Ou seja, o seu texto evidencia que com a ferramenta do ‘sinthoma’ estaremos de posse de um recurso que favorece o analista lidar com a proliferação atual da Bedeutung do sintoma.

Réponse

Oui, c’est l’usage extensif du sinthôme comme « ma dinguerie » comme le disait LNA. EL

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Programme du Lundi 26 avril

Aggiornamento della Passe (1)

Président : Jacques-Alain Miller

Matin

9h00 – 9h30

Ouverture du congrès

Judith Miller, Eric Laurent, Luis Solano

9h30 – 11h00

Témoignages des AE :

Angelina Harari (EBP)

Sergio Caretto (SLP)

11h00 – 11h30 : Pause café

11h30 – 13h00

Sergio Passos Ribero de Campos (EBP)

Gustavo Stiglitz (EOL)

Après-midi

14h30 – 15h30

La perspective du reste

Elogio de la sombra

Marcela Almanza (NEL)

Précarité de la fin de l’analyse

Clotilde Leguil (ECF)

De entrada, el horizonte del fin

Ricardo Nepomiachi (EOL)

15h30 – 16h30

La nouvelle alliance

Dar el paso interminablemente

Osvaldo Delgado (EOL)

Sortir du noir

Lieve Billiet (NLS)

Du mouvement comme nécessité

Philippe De Georges (ECF)

16h30 – 17h30

La passe et l’Ecole Une

S (A barré) et l’Ecole Une

Juan Carlos Indart (EOL)

De la souplesse pour la passe

Aurélie Pfauwadel (NV)

18h

Accueil des Membres de l’AMP au Ministère des Affaires Etrangères (19h à 21h)

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Editorial n° 5

Par Eric Laurent

Les moyens de la jouissance

Les deux derniers éditoriaux présentaient la substance jouissante abordée d’abord par la vérité puis par le savoir. Dans le Séminaire XVIII, Lacan développe cette distinction à partir de l’opposition faite dans le Ménon entre l’épistemè et la doxa vraie. Hier, lors du Forum, Jacques-Alain Miller faisait valoir comment l’expérience de la passe peut être conçue soit comme expérience de savoir, soit comme expérience de vérité avec des conséquences diverses. Ce n’est pas la même chose de considérer l’expérience comme un réel à saisir sous l’angle du savoir, de la recension, de la sériation, delà gradation des effets ; ou bien comme une expérience qui échappe à toute exhaustion, est essentiellement performance, exploit. C’est le versant où ces dimensions s’opposent. Il est un deuxième versant. Le versant inconscient. C’est celui où il peut y avoir jonction où « le savoir dont il s’agit dans l’inconscient est celui qui glisse, qui se prolonge, qui à tout instant s’avère savoir de la vérité. » Cette formulation de Lacan est de 1971. Cinq ans avant, il disait : « La division du sujet et du symptôme c’est l’incarnation de ce niveau où la vérité reprend ses droits sous la forme de ce réel non su, de ce réel à exhaustion impossible qui est ce réel du sexe ». Dans le sexuel, lorsqu’il y a manque, effet de vérité, vacillation des semblants, il y a aussi objet (a) et sinthôme. 

Aujourd’hui, nous rendons public le programme du mercredi 28 avril matin et après-midi, avec les exposés répartis selon les salles, et avec les présidents de séance. Sur le nombre de noms mobilisés, il y aura des glissements. Nous avons essayé de les réduire le plus possible. Signalez-nous les erreurs éventuelles. Nous tenons à ce que les semblants restent bien à leur place sans indiquer de jouissance mauvaise des organisateurs. Nous rappelons à ceux qui ont adressé une contribution et dont le nom ne figure pas le mercredi après-midi qu’il seront publiés dans la « Clef USB du Congrès ». Les présidents de séance sont aussi les facilitateurs de la discussion. Les salles multiples du mercredi présentent une difficulté particulière, celle des langues. Les inscrits ont été répartis dans les salles selon les langues qu’ils ont déclaré entendre. Nous espérons que la Babel combinatoire qui en est résultée permettra des malentendus féconds.

Demain, nous en saurons plus sur le premier jour du Congrès.

