Saturday, July 15, 2006

Actualité jurisprudentielle de l'affacturage

- Concours du factor avec d’autres créanciers de l’adhérent (sous-traitants)

En l’absence d’agrément du sous-traité par le maître de l’ouvrage, le sous-traitant ne peut valablement poursuivre ce dernier en paiement des travaux sous-traités, dès lors qu’il dispose d’une action en restitution à l’encontre de la société d’affacturage, par suite de l’inopposabilité à son égard de la cession consentie par l’entrepreneur principal au bénéfice du factor.C’est la solution retenue par la Chambre commerciale dans son arrêt du 10 mai 2006 (pourvoi n°04-15.546).

La société X avait remis, avant sa mise en redressement judiciaire, des créances à une société d’affacturage, qu’elle détenait sur la société Y, au titre de travaux qu’elle avait partiellement sous-traité à la société Z.Cette dernière n’ayant pas été payée de ses prestations a exercé l’action directe, prévue par l’article 12 de la loi du 31 décembre 1975, contre la société X, en sa qualité de maître de l’ouvrage, qui avait précédemment réglé au factor la somme litigieuse, en sollicitant la condamnation du maître de l’ouvrage à la payer la somme lui restant due, et qu’il soit également ordonné au factor de restituer cette somme au maître de l’ouvrage.

La Cour d’appel avait fait droit à cette demande, après avoir constaté que le maître de l’ouvrage avait réglé à tort la société d’affacturage, la cession opérée en sa faveur étant inopposable au sous-traitant. Au visa des articles 11 et suivants de la loi de 1975, la Chambre commerciale a censuré cette décision, en considérant que le maître de l’ouvrage s’était valablement acquitté entre les mains de celui qui s’était présenté comme cessionnaire (la société d’affacturage), en l’absence d’agrément du sous-traitant, et que ce dernier disposait d’une action en restitution à l’encontre du factor, par suite de l’inopposabilité à son égard de la cession litigieuse intervenue pour les sommes reçues de cette dernière.

Cette décision est conforme à la jurisprudence de la Chambre commerciale qui estime que, conformément aux dispositions de l’article 13-1 de la loi du 31 décembre 1975, la société d’affacturage ne peut opposer au sous-traitant aucun droit sur les sommes dues par l’entrepreneur principal au titre des travaux sous-traités (Com. 5 février 1991, Bull. civ. IV n°53). Le sous-traitant est alors recevable à poursuivre directement le factor en restitution des sommes réglées par le maître de l’ouvrage.

Elle doit être également approuvée, en ce que le paiement effectué par le maître de l’ouvrage au bénéfice du factor doit être considéré comme libératoire à son égard, en l’absence d’agrément du sous-traité.

- Connaissance de la convention d’affacturage par le débiteur cédé.

Par un arrêt en date du 14 mars 2006 (pourvoi n°04-17.594), la Chambre commerciale a confirmé sa jurisprudence sur l’opposabilité de la subrogation conventionnelle au débiteur cédé, dès lors que ce dernier a été informé de l’existence de la convention d’affacturage.

Dans cette espèce, une société X avait souscrit un contrat d’affacturage auprès d’un établissement financier, et avait délivré une quittance subrogative générale. Dans le cadre du contrat, elle avait remis au factor , par bordereau récapitulatif, neuf factures émise à l’encontre de la Société Y, qui ont été inscrites au crédit du compte courant de l’adhérent.

Après avoir vainement tenté de recouvrer les factures auprès du débiteur, qui avait procédé à un règlement direct entre les mains de l’adhérent, le factor l’a assigné en paiement, et a obtenu sa condamnation au paiement du montant des factures transférées.Pour contester la décision l’ayant condamné, la société X faisait valoir que les paiements qu’elle avait effectués directement auprès de la société Y étaient à son égard libératoires, dans la mesure où elle n’avait pas été informée antérieurement de la subrogation.

