Comité de Pilotage : mise en œuvre du rapport GILLOT « le droit des sourds »

Groupe de travail « éducation et scolarisation des enfants et adolescents sourds »

Charte nationale pour l'intégration scolaire et universitaire
et doctrine commune en matière d'éducation et de scolarisation

juin 1999

 analyse de l'ANPES

 
  1. Problématique
  2. Le choix éducatif des parents
  3. La demande des parents au système scolaire
  4. L'organisation scolaire
  5. Expérimentation de la scolarité bilingue
  6. Normalisation - Intégration dans le dispositif réglementaire ordinaire
  7. Propositions

 

1. Problématique

Depuis 1991 avec la publication de la loi Fabius, les parents peuvent faire le choix d'une éducation bilingue pour leur enfant sourd. Les décrets et circulaires d'applications sont parus en 92 et 93 et des textes récents (cf. le texte d'orientation générale en faveur de la scolarisation des enfants handicapés du CNCPH d'avril 99) sont venus renforcer les obligations d'accueil des établissements conformément aux vœux des familles.

D'autre part des structures bilingues, créées il y a une quinzaine d'années, ont maintenant largement dépassé le stade de l'expérimentation. Leur principe pédagogique correspond à ce que demandent les parents. Leur bilan scolaire est parfois insuffisant, le plus souvent du fait du retard des enfants accueillis et des conditions difficiles de fonctionnement. Pourtant, même dans ce cas, les parents en font un bilan global très positif quand ils prennent en compte le développement général de ces jeunes sourds, leur épanouissement personnel, leur culture générale, leur autonomie et leur aisance dans la société. D'autres observateurs (cf. le rapport de l'inspecteur général SOUBRÉ) ont fait les mêmes constats positifs. Ces structures pionnières, créées avant la loi Fabius, ont permis d'affiner le projet bilingue et d'établir des critères de qualité mais aussi de lister tous les obstacles qui s'opposent à leur mise en œuvre. Depuis la loi de 1991 censée les autoriser, aucune nouvelle structure bilingue n'a pu être créée. La scolarité en langue des signes n'est toujours pas possible, car elle n'est toujours pas réglementaire dans le cadre du dispositif ordinaire.

Le rapport GILLOT sur « le droit des sourds » a le mérite de faire un bilan sans complaisance de l'efficacité du dispositif d'enseignement aux jeunes sourds. Le rapprochement de certains constats est éloquent :

La mise en œuvre d'une politique volontariste de développement de structures bilingues s'impose donc, pour des raisons de droit et d'efficacité.

Nous comptions nous appuyer sur les propositions du rapport pour définir les mesures permettant cette politique. Malheureusement ces propositions s'inscrivent toutes dans le carcan du dispositif existant : l'intégration est supposée individuelle, les deux voies proposées sont l'intégration en milieu ordinaire ou la scolarisation en établissement spécialisé, les enseignants en milieu ordinaire sont forcément entendants, l'enseignement est donné en français donc forcément en oral.

Il est donc difficile de proposer un enseignement en langue des signes donné à des classes de jeunes sourds, accueillis collectivement dans des établissements ordinaires par des équipes pédagogiques comprenant une forte proportion d'enseignants sourds certifiés dépendant de l'Éducation Nationale.

C'est pourtant ce qui existe dans certaines classes françaises tout à fait hors norme.

Nous allons donc rappeler la demande des parents et en déduire la forme de scolarité qui répond à cette demande. En nous appuyant sur l'expérience des classes bilingues existant à Poitiers (86), Torcy (77) et Toulouse (31), nous analyserons les spécificités de ces classes qui les font sortir du cadre réglementaire actuel. Ces spécificités sont de deux types :

- spécificité conjoncturelle : il faut donc admettre un ensemble de dérogations pendant une période transitoire permettant de normaliser la situation.

- spécificité fondamentale, liée à la nature même de cette option pédagogique: il est donc nécessaire de définir des mesures particulières pour qu'elles puissent rentrer dans le dispositif ordinaire.