A demain

Eric Laurent, le 12 avril 2010

MERCREDI 28 AVRIL MATIN
Salle 241
220 places
Salle du trou
Amphi bleu
826 places
Amphi J.J.
Salle 242B
120 places
Salle du visible invisible
Salle 242A
120 places
Salle du voile
Salle 251
220 places
Salle du bord
Salle 243
120 places
Salle du Masque
10h – 11h Marco FOCCHI (SLP) / Marcela RUDA (EOL)
Pdt : Francesca BIAGI-CHAI (ECF) / Oscar VENTURA (ELP)
Marco MAUAS (NLS) / Sonia CHIRIACO (ECF)
Pdt : Jesus AMBEL (ELP) / Jean-Louis GAULT (ECF)
Ram MANDIL (EBP) / Claude QUENARDEL (ECF)
Pdt : Ligia GORINI (ECF) / Agnès AFLALO (ECF)
Santiago CASTELLANOS (EOL) / Nathalie GEORGES (ECF)
Pdt : Vilma COCCOZ (ELP) / François ANSERMET (ECF)
Ernesto SINATRA (EOL) / Nathalie CHARRAUD (ECF)
Pdt : Guy BRIOLE (ECF) / Pierre SKRIABINE (ECF)
Damasia de FREDA (EOL) / Maria FERRETTI (EBP)
Pdt : Bernardino HORNE (EBP) / M. FERNANDEZ BLANCO (ELP)
11h – 12h Fabian FAJNWAKS (ECF) / Paola FRANCESCONI (SLP)
Pdt : Lilia MAHJOUB (ECF) / Jacques BORIE (ECF)
Catherine MEUT (ECF) / Irene Leonor ACCARINI (EOL)
Pdt : F-Hugo FREDA (ECF) / Beatriz UDENIO (EOL)
Nicolas JUDE (ECF) / Elisa ALVARENGA (EBP)
Pdt : Sergio LAIA (EBP) / Fabien GRASSER (ECF)
Sophie GAYARD (ECF) / Liliana ROSSI (EOL)
Pdt: Camilo RAMIREZ (ECF) / Rosa CALVET (ELP)
Eduardo ABELLO (EOL) / Anne BERAUD (NLS)
Pdt : Hebe Tizio (ELP) / Maria Cristina AGUIRRE (NEL NLS)
Adriana LUKA / Cristina DRUMMOND (EBP)
Pdt : Paulo SIQUEIRA (ECF) / Mirta ZBRUN (EBP)
12h – 13h Luc VANDER VANNET (NLS) / Hélène BONNAUD (ECF)
Pdt : Marie-Hélène BROUSSE (ECF) / Sophie MARRET (ECF)
Pierre NAVEAU (ECF) / Irène KUPERWAJS (EOL)
Pdt : Esthela SOLANO (ECF) / Xavier ESQUE (ELP)
Simone SOUTO (EBP) / Anne GANIVET (ECF)
Pdt : Phiilippe HELLEBOIS (ECF) / Romildo DO REGO BARROS (EBP)
Juan Fernando PEREZ (NEL) / Dalila ARPIN (ECF)
Pdt : Graciela ESPERANZA (EOL) / Antonio BENETTI (EBP)
Hélène DELTOMBE (ECF) / Victoria HORNE REINOSO (ECF)
Pdt : M. MARIN / Yves-Claude STAVY
Marina RECALDE (EOL) / Amanda GOYA PINTO (ELP)
Pdt : Guy TROBAS (ECF) / Lizbeth AHUMADA (NEL)
MERCREDI 28 AVRIL APRES-MIDI
Salle 241
220 places
Salle du trou
Salle 243
120 places
Salle du Masque
Salle 242B
120 places
Salle du visible invisible
Salle 242A
120 places
Salle du voile
Salle 251
220 places
Salle du bord
Amphi bleu
826 places
Amphi J.J.
L’analyste analysant 14h – 15h Françoise BAREAU / Patricio ALVAREZ
Pdt : Patrick MONRIBOT (ECF) / Shula ELDAR (ELP)
Adriana RUBISTEIN / Ivan RUIZ
Pdt : Mercedes DE FRANCISCO (ELP) / Daniel MILLAS (EOL)
Antonella DEL MONACO / Nathalie WULFING
Pdt : Gil CAROZ (ECF) / Marta Serra FREDIANI (ELP)
Adèle BANDE ALCANTUD / Martin EGGE
Pdt : Maurizio MAZZOTTI (SLP) / Marie Hélène ROCH (ECF)
Carmelo LICITRA / Lilany PACHECO
Pdt : Thierry JACQUEMIN (ECF) / Marina LUSA (ECF)
Emmanuelle BORGNIS-DESBORDES / Manuel ZLOTNIK
Pdt : Gustavo DESSAL (ELP) / Monique KUSNIEREK (ECF)
Le semblant
mis à nu par
le sinthome 15h – 16h
Silvia BAUDINI / Michel GROLLIER (ECF)
Pdt : Dominique WINTREBERT (ECF) / Marie José ASNOUN (ECF)
Gabriela DARGENTON / Giorgia TISCINI
Pdt : Herbert WACHSBERGER (ECF) / Erminia MACOLA (SLP)
Massimo TERMINI / Ondina MACHADO
Pdt : Marcus Andre VIEIRA (EBP) / Virginio BAIO (SLP)
Paz CORONA / Celeste VIÑAL
Pdt : Jean-Robert RABANEL (ECF) / Ana AROMI (ELP)
Catherine BONNINGUE / Luciola MACEDO de FREITAS
Pdt : Jean Daniel MATET (ECF) / Marcelo VERAS (EBP)
Reginald BLANCHET / Carolina KORETZY
Pdt : Dominique HOLVOET (ECF) / Rosa Elena MANZETTI (SLP)
Le sinthome
mis à nu
par l’art 16h – 17h
Daniela FERNANDEZ / Fabio GALIMBERTI
Pdt : Pierre STRELISKI (ECF) / Alain MERLET (ECF)
Fabienne HULAK / Giovanni LO CASTRO
Pdt : Luisella BRUSA (SLP) / Philippe LACADÉE (ECF)
Vlasis SKOLIDIS /Chiara MANGIAROTTI
Pdt : Domenico COSENZA (SLP) / Christiane ALBERTI (ECF)
Alfredo ZENONI / Mandy TORO
Pdt : Carmen CARCELLER (ELP) / Hervé CASTANET (ECF)
Thierry VIGNERON / Débora RABINOVICH
Pdt : Yves DEPELSENAIRE (ECF) / Silvia ONS (EOL)

