13.4.09

Sampai, dohai, kohai - Relations hiérarchiques dans un dojo d’aikido

Sampai, dohai, kohai

Dans la société japonaise dans son ensemble, l’élève ou le salarié plus ancien est le sampai , qui joue un rôle de tuteur pour le kohai, tandis que des personnes de même ancienneté sont dohai. Dans le cadre des arts martiaux comme dans les entreprises ou les administrations, les sampai assurent la formation des nouveaux arrivant, les forment aux us et coutumes locales, leur expliquent le fonctionnement interne de leur structure.

Dans la culture japonaise, le sampai est l'élève avancé et le kohai est le jeune élève. Le sampai a un rôle de tuteur auprès du kohai, et il a un rôle de relais de l'enseignement du sensei, le professeur ; en retour, le kohai doit le respect au sampai. Deux élèves de même ancienneté, quant à eux, sont mutuellement dohai.

Ce système hiérarchique est profondément ancré dans la société japonaise. Il s'applique à tous les niveaux de la société.

Dans les arts martiaux, l'élève ancien est là pour guider le nouvel élève. La notion de sampai et de kohai dépend exclusivement de l'ancienneté de l'élève dans l'art, pas de l'âge ni du grade.

Dans le cadre de l’aikido, la relation entre sampai et kohai peut être définie ainsi : "Si l’esprit de gratitude d’un sampai envers un kohai s’exprime par cette seule pensée « Merci, de m’avoir permis de bien travailler aujourd’hui », le kohai sera heureux ; de même si le kohai remercie le sampai de son enseignement, celui-ci sera content. Il est grotesque d’avoir à dire « Respectez-moi car je suis votre sampai ».
Le respect envers le sampai ne doit pas être provoqué, le kohai doit tout naturellement avoir envie de respecter le sampai. Ce dernier lui, prend soin du kohai car le kohai occupe la place qui est la sienne et mérite par là que l’on s’occupe de lui." (Me Tamura)

Celui-ci ajoute que la nature du travail avec un partenaire dépend du statut relatif du partenaire avec lequel on travaille. Ainsi, le rôle d’un sampai est de nous permettre d’exprimer pleinement notre technique, éventuellement de nous montrer par où notre technique pêche et de nous permettre de l’améliorer.
Du point de vue du sampai, il s’agit de traverser une corde raide entre la complaisance et l’obstruction.
Le travail avec un dohai est l’occasion de prendre la mesure de notre technique et de travailler les deux rôles de l’aïte (tori et uke) à plein régime technique et physique.
Enfin, le travail avec un kohai oblige à revenir sur notre propre pratique afin de mieux l’expliquer et oblige également à mettre dans le travail d’uke la souplesse et la fluidité qui manquent souvent aux débutants.

Nous disions plus haut que le statut de sampai ou de kohai était lié à l’ancienneté. On voit dans la description que nous en donnons que cela n’est pas totalement vrai pour l’aikido car il y a également une dimension technique. Ainsi, il peut se produire que des pratiquants plus récents, du fait d’une pratique plus intensive, acquièrent une compétence technique supérieure à des pratiquants plus anciens. Il faut alors trouver dans le dojo un modus vivendi pas toujours évident qui fasse sa place à la fois à l’expérience des plus anciens auxquels l’expérience confère plus de recul et une vision souvent plus large, et à la qualité technique des plus jeunes. C’est là une des fonctions les plus délicates de l’enseignant.

Et l’enseignant dans tout ça ?

Normalement, l’enseignant (le maître du dojo) jouit d’une certaine prééminence par rapport à ces relations. Il est le référent, en tant qu’il transmet lui-même l’enseignement reçu d’autres enseignants plus avancés et en tant qu’il a (théoriquement) été désigné par ces mêmes enseignants comme étant la personne devant effectuer cette transmission.
De ce fait, si le statut relatif de deux pratiquants peut être peu clair, l’identité et la place de l’enseignant (le maître du dojo) sont supposés être connaissance commune. Sans avoir nécessairement le dernier mot, l’enseignant impose de par sa fonction un point technique à travailler, un type de travail particulier que tous les pratiquants à son cours sont tenus de respecter faute de quoi ils devront quitter le dojo.