2. Le choix éducatif des parents

Avant de définir les objectifs scolaires, il est nécessaire de préciser en quoi consiste le choix d'éducation bilingue et biculturelle.

a- Bilinguisme

Le terme de bilinguisme est souvent utilisé de manière ambiguë, en particulier s'il vise à désigner un mode de communication (comme c'est malheureusement le cas dans la formulation de la loi Fabius).

L'éducation bilingue est la mise en oeuvre d'un choix de vie pour l'enfant sourd, résultant d'un regard positif des parents sur leur enfant.

L'éducation bilingue vise à permettre aux enfants sourds de maîtriser et de pratiquer les deux langues, langue des signes et français, leur structure linguistique et leur usage mais aussi d'accéder à la culture qui leur est associée et donc aussi d'être des membres des deux communautés qui pratiquent ces langues.

LSF et français n'ont pas le même statut, le même rôle, le même mode ou le même rythme d'acquisition. La LSF est la langue que l'enfant peut acquérir naturellement, inconsciemment, à l'âge normal, langue dans laquelle il est tout à fait performant. Cependant nous n'utilisons pas le terme de 2ème langue pour désigner le français. D'une part parce que l'enfant commence à acquérir le français bien avant d'avoir fini de maîtriser la LSF. D'autre part parce que notre ambition est que sa maîtrise du français soit bien supérieure à celle des 2èmes langues -langues étrangères- chez les jeunes entendants.

Viser le bilinguisme chez le jeune sourd n'implique donc pas qu'on « communique » avec lui dans les deux langues, mais qu'on utilise ces deux langues à bon escient.

La langue française, écrite ou parlée, étant naturellement beaucoup plus présente dans l'environnement du jeune sourd que la langue des signes (la plupart des enfants sourds vivent dans des familles entendantes), une action volontariste de la famille sera nécessaire pour assurer des conditions naturelles d'acquisition de la LSF.

Cela suppose :

b- Intégration

L'éducation vise à amener ces jeunes sourds à être des citoyens à part entière, autonomes, responsables, bien intégrés dans la société. D'autre part la vie du sourd ne commence pas à 20 ans et il n'est pas question de sacrifier sa vie sociale de jeune sourd sous des prétextes scolaires ou rééducatifs.

Le sourd adulte vivra dans un monde majoritairement entendant, dans lequel il se constituera des réseaux de relations privilégiées, avec les membres de la communauté sourde, sa famille, un cercle d'amis, etc… L'éducation visera donc à éviter les deux ghettos qui consisteraient à l'isoler des entendants ou à l'isoler des sourds. Cependant, comme pour l'acquisition de la langue des signes, les sourds étant très minoritaires, il faudra une action volontariste pour que l'enfant soit mis en contact assez fréquent avec d'autres sourds de différents âges, enfants ou adultes (identité), et dans des lieux de vie de la langue des signes (développement de la langue, socialisation). Ce rôle est actuellement rempli par le tissu associatif et dans certains internats. Il doit être encouragé et subventionné : subvention (CAF,…) aux associations qui gèrent des lieux de vie, attribution de l'AES à taux élevé pour la participation à des stages, colonies ou centres aérés accueillant des groupes de jeunes sourds, développement de l'accueil de groupes d'enfants sourds dans les crèches ou haltes-garderies, avec éducateur formé, constitution de réelles classes comportant au moins une dizaine d'enfants sourds, de départements sourds dans les collèges ou lycées ordinaires. Nous insistons sur cet aspect "communautaire" de l'éducation bilingue, qui la démarque complètement d'une vision technique où la langue des signes est réduite à un simple outil de communication dans la classe.
Il n'y a pas de proposition dans le rapport Gillot sur ce point et nous demandons son ajout.