L’accueil du Congrès, le lundi 26 avril, est à 8h00

1 .Les 1.486 inscrits doivent prendre: leur valisette, pour cela 14 guichets seront ouverts.

2- Leur écouteur pour traduction simultanée du lundi, mardi, jeudi et vendredi.

Le lundi nos activités scientifiques commencent à 9h00

La Commission d’organisation

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Editorial n° 4

Par Éric Laurent

Le savoir et la jouissance

Les lecteurs de l’éditorial d’hier se réjouiront de savoir que Tiger Woods a très bien joué à Augusta avec deux eagles, trois birdies, mais aussi avec trois bogeys (consultez Google).

« La vérité d’hier n’est peut-être pas la vérité d’aujourd’hui ». C’est une phrase profonde sur la logique de l’inférence qu’a prononcée mercredi le secrétaire général de l’Elysée à propos d’une éventuelle source d’une énigmatique rumeur. Elle rejoint celle que le secrétaire d’Etat Donald Rumsfeld, avait avancée lorsque les armes de destruction massive de Saddam Hussein m’apparaissaient pas. « Il y a des choses que nous savons que nous savons. Il y a des inconnues connues, c’est-à-dire qu’il y a des choses que nous savons que nous ne savons pas. Mais il y a aussi des inconnues inconnues. Il y a des choses que nous ne savons pas que nous ne savons pas. » La structure logique des deux phrases nous fait penser au paradoxe de Wittgenstein selon Kripke. On croit faire une opération aussi simple qu’une addition alors qu’on pourrait faire tout autre chose dont les résultats sont les mêmes que l’addition pendant un certain temps, mais pas tout le temps. Tant que les deux opérations ne divergent pas, il n’y a pas moyen de savoir quelle règle nous suivons. Une vérité à l’instant t peut-être fausse à l’instant t + 1 et l’on ne sait jamais vraiment ce que l’on dit. D’ailleurs, il me faut corriger une assertion faite hier. Notre civilisation reconnaît certes que les identifications de gender de genre sont foncièrement équivoques mais c’est pour durcir les différences d’âges. On cherche là sans équivoque à séparer l’odieux du licite. Dans certaines sociétés traditionnelles, on recommande le mariage de filles à peine nubiles, dans les nôtres on reproche à un Président du Conseil d’avoir des maîtresses qui pourraient avoir moins de dix-huit ans. L’horreur de la séduction des enfants contamine l’adolescence. C’est pourquoi l’Eglise insiste beaucoup sur la différence entre la séduction des enfants et celle des adolescents. Elle entend par là excuser l’inexcusable. Décidément, les équivoques infiltrent partout le langage.

C’est en se basant sur des présupposés inverses que la firme Intel vient d’annoncer, ce même mercredi, qu’elle allait commercialiser des appareils capables de lire les pensées en analysant des scanners cérébraux. Les zones cartographiées actives permettraient de s’orienter dans la nomination effectuée par le sujet. Il s’agit de pensées présentées comme simples, concrètes. L’appareil serait vendu pour permettre à des handicapés de manipuler des machines compensant leur handicap. On ne peut que s’en réjouir. Ces machines autorisent néanmoins le rêve d’une pensée qui serait entièrement inscriptible dans le corps. Sans équivoque sur le savoir et sans la fuite de la vérité, semblants et sinthôme coïncideraient alors sans littoral. C’est précisément ce que l’après-midi du mercredi 28 avril ne permet pas de rêver. En trois parties : l’analyste analysant, le semblant mis à nu par le sinthôme, et le sinthôme mis à nu par l’art. Elle regroupe 34 exposés qui font, un par un, percevoir comment s’aliènent et se séparent la lettre, le signifiant, le sujet et le corps. On y verra comment il est possible d’écrire avec ses pieds, d’entendre les voix du silence, de discerner les équivalences les plus bizarres entre l’argent et les perles du discours, entre les formules du fantasme et son au-delà, entre les bords du semblant et les parties les plus raffinées du corps découpé, comment on entretient un rapport fécond avec les équivoques de l’inconscient au-delà de la passe. On entendra aussi les questions que posent des artistes contemporains notoires aux psychanalystes qui les interrogent.