Pour rejeter le pourvoi, la Chambre commerciale a relevé que l’arrêt avait constaté que les factures produites par le factor portaient toutes la mention de subrogation, et que celles produites par la société Y en étaient la réplique exacte, hormis cette mention, « due à une amputation de la partie basse des documents, qui ne peut être que le fait de la société Y ».

La Chambre commerciale a relevé également qu’en réponse à la lettre que lui avait adressé le factor lui réclamant pour la première fois le paiement des factures litigieuses, la société Y avait fait état uniquement de ce que les factures auraient été déjà été réglées directement à la société X, et ne faisait nullement état du fait qu’elle n’avait pas été informée du contrat d’affacturage.

Cette décision confirme la jurisprudence constante de la chambre commerciale, sur la notification du contrat d’affacturage au débiteur cédé par inscription de la mention de subrogation dans le corps des factures transférées.

Il sera rappelé que dans le cadre d’un contrat d’affacturage, les créances de l’adhérent sur ses clients sont transmises en propriété au factor par le seul effet de la subrogation. Cette subrogation intervenue au bénéfice du factor subrogé est opposable aux tiers sans autres formalités (Lamy financement, Fascicule Affacturage n°2882). Il est d’autre part constant que le transfert des créances cédées au bénéfice du factor est opposable au débiteur à la date du paiement subrogatoire et non à celle où il a été informé de l’existence de la subrogation (Com. 3 avril 1990. n°89-10.255, RTD Com 1990, p.444, obs. Cabrillac et Teyssié).

La notification de la subrogation au débiteur cédé n’a pas d’autre fonction que déterminer le caractère libératoire du paiement effectué par le débiteur soit au bénéfice du créancier subrogeant, soit au bénéfice du factor subrogé. Les paiements effectués entre les mains du créancier subrogeant ne sont donc pas libératoires, dès lors que le débiteur cédé a été informé de l’existence de la subrogation par l’insertion d’une mention relative à la subrogation dans le corps de la facture (Com. 14 octobre 1975, JCP 1976, éd G, II, n°18279, note Gavalda).

- Escroquerie par production de faux documents – Négligence du factor

« Aucune faute ne peut être reprochée à un factor ayant concouru à son propre préjudice dans le fait de n’avoir pas suffisamment vérifié l’authenticité de documents qui, revêtus de tous les signes habituels de leur authenticité, avaient l’apparence de vrais certificats de paiement »Telle est la solution retenue par la 5ème Chambre des appels correctionnels d’AIX-EN-PROVENCE, dans un arrêt en date du 16 novembre 2005 (jurisdata n°297-691).

Cette juridiction répressive avait à se prononcer sur l’appel interjeté par une personne prévenue d’avoir établi, en sa qualité d’ingénieur en chef d’une grande ville du sud de la France, de faux certificats pour paiement de prestations ne correspondant par à des travaux réellement effectués par une société dont le gérant était devenu un ami personnel, en apposant des timbres humides de la ville et sa signature, faux certificats destinés à être produits par cette société auprès d’une société d’affacturage.

Le fait de remettre à une société d’affacturage des factures non causées, avec de faux documents tendant à créer l’apparence de prestations réellement effectuées, est susceptible en effet d’être poursuivi sous la qualification de faux et usage de faux, et d’escroquerie.En l’espèce, l’appelant avait été retenu dans les liens de la prévention, pour faux et usage de faux, ainsi que pour complicité d’escroquerie.

Pour s’exonérer partiellement de sa responsabilité, le prévenu avait invoqué la propre faute de la société d’affacturage, qui se serait montrée négligente dans la vérification de l’authenticité des certificats pour paiement remis par son adhérent.La Cour d’appel n’a pas retenu cette responsabilité, et sa décision doit être approuvée.En effet, dans le cas d’espèce, les juges avaient relevé qu’une partie des factures remises par l’adhérent correspondaient à des travaux effectivement réalisés, et que les faux certificats présentaient tous les signes habituels de leur authenticité.

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