Dans le cas d'une option oraliste, on introduit l'enfant à l'oral par l'accès à l'oral (prothèses) et par la formation à sa pratique (rééducation orthophonique, cours de LPC aux parents) (propositions 3 et 6 à 8, 10 à 12).

Dans le cas de l'option bilingue, on doit introduire l'enfant à la langue des signes par l'accès et la pratique de cette langue (lieux de rencontres avec d'autres locuteurs de la LSF, formation des parents à la LSF) (proposition 3 et x à ajouter).

Nous demandons enfin que la proposition de reconnaissance du droit d'usage soit complétée en indiquant que ce droit droit d'usage doit être respecté à toutes les étapes de la vie des personnes sourdes, y compris dans l'éducation et dans la scolarité (proposition 13).

Une dernière remarque concerne les familles dont les parents sont également sourds. Il ne faudrait pas que les difficultés de formation qu'ils ont généralement rencontrées, notamment en français, pénalisent aussi leurs enfants sourds. Pour que l'enfant devienne bilingue, ses parents doivent l'être eux-mêmes. Les parents sourds devraient donc bénéficier d'une mise à niveau en français si nécessaire, analogue aux cours de FLE (français langue étrangères) destinés aux immigrés (complément de la proposition 3).

3. La demande des parents au système scolaire

Le rôle des parents n'est pas de définir le contenu pédagogique de la scolarité bilingue. Notre rôle est de faire respecter le droit des enfants sourds à bénéficier d'une scolarité de qualité, dans toutes ses composantes (éducative, culturelle et sociale) et notre droit de parents de mettre en œuvre une éducation bilingue et biculturelle.

Sur le plan scolaire, nous parlons de bilinguisme lorsque les actions d'enseignement se font en langue des signes; c'est donc la langue de communication dans la classe. Il y a bilinguisme parce que le français est également présent en permanence, pour d'autres usages : dans les documents, au tableau, pour la prise de note, dans les synthèses et les résumés de cours, pour les devoirs, les activités d'expression écrite et pour une bonne partie des évaluations. Les deux langues sont également étudiées pour elles-mêmes : ce sont deux matières du programme.

Concernant l'intégration, nous pensons que l'intégration scolaire individuelle ne favorise pas l'intégration sociale. Nous préconisons donc l'intégration collective de classes d'élèves sourds (garantissant des échanges en langue des signes) dans des établissements ordinaires (pour assurer l'intégration sociale).

Pour jouer notre rôle, nous intervenons à deux niveaux :

4. L'organisation scolaire

Le respect de ces objectifs entraîne automatiquement certaines dispositions :

Pour le reste, c'est-à-dire pour la mise en œuvre au quotidien, il s'agit de méthodes pédagogiques et de moyens, qui relèvent de professionnels.

Il faut donc que les structures qui prennent en charge nos enfants aient :

de mettre en œuvre ces méthodes pédagogiques.

5. Expérimentation de la scolarité bilingue

Les principes et l'organisation que nous venons de décrire ont été expérimentés depuis une quinzaine d'année par quelques structures bilingues. Les propositions que nous faisons s'appuient sur leur bilan et sur les enseignement que l'on peut retirer de cette période.

Puisque ces expériences n'ont pas été rapportées dans le rapport GILLOT, nous en donnons une brève description.

a- Création et fonctionnement

En 1984 et 85, à l'initiative de l'association 2LPE « Deux Langues Pour une Éducation », quelques services bilingues étaient créés dans 6 villes en France. Deux devaient disparaître après quelques années et un évoluer vers une forme plus classique. A notre connaissance, seuls les 3 services suivant ont mis en pratique une scolarité bilingue cohérente sur cette période de 15 ans :

Plus récemment, des établissements ont tenté d'introduire des filières bilingues à côté de filières oralistes traditionnelles (INJS St Jacques, Dijon, …).