Dimanche, le Forum. A lundi.

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Programme de L’Après midi du mercredi 28 avril

Six salles sans traduction simultanée

1- L’analyste analysant

Adriana Rubistein et Ivan Ruiz

L’Inconscient, la musique et la voix

Adriana Rubistein : Una escansión en el camino del saber hacer

Ivan Ruiz : La voz de la Escuela

Françoise Bareau et Patricio Alvarez

Ecrire avec les pieds

Françoise Bareau : La voix du silence ou du regard de l’écriture, en passant par la voix

Patricio Alvarez : Con los pies

Emmanuelle Borgnis-Desbordes et Manuel Zlotnik

L’argent et la perle

Emmanuelle Borgnis-Desbordes : Une perle, au joint le plus intime du sentiment de la vie

Manuel Zlotnik : Fragmentos del proprio analisis

Carmelo Licitra et Lilany Pacheco

Le réel et la passe

Carmelo Licitra : A passagio con l’inconscio dopo la passe

Lilany Pacheco : O tratamento do Real pelo Real sob transferencia

Adèle Bande Alcantud et Martin Egge

Le temps et les limites

Adèle Bande Alcantud : A la limite du semblant

Martin Egge : Ti ci sei messo un po’ tardi

Antonella Del Monaco et Nathalie Wulfing

Les mots de l’Inconscient

Antonella Del Monaco : A partir dall’ Inconscio

Nathalie Wulfing : I can say a few words

2- Le semblant mis à nu par le sinthome

Réginald Blanchet et Carolina Koretzky

Semblant et pragmatique de la cure

Réginald Blanchet : Maintenir la position du semblant

Carolina Koretzky : De la perte à la privation

Silvia Baudini et Michel Grollier

Réveil dans le contrôle Silvia Baudini : Dos momentos de control

Michel Grollier : Réveil

Gabriela Dargenton et Giorgia Tiscini

La formule et son après coup

Gabriela Dargenton : Inconsciente y post analitico

Giorgia Tiscini : Une formule (V4 L2)

Massimo Termini et Ondina Machado

La jupe et le bord

Massimo Termini : La funzione di un bordo

Ondina Machedo : A saia justa do praticante

Paz Corona et Celeste Viñal

Glisser sans perdre la tête

Paz Corona: Glissement de texte

Celeste Vinal : Perder la cabeza

Catherine Bonningue et Luciola Macedo de Freitas

Reconfigurer le semblant

Catherine Bonningue : Hystérie enforme de sinthome

Luciola Macedo de Freitas : Eixo : procedimento do passe e sua possível reconfiguração

3- Le sinthome mis à nu par l’art

Daniela Fernandez et Fabio Galimberti

Le devoir n’est pas l’idéal

Daniela Fernandez : Devoir d’art

Fabio Galimberti : La scrittura dell’Ideale

Fabienne Hulak et Giovanni Lo Castro

Le transsexualisme comme anamorphose

Fabienne Hulak : L’homme aux anamorphoses

Giovanni Lo Castro : Il transessuale : tra sembiante y sinthomo

Thierry Vigneron et Débora Rabinovich

Gracian et Boltanski

Thierry Vigneron : Une exposition bavarde

Débora Rabinovich : De mujeres y semblantes en Baltasar Gracian

Vlasis Skolidis et Chiara Mangiarotti

Deux lettres

Vlasis Skolidis : Etre abonné à l’objet

Chiara Mangiarotti : Lettera a Unica Zurn

Alfredo Zenoni et Mandy Toro

De quoi l’art contemporain est-il le porte manteau ?

Alfredo Zenoni : De l’autre comme porte-manteau

Toro Mandy : Semblante, ética y sinthome en el arte contemporaneo

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Editorial n° 3

Par Éric Laurent


Vérité et jouissance

Aujourd’hui va commencer le tournoi de golf d’Augusta, le premier de la série des grands tournois. Il va marquer le retour de Tiger Woods sur les greens après le spectaculaire scandale sexuel qui s’est dévoilé à la suite d’un accident de voiture à la fin novembre 2009. Rapidement, cet accident se révélait le produit d’un mélange détonnant d’une scène de ménage explosive et du somnifère Ambien© commercialisé en France sous le nom de Stilnox©. Le nom générique est Zolpidem©. On lui connaît des effets secondaires comme le somnambulisme ou des comportements automatiques étranges ou inappropriés. Une douzaine de maîtresses du meilleur golfeur de l’histoire allaient bientôt se manifester en plus de celle que sa femme avait appelé de son portable cette nuit-là. L’une d’entre elles allait d’ailleurs révéler l’usage aphrodisiaque que faisait Woods de l’Ambien©, usage inventif, non répertorié sur la notice d’accompagnement du Stilnox©. La particularité de ce scandale sexuel qui a frappé les commentateurs est double. D’une part l’abondance des maîtresses, leur étonnante vulgarité, spécialement celle des porn-stars faisant savoir le plus de choses possibles des détails de la liaison. D’autre part la crudité des textes à contenu sexuel que la star du golf adressait à ses multiples conquêtes. Ces SMS ont vite reçu le nom de « sextos ».