La position d’enseignant se double de celle de sampai de l’ensemble du dojo (en tant que pratiquant le plus ancien) et de référent technique (pratiquant le plus avancé techniquement).
Avec le chevauchement des générations, ce n’est toutefois plus le cas général, et les jeunes enseignants doivent composer avec des pratiquants plus expérimentés ou plus avancés techniquement, parfois plus rétifs à la remise en cause de leurs acquis techniques par un pratiquant plus jeune. Il convient alors que ces jeunes pratiquants envisagent de créer leur propre dojo, ou une succursale du dojo de leur maître.

Une chose est à éviter systématiquement : le cours dans le cours. Quelle que soit sa propre compétence technique, il faut banir de se substituer à l’enseignant ou d’endosser le rôle d’assistant de l’enseignant (uchi deshi) si ce dernier ne l’a pas explicitement demandé. En faisant cela, non seulement on se prive d’une occasion de travailler ce que propose l’enseignant, mais même avec la meilleure volonté, on induit surtout de la confusion dans l’esprit du kohai dont on essaie de prendre soin.
Dans certains dojos, il est parfois difficile de faire la part entre le rôle de sampai et le moment où on commence à se substituer à l’enseignant. Mais normalement ce problème ne devrait pas exister si l'on considère que chacun doit connaître sa place.

Le Dojo et l’association

Si dans la pratique quotidienne, le cadre du dojo neutralise la plupart des hiérarchies sociales en vigueur à l’extérieur , celles-ci peuvent revenir en force dans le cadre de la structure associative qui fonde la structure de la plupart des dojos français. Les modalités des statuts d’une association loi 1901 sont très libres (pouvant autoriser des positions à vie ou un fonctionnement uniquement par cooptation, sauf s'il s'agit d'une section d’une association multisports) et peuvent de ce fait reproduire la hiérarchie traditionnelle d’un dojo, il n’en va pas de même si l’association veut obtenir l’agrément « jeunesse et sport ». Or, ce dernier est actuellement discriminant pour l’accès aux salles de sport publiques, condition nécessaire de fonctionnement pour les dojos ne disposant pas de leurs propres locaux. Un fonctionnement démocratique, y compris une équitable représentation des licenciés mineurs, est un des critères essentiels de l’agrément.
En outre, pour éviter les conflits d’intérêt, dans les dojos où des enseignants sont rémunérés, ceux-ci sont écartés du bureau (ils ne peuvent être ni président, ni trésorier).
Une troisième hiérarchie, fondée sur la disposition à donner du temps à l’association, apparaît alors, hiérarchie qui n’a aucune raison de recouper les précédentes.

Tout cela n’est d’ailleurs pas nécessairement inscrit dans le fonctionnement formel de l’association. Ainsi, une personne ne remplissant aucun mandat au sein de l’association pourra avoir une action administrative importante (tenue des fichiers des adhérents, recueil des demandes de licences et des cotisations, tenue du site web), et être reconnue pour cela en tant qu'uchi deshi en référence à une gestion "traditionnelle".

Un fonctionnement traditionnel de dojo (et non franco-français) peut et doit pallier à ces approches à priori antagonistes, la priorité devant être liée à la notion orientale : un maître, un dojo.

Différents lieux, différentes hiérarchies
On voit aisément comment tout cela peut créer des tensions au sein d’un dojo. Il n’existe pas à notre connaissance de recette miracle pour gérer ces recoupements, les réactions sur ce sujet étant par trop individuelles. En revanche, il semble qu’il faille rappeler un principe général de fonctionnement qui nous est sans doute moins naturel qu’aux Japonais : la variation des hiérarchies en fonction de la circonstance.
Ainsi, l’étiquette impose de considérer comme hiérarchiquement supérieur l’enseignant (le maitre du dojo) en train de faire le cours et d’essayer de faire ce qu’il demande, quels que soit notre propre opinion sur la pertinence de l’exercice demandé ou la gestion du dojo.

C’est en dehors du cadre du cours proprement dit que les autres pratiquants peuvent exprimer leurs avis sur un point ou sur un autre.
Ce texte, bien qu'issu de différentes sources, a reçu la gratieuse autorisation de M. Mathieu Perona (Paris) pour une reprise de son texte.

Ce texte, bien qu'issu de différentes sources, a reçu la gratieuse autorisation de M. Mathieu Perona (Paris) pour une reprise de son texte.
(http://www.parisaikidoclub.com/spip/spip.php?article624)

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