Ces 3 services ont été créés sur les principes décrits ci-dessus, en commençant par le niveau maternelle-CP du primaire et en ouvrant une nouvelle classe chaque année au fur et à mesure que les enfants progressaient, et donc des niveaux collèges en 1990-91 et lycée en 95, jusqu'à l'ouverture d'une terminale en 97-98. Cependant chaque service n'a pas pu ouvrir tous les niveaux, notamment en lycée.

Dans la pratique, les réalités du terrain, les contraintes administratives, les partenariats qui ont pu être établis, les personnels enseignants qui ont pu être recrutés ont souvent obligé à déroger à ces principes. On peut donc constater un décalage entre leurs fonctionnements réels et les objectifs initiaux, ainsi qu'entre les services de Poitiers, de Torcy et de Toulouse eux-mêmes. Cette situation ne résulte pas d'un choix des associations gestionnaires. Elle est la conséquence des situations locales peu favorables au moment de leur création et de la contrainte que continue de faire peser sur ces structures leur double tutelle.

Par manque d'enseignants sourds et de statut clair, ces services ont du faire des « expérimentations forcées » : appel à des enseignants entendants maîtrisant insuffisamment la LS, appel à des enseignants sourds complétant leur formation en même temps qu'ils prenaient en charge des élèves, regroupement de niveaux pour constituer des effectifs plus riches, situations d'intégration avec interprète, etc…, en plus de l'innovation pédagogique d'un enseignement bilingue. Ces expériences ont sans doute conduit à des situations pédagogiques défavorables et ont pénalisé les élèves sur le plan scolaire. Elles ont obligé les services et les élèves à s'adapter à la réalité de la cohabitation sourds-entendants, encore défavorable aux sourds. Ces structures bilingues peuvent faire une analyse pertinente de ces situations et sont les mieux placées pour indiquer aux Pouvoirs Publics les conditions d'une réelle intégration et les critères de réussite scolaire.

Actuellement elles concernent plus d'une centaine d'élèves. En primaire il s'agit de classe d'élèves sourds assurées par des enseignants bilingues, sourds ou entendants. En collège, certains cours font déjà appel à des interprètes. En lycée, les élèves sont intégrés et suivis par le service. Il n'y a qu'à Toulouse qu'une filière complète a pu être ouverte en lycée, grâce à l'EN.

b- Situation administrative et Financement

Les 3 services ont un agrément DDASS au titre de SSEFIS et, suivant les cas au titre de SAFEP, de SES ou de SEGPA. Ils sont donc financés sous la forme d'un prix de journée, dont le montant varie suivant les régions. Bien que fonctionnant comme des établissements (en terme d'autonomie et de prestations), leur financement ressemble davantage à celui de simples services et il est très insuffisant par rapport aux besoins et par rapport aux prestations assurées. De ce fait le financement de 2 des services doit être complété par le reversement, par les familles, de l'AES qu'elles touchent pour leur enfant (dans le cas de Toulouse, ce reversement est même indiqué explicitement dans la convention entre IRIS et la CRAM !). Cette situation, complètement injustifiable et discriminatoire, est source de conflits avec les parents et empêchent certaines familles d'inscrire leurs enfants.

Les services ont signé des conventions avec l'Éducation Nationale, les classes étant accueillies dans des établissements ordinaires. Dans 2 cas, l'Éducation Nationale participe également au projet en intégrant des groupes d'enfants sourds dans les classes d'élèves entendants, avec un interprète. Dans le cas de Toulouse, les classes de collège et de lycée peuvent être considérées depuis 1998 comme des classes ordinaires de l'Éducation Nationale, faisant appel au partenariat d'IRIS (sans convention au lycée !), puisque les enseignants qui étaient à IRIS sont maintenant financés par le Rectorat (Maître Auxiliaires ou contractuels) pour intervenir auprès des élèves sourds.

Le fonctionnement de ces services est régi par l'Annexe 24 quater alors qu'ils ne peuvent pas réellement en remplir les conditions, car :

L'annexe 24 quater a eu le mérite de définir une prise en charge spécifique pour les sourds. Mais elle a été publiée en 1988 donc 3 ans avant que le droit de choisir l'éducation bilingue soit reconnu. Elle doit donc être complétée par un additif définissant les prestations d'un service dans le cas d'une option bilingue.