L’ensemble contrastait violemment avec l’allure de gendre idéal qu’avait imposé Woods dont les contrats publicitaires avaient atteint les sommes les plus hautes jamais enregistrées dans l’histoire de tous les sports.

Jusqu’à la mort de son père, en 2006, Tiger menait une vie exemplaire dévouée au perfectionnement de son jeu. Il apparaissait timide avec les dames. Ce perfectionniste a été capable, bien qu’ayant 10/10 aux deux yeux, de se faire opérer pour améliorer encore sa vision. Tout était à l’avenant. Il avait réussi à devenir le joueur sur lequel reposait le succès des audiences télévisées lors de la retransmission des tournois de golf qui n’ont pourtant pas le rythme trépidant du foot, du basket, ou même du tennis.

Comment allait-il sauver les semblants ? L’enjeu était de taille pour le sport, le montant des redevances télévisées et les annonceurs. La première chose qu’il a entreprise est une thérapie pour « addiction sexuelle ». C’est maintenant la règle pour les acteurs ou sportifs qui sont découverts comme serial-philanderers.

Cette conception de l’addiction sexuelle contribue à ruiner la vieille conception de la « perversion » avec l’admission des droits des gays dans l’armée, les mariages de même sexe, la sortie du transsexualisme du cadre des affections etc. Tout de la sexualité est style de vie, nouvelles et anciennes normes mélangées. Il faut cependant se garder de l’excès. C’est sans doute l’enseignement que ses thérapeutes ont distillé au Tigre. Il s’excuse énormément actuellement du mal qu’il a fait à sa famille dans son égarement et apparaît penaud. Sa femme, modèle suédois qui fréquentait surtout les circuits du tennis, toujours amie avec Roger Federer, accompagne les transformations de son mari en restant d’un silence absolu, en le laissant s’exprimer toujours seul. C’est une position originale. Ni avec lui, ni sans lui, elle se fait toujours voir en public avec les enfants, mère exemplaire.

C’est ainsi que vivent ceux qui sont « sous le regard du monde » lorsque les particularités de leur sinthôme passent dans le champ du visible. Juste avant le tournoi d’Augusta, Nike a diffusé une publicité, la première depuis le scandale. La grande marque a pour l’occasion abandonné son slogan habituel « Just do it » qui serait sans doute apparu inopportun. Elle a réalisé un sobre spot de trente secondes où apparaît Tiger, immobile, avec en voix off, la voix de feu son père, Earl Woods, qui lui demande hors contexte et pour cause quels ont été ses pensées, se sentiments. Le spot se conclut par « Did you learn anything ? », « As-tu appris quelque chose ? ».

La vérité et la jouissance ne sont pas toujours capitonnées par le Nom-du-Père, c’est un des enseignements que nous pouvons tirer de la matière clinique du mercredi 28 avril. Comme vous le verrez, elle comporte une séquence où deux sujets se retrouvent « sous le regard du monde » très différemment de la star.

Elle comporte aussi des enseignements sur les conséquences pour un sujet d’avoir comme « scène primitive » l’originalité de surprendre ses parents échangistes ou comment un sujet a pu construire la particularité d’un travestisme ou encore d’une détermination transsexuelle. On rencontrera aussi, lors de cette matinée, des sujets névrosés, hystérique ou obsessionnels, qui ne cessent pas pour autant d’être surprenants dans la précipitation de leur sinthôme. Les analystes rendent compte aussi de façon non convenue de leurs positions et de leurs interventions.

Lisez, dans le détail du programme de la matinée du mercredi 28 avril, le jour « del sintoma desnudado ». Vous y apprendrez avec nous comment la vérité est « sœur de jouissance », comme le dit Lacan dans le Séminaire XVII.
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Programme de la matinée du mercredi 28 avril

Six salles sans traduction simultanée

Marco
Focchi et Marcela Ruda
Les semblants du corps dérangés par le sinthôme

Focchi, Marco. « Tutto ma questo no ! »
Ruda, Marcela. El entierro del clown.

Marco Mauas et Sonia Chiriaco
L’hystérie et le sentiment du vivant

Mauas, Marco. La histeria no es teatro.
Chiriaco, Sonia. Le bruit des talons.


Ram.
Mandil et Claude Quenardel
Le traumatisme de la scène primitive et les semblants de la jouissance

Mandil, Ram. Corpo : semblantes e sinthoma.
Quenardel, Claude. « Faire homme ».

Nicolas Jude et ElisaAlvarenga
Les semblants de la sexuation et l’au-delà du semblant phallique : travesti et transexualisme

Jude, Nicolas. « Je suis borderline ».
Alvarenga, Elisa. A falo como semblante para um homem.


Eduardo Abello et Anne Béraud
La particularité de la jouissance féminine – L’hystérie du tout

Abello, Eduardo. El padre y lo ridiculo.
Béraud, Anne. Jouissance feminine et sinthome.

Santiago Castellanos de Marcos et Nathalie Georges
Le découpage des semblants du coprs par le texte et l’organe

Castellanos de Marcos, Santiago. El ilusionista.
Georges, Nathalie. Le procès verbal.

Pierre Naveau et Irene Kuperwajs
L’hystérie et les bords du vide

Naveau, Pierre. L’Européenne et son pari.
Kuperwajs, Irene. La « intacta ».

Ernesto Sinatra et Nathalie Charraud
L’usage des Noms du Père et le traitement de la forclusion

Sinatra, Ernesto. Un analisis cientifico.
Charraud, Nathalie. Du rond de ficelle au trèfle.

Fabian Fajnwaks et Paola Francesconi
La réduction signifiante maximale et le minimum vital

Fajnwaks, Fabian La restauratrice.
Francesconi, Paola. L’insulto come Partner.


Damiasa Amadeo
de Freda et Maria Cecilia Galletti Ferretti
Le traitement du sinthome par le semblant de l’inconsistance

Freda de, Damasia Amadeo. Del maltrato al amor.
Ferretti, Maria Cecilia Galletti. Tudo é protocolo.

Sophie Gayard et Liliana Rossi
Les semblants de la lettre comme bords de la jouissance

Gayard, Sophie. Fermer les yeux.
Rossi, Liliana. Del fracaso del semblante al sinthoma.


Catherine Meut et Irene Leonor Accarini
La création et les bords du réel

Meut, Catherine. Un travail sur le désastre.
Accarini, Irene Leonor. La palabra entre semblante y sinthome.

Adriana Luka et Christina Drummond
Le semblant du corps et le réel de la voix dans la névrose et la psychose

Luka, Adriana. « Yo no pertenezco a ese club ».
Drummond, Christina. Crer no corpo.

Simone Souto et Anne Ganivet-Poumellec
Traitements par des semblants particuliers de l’érotomane et du harcèlement au travail

Souto, Simone. Um jeito para o sinthoma.
Ganivet-Poumellec Anne. Un compte à rebours.

Marina Recalde et Amanda Goya
Le délire sur le père comme traitement de la forclusion

Recalde, Marina. Un-padre, un uso possible del semblante.
Goya, Amanda. Cuando un semblante se queda corto.

Luc Vander Vennet et Hélène Bonnaud
Le renversement du fantasme et le bord de la jouissance

Vander Vennet, Luc. Homosexualité féminine entre parenthèse
Bonnaud, Hélène. Conception, semblant et sinthome.


Hélène Deltombe et Victoria Horne Reinoso
Ce qui ne cède pas dans la névrose

Deltombe, Hélène. Du symptôme au sinthome.
Horne Reinoso, Victoria. Garder la main.

Juan Fernando Perez et Dalila Arpin
Sous le regard du monde

Perez, Juan Fernando. Un sintoma, mis semblantes y mi encuentro con el psicoanalisis
Arpin, Dalila. Faire de l’autre le point de mire.

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Editorial n° 2

Par Eric Laurent

Le hors sens de la langue et le chiffre du sinthôme
Nancy Huston, canadienne de Paris, qui écrit aussi bien en français qu’en anglais, se remémorait le dit de Barthes selon lequel « la masse bruissante d’une langue inconnue constitue une protection délicieuse » et le confirmait. « Quel repos que de sillonner une ville en ne comprenant rien aux panneaux publicitaires, bavardages et bagarres dans la rue, réclames, graffitis, publicités ». Tout cela reste à imaginer pour la romancière. C’est là, sans doute, son repos. Lacan, dans la même situation à Tokyo, perçoit un effet d’écriture et combien: « le sensible [y] reçoit de cette écriture qui de l’on-yomi au kun-yomi répercute le signifiant au point qu’il s’en déchire de tant de réfractions, à quoi le journal, le panonceau au carrefour satisfont et appuient. »