Les services sont pénalisés par l'existence, en France, d'une double tutelle, Affaires Sociales et Éducation Nationale, alors que par ailleurs ils cherchent à donner un rôle prioritaire à l'Éducation Nationale (primauté de l'éducatif et du scolaire sur le médical et le rééducatif). Cela entraîne plusieurs difficultés concernant :

c- Cursus

Comme on l'a signalé, les niveaux assurés couvrent rarement l'ensemble du cursus scolaire classique, ce qui détourne les familles de ce choix pédagogique. Quelques sections professionnelles sont proposées (par exemple un BEP sanitaire et social à Poitiers). A Toulouse, grâce à l'engagement particulier de l'Éducation Nationale, la même organisation scolaire (classe en LSF) est assurée de la maternelle à la terminale. Cependant même là, les filières courtes, professionnelles (CAP, BEP) ou techniques (premières et terminales technologiques) ne sont pas assurées. Partout donc, des élèves ont été obligés de se réorienter vers un enseignement en intégration, donc le plus souvent oraliste, après plusieurs années d'enseignement en LSF.

d- Bilan des élèves

Malgré ces difficultés de fonctionnement, les résultats sont très satisfaisants sur le plan du comportement des enfants, de leur socialisation, de leur identité.

Sur le plan scolaire le bilan est plus diversifié. Certains élèves profitent bien de cette approche éducative. Ils obtiennent ces bons résultats sans surcharge de travail, sans surinvestissement familial et sans isolement de leurs camarades. C'est donc une réelle validation de cette approche.

D'autres élèves sont encore en situation difficile, mais il est délicat de déterminer les causes réelles de leurs problèmes.

Il faut signaler en particulier que les conditions de recrutement de ces élèves constituent un handicap initial :

Les difficultés concernant le plus souvent la maîtrise du français, un travail de fond a été entrepris par les 3 services avec l'AFL (Association Française pour la Lecture).

e- Bilan des enseignants et des parents

En 15 ans, la situation administrative des enseignants sourds n'a pas évolué (reconnaissance, statut, salaires). On sent donc une amertume et une démotivation certaines. Ceci est accentué par le fait qu'ils n'ont toujours pas de classe « normale », formées d'élèves en nombre suffisant et ayant un niveau de langue et de connaissances correct. Ils travaillent donc dans des conditions difficiles, sans formation particulière et sans support pédagogique, tout en ressentant une forte pression, car ils n'ont pas le droit à l'erreur : la validation du projet bilingue dépend de leurs résultats. Il est urgent de remédier à cette situation.

Lorsque les résultats scolaires sont insuffisants, les parents sont naturellement amenés à mettre en cause soit cette approche pédagogique qui ne reçoit pas le soutien explicite de l'EN soit les enseignants, non titulaires ou pas assez diplômés.

Tout ceci crée une ambiance qui serait démotivante si l'épanouissement évident des jeunes sourds ne venait compenser ces difficultés.

Il faut rappeler qu'un rapport de l'Inspection Général (M. SOUBRÉ) a noté le caractère positif de ces classes et a préconisé qu'elles soient développées et soutenues. Des inspections plus ponctuelles (IPR, IDEN-AIS) ont signalé l'intérêt de la pédagogie pratiquée; des inspections des DAS à l'occasion des renouvellements d'agrément ont noté le bien-être des enfants, montrant qu'ils bénéficiaient visiblement de la prise en charge proposée.