Le Japonais a la chance de « parler chinois dans sa langue » dit Lacan. La Chine nous éclairera-t-elle aussi sur les semblants et le sinthôme ? Elle est déjà le symptôme de l’économie mondiale, 12 % de développement au premier trimestre de cette année contre 1 % en Europe. Mais une dépêche d’agence nous fait mieux percevoir encore le goût chinois pour les chiffres. Le Daily Dahe nous apprend qu’un fonctionnaire chinois de la ville d’Anqing trafiquait allègrement de son influence, de façon éhontée, pour soutenir un train de vie – ou de mort – d’enfer. En plus de sa légitime et de deux maîtresses, il s’était donné pour objectif d’avoir des relations avec 56 femmes par an. Il tenait un journal multi-media particulièrement détaillé sur son sinthôme, agrémenté de photos et vidéos. Il en était à peu près à 500 femmes ainsi cataloguées et s’était donné l’objectif d’atteindre le chiffre de 800. On comprend bien pourquoi 800 puisque, pour les chinois, les chiffres ont encore une signification, et huit est le chiffre de la perfection, le neuf étant réservé à l’Empereur. Mais pourquoi 56 ? Il y a sans doute là une trace des particularités de son sinthôme. Il faudrait qu’il nous le dise. Quoi qu’il en soit, c’est sa femme qui a mis le holà à son entreprise en le dénonçant aux autorités. Le Président chinois Hu Jin Tao, lors d’une réunion du grand parti communiste a vigoureusement appelé ses cadres à être « vigilants face à la tentation du pouvoir, de l’argent et de la beauté ». Grâce aux difficiles exercices de traduction inter culturelles un dirigeant peut exhorter à se garder de « la tentation de la beauté », c’est émouvant. Il aurait dû ajouter à cette liste de tentations celle des objectifs chiffrés et la fétichisation qu’ils impliquent. Elle mène à un exercice proprement pervers du pouvoir. Il engendre une perdition, un aveuglement qui lui est propre. Et pas seulement pour ce fonctionnaire chinois, stakhanoviste de la fonction Phi, si l’on me permet cette référence productiviste. Mais il s’agit d’une production de vide. Aujourd’hui, le Journal du Congrès rend public les 34 textes que nous avons retenus pour être prononcés lors de l’après-midi du mercredi 28 avril. Nous avions reçu 163 propositions comme réponse à l’appel à de nouvelles contributions qui a suivi l’ouverture du Congrès aux non-membres. Pourquoi 34 et non 36 comme le matin ? Il n’y a là nulle trace de numérologie. Nous disposons de six salles durant trois heures et notre module nous permet d’accueillir deux personnes par heure. Seulement, il nous faut libérer le grand amphi une heure plus tôt afin d’y installer le piano sur lequel Nicolas Stavy jouera à la fin de cette journée. Calculez, vous verrez que nous ne pourrons écouter que 34 interventions. Les autres propositions d’intervention seront publiées sous une forme originale, sur une clé USB remise à chacun des inscrits au Congrès. Ainsi, l’ensemble des propositions adressées sera accessible.

Il reste à savoir comment les 34 interventions sont classées, réparties dans des séquences homogènes, comment les paires ont été faites, etc… Vous le saurez bientôt.

A demain,

Eric Laurent, 7 avril 2010

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Les 34 travaux sélectionnés
Pour l’après midi du 28 avril 2010

1- Alvarez, Patricio : Con los pies

2- Borgnis-Desbordes, Emmanuelle: Une perle, au joint le plus intime du sentiment de la vie

3- Bande Alcantud, Adèle: A la limite du semblant

4- Bareau, Françoise : La voix du silence ou du regard de l’écriture, en passant par la voix

5- Baudini, Silvia : Dos momentos de control

6- Blanchet, Réginald : Maintenir la position du semblant

7- Bonningue, Catherine : Hystérie enforme de sinthome

8- Corona, Paz: Glissement de texte

9- Dargenton, Gabriela : Inconsciente y post analitico

10- Del Monaco, Antonella: A partir dall’ Inconscio

11- Egge, Martin : Ti ci sei messo un po’ tardi

12- Fernandez, Daniela : Devoir d’art

13- Galimberti, Fabio : La scrittura dell’Ideale

14- Grollier, Michel : Réveil

15- Hulak, Fabienne : L’homme aux anamorphoses

16- Koretzky, Carolina : De la perte à la privation

17- Licitra Carmelo : A passagio con l’inconscio dopo la passe

18- Lo Castro, Giovanni : Il transessuale : tra sembiante y sinthomo

19- Macedo de Freitas, Luciola: Eixo : procedimento do passe e sua possível reconfiguração

20- Machado, Ondina : A saia justa do praticante

21- Mangiarotti, Chiara : Lettera a Unica Zurn

22- Pacheco, Lilany : O tratamento do Real pelo Real sob transferencia

23- Rabinovich, Débora : De mujeres y semblantes en Baltasar Gracian

24- Ruiz, Ivan : La voz de la Escuela

25- Rubistein, Adriana: Una escansión en el camino del saber hacer

26- Skolidis, Vlasis : Etre abonné à l’objet

27- Termini, Massimo : La funzione di un bordo

28- Tiscini, Giorgia : Une formule (V2 L2)

29- Toro, Mandy : Semblante, ética y sinthome en el arte contemporaneo

30- Vigneron, Thierry : Une exposition bavarde

31- Viñal, Celeste : Perder la cabeza

32- Wulfing, Nathalie : I can say a few words

33- Zenoni Alfredo : De l’autre comme porte-manteau

34 – Zlotnik, Manuel : Fragmentos del proprio analisis

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Editorial N° 1

Par Eric Laurent


Just strip, don’t tease

Voilà ! La Pâque est passée, on peut y aller. Cette année, c’était la fête aux semblants. Tout tombait en place en même temps. C’est rare ! Les Pâques juive, orthodoxe, catholique se sont déroulées dans la même semaine, ou presque. On aurait pu croire au dialogue œcuménique. En tous cas, il y avait des vacances œcuméniques par ci, par là, dans le vaste ensemble AMP.