6- Normalisation - Intégration dans le dispositif réglementaire ordinaire

Ces services ont encore un statut et un fonctionnement hors norme, en particulier avec l'Éducation Nationale. Ceci est du à des raisons conjoncturelles et à des raisons de fond, spécifiques au projet.

a- Raisons conjoncturelles

Dans la situation actuelle, ces classes ne peuvent pas être « normales », pour plusieurs raisons :

b- Raisons spécifiques

Si toutes les raisons précédentes peuvent disparaître à terme, il ne faut cependant pas imaginer que les classes d'enseignement en LS vont pouvoir évoluer pour se conformer exactement à la situation des classes ordinaires. Elles garderont une spécificité, par leur nature même :

7- Propositions

a- Dispositions dérogatoires pendant une période transitoire

Pour prendre en compte les problèmes conjoncturels, il est nécessaire d'accepter une situation dérogatoire dont le caractère exceptionnel doit être bien délimité,

Il faut aussi organiser et même favoriser un partenariat actif et conventionné :

Dans quelques régions, des structures associatives possèdent déjà plusieurs de ces compétences. D'autres cherchent à se développer.

Les DDASS doivent recevoir des directives pour autoriser leurs agréments et leur assurer un financement suffisant.

Les Rectorats doivent recevoir des directives pour signer des conventions avec ces services et établir un réel partenariat.

Un autre partenariat doit être entrepris avec les associations porteuses de ce projet bilingue, parents et communauté sourde. Les parents doivent pouvoir intervenir, non seulement comme parents d'élèves, mais comme partenaires associés à la définition du projet bilingue dans son ensemble et à son évaluation. Ce n'est qu'à l'issue de cette période transitoire que leur rôle dans l'école pourra redevenir celui de simples parents.

Cette situation dérogatoire aurait du être prévue, pour une durée transitoire, par le décret d'application de la loi Fabius (octobre 92) ou par la circulaire d'application. Cela se fait chaque fois qu'une loi crée de nouveaux droits qui ne peuvent pas être mis en œuvre immédiatement dans le cadre ordinaire, ou chaque fois que l'instauration d'un nouveau métier vient remplacer une pratique non réglementée. C'est une grosse lacune de ce décret. Elle est la source d'une grande part des difficultés actuelles.

Les dérogations nécessaires concernent les points signalés au paragraphe 6-a. Elles portent donc sur :

Elles doivent viser un double but :

b- Intégration de l'enseignement en LS dans le dispositif ordinaire

Plutôt que de vouloir intégrer des jeunes sourds, ce que nous demandons au dispositif scolaire ordinaire, c'est d'intégrer l'enseignement en LSF, dans toutes ses dimensions (élèves, langue, pédagogie et enseignants).

Au delà de difficultés conjoncturelles, c'est l'absence de volonté politique de mettre en œuvre la loi Fabius de 1991 qui pose problème. L'éducation bilingue ne pourra réellement être proposée que si 3 actions sont entreprises :

Ce n'est qu'à ces conditions que l'intégration collective pourra être développée comme le recommande la mesure n° 10 du CNCPH, que le devoir d'accueil préconisé par le texte d'orientation du CNCPH sera respecté, que les concertations et plans pluriannuels (proposition 89) n'excluront pas l'option bilingue et que pourra s'appliquer l'article 5 du décret d'application de la loi Fabius :« Les autorités habilitées à délivrer les autorisations d'extension ou de création d'établissements … et les autorités responsables de la mise en place des classes … procèdent au niveau régional à l'inventaire des besoins et des moyens et coordonnent leurs projets en vue de permettre, au même niveau, l'exercice du libre choix du mode de communication ».

Ce n'est que si elle fait partie du dispositif ordinaire que l'intégration sera réussie. Parce que des actions pourront aussi être organisées pour les élèves entendants (atelier de LS, choix de la LS comme LV2), pour leurs enseignants (exploitation du caractère transférable des innovations réalisées dans les classes pour sourds) et pour le bon fonctionnement administratif (présence régulière d'interprète dans les réunions, dans les conseils de classes).

C'est donc une démarche globale et cohérente que nous demandons pour l'accueil de nos enfants dans le système éducatif, dans le respect de nos choix éducatifs.

 

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