C’était aussi la fête au symptôme œcuménique. On a entendu un franciscain évoquer la Shoah dans une étrange tentative d’identification. Il s’est trouvé démenti immédiatement par un porte-parole officiel du Vatican. Ce n’était pas la bonne comparaison pour les souffrances actuelles de l’Eglise.

On apprenait dans le même temps que la hot-line mise en place en Allemagne pour recueillir des plaintes pour abus sexuels de la part de prêtres implosait le premier jour, avec plus de 4.000 appelants. Comment préserver les semblants sous l’assaut du sinthôme ? Faut-il défroquer ou non les fauteurs. Jusqu’où s’étend la dignité de la fonction ? Voilà des questions surprenantes qui assaillent les plus hauts responsables des semblants qui nous gouvernent.

Du côté du marché, la situation n’est pas meilleure. Scandales financiers et énormité des bonus font vaciller les semblants de la régulation. En politique, la bataille à la jugulaire qui se prépare pour les élections anglaises donne lieu à d’étranges scandales. Et cela sans parler des bizarres complots portant sur le dévoilement de la vie privée du Président et de la première dame.

Dans les discours établis, le binaire semblants-sinthôme est clairement antinomique par les temps qui courent. La solution que crie la rumeur est partout la même : mehr glasnost, plus de transparence. Des scanners corporels pour tout le monde, le Pape y compris. Le plus de jouir démocratique se fait insistant. Gérard Wajcman le dit bien. C’est l’instant de l’œil absolu. C’est lui qui nous rend fou. Nous qui sommes dupes du discours analytique, sommes des dissidents de l’œil absolu. Nous faisons du judo avec la tyrannie de la transparence. Nous savons qu’en son fonds, le sinthôme ne peut venir pleinement au jour. Il faut lui laisser sa part d’ombre.

Pas de meilleur moment donc pour notre Congrès sur les semblants et le sinthôme. Mais quel en est le programme ? C’est maintenant l’instant de voir. Nous commençons aujourd’hui à dévoiler ce qui nous attend. Ca ne cessera pas jusqu’à la veille du dit Congrès.

Aujourd’hui, nous vous donnons le programme du matin du troisième jour. La liste de ceux qui vont présenter un cas clinique le mercredi matin en ne ménageant pas leur implication dans l’affaire. La suite, demain.

A demain

E.L., 6 avril 2010

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Les 36 travaux sélectionnés pour
la matinée clinique du 28 avril 2010

1- Abello, Eduardo. El padre y lo ridiculo.

2- Accarini, Irene Leonor. La palabra entre semblante y sinthome.

3- Alvarenga, Elisa. A falo como semblante para um homem.

4- Arpin, Dalila. Faire de l’autre le point de mire.

5- Béraud, Anne. Jouissance féminine et sinthome.

6- Bonnaud, Hélène. Conception, semblant et sinthome.

7- Castellanos de Marcos, Santiago. El ilusionista.

8- Charraud, Nathalie. Du rond de ficelle au trèfle.

9- Chiriaco, Sonia. Le bruit des talons.

10- Deltombe, Hélène. Du symptôme au sinthome.

11- Drummond, Chistina. Crer non corpo.

12- Fajnwaks, Fabian. La restauratrice

13- Ferretti, Maria Cecilia Galletti. Tudo é protocolo.

14- Focchi, Marco. « Tutto ma questo no ! »

15- Francesconi, Paola. L’insulto como Partner.

16- Freda de, Damasia Amadeo. Del maltrato al amor.

17Ganivet-Poumellec Anne. Un compte à rebours.

18- Gayard, Sophie. Fermer les yeux.

19Georges, Nathalie. Le procès verbal.

20- Goya, Amanda. Cuando un semblante se queda corto.

21- Horne Reinoso, Victoria. Garder la main.

22- Jude, Nicolas. « Je suis borderline ».

23- Kuperwajs, Irene. La « intacta ».

24- Luka, Adriana. « Yo no pertenezco a ese club ».

25- Mandil, Ram. Corpo : semblantes e sinthoma.

26- Mauas, Marco. La histeria no es teatro.

27- Meut, Catherine. Un travail sur le désastre.

28Naveau, Pierre. L’Européenne et son pari.

29- Perez, Juan Fernando. Un síntoma, mis semblantes y mi encuentro con el psicoanálisis

30- Quenardel, Claude. « Faire homme ».

31- Recalde, Marina. Un-padre, un uso possible del semblante.

32- Rossi, Liliana. Del fracaso del semblante al sinthoma.

33- Ruda, Marcela. El entierro del clown.

34- Sinatra, Ernesto. Un analisis cientifico.

35- Souto, Simone. Um jeito para o sinthoma.

36- Vander Vennet, Luc. Une homosexualité féminine entre parenthèses.
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