Ralliez-vous à mon panache bleu

mardi 30 août 2011

Real education : comment ramener l’Education Nationale à la réalité (1/5)



Real Education est un petit livre (220 pages) écrit par Charles Murray, le coauteur, avec Richard Herrnstein, du célèbre et controversé The Bell Curve.
Le sujet de Real Education est suffisamment indiqué par son sous-titre : « quatre vérités simples pour ramener les écoles américaines à la réalité ». Real Education est donc un livre consacré à l’état du système scolaire américain. Il serait erroné d’en déduire que ce livre ne présenterait aucun intérêt pour un lecteur français qui ne s’intéresserait pas aux Etats-Unis.
Chaque système éducatif a certes ses particularités, mais si l’on ôtait de cet ouvrage les termes spécifiques au système scolaire américain, un lecteur français aurait bien du mal à deviner que son auteur est né dans l’Iowa et que les écoles dont il parle sont situées outre-Atlantique.
C’est là en effet la première vertu de ce livre : nous faire prendre conscience que les maux dont souffre le système éducatif français ne sont pas propres à la France, ni même, sans doute, à la France et aux Etats-Unis, mais qu’ils affectent, avec quelque différences de degré, tous les pays occidentaux. Le gain que nous en retirons n’est pas de nous consoler par le malheur des autres, mais de percevoir plus clairement la vraie racine de la lente destruction de notre Education Nationale. Cette racine n’est pas l’ineptie - pourtant réelle - de la plupart de nos hommes politiques en matière scolaire. Elle n’est pas non plus la cogestion - pourtant délétère - du ministère avec les syndicats d’enseignants. Elle n’est pas davantage le « manque de moyens » ou bien un « complot libéral » visant à privatiser l’école pour étouffer le sens critique des individus (consommez ! je le veux) - vieilles lunes de ces mêmes syndicats. Cette racine - commune à toutes les démocraties libérales - est bien plutôt cette passion pour l’égalité dont Tocqueville disait qu’elle était, dans les âges démocratiques, « ardente, éternelle, invincible ».
Or, et c’est la seconde vertu de ce livre, Charles Murray va directement à la racine. Les « quatre vérités simples » qu’il met en avant ont toutes à voir avec cette question de l’égalité. Cela lui permet d’écrire un livre à la fois court et remarquablement limpide. Rarement des problèmes apparemment aussi complexes auront été traités avec tant de simplicité et de pertinence. Ce qui est à la fois la marque de fabrique de Charles Murray, et la récompense qui attend ceux qui ont le courage de ne pas se soucier du caractère impopulaire de certaines vérités.

***

Les chapitres de Real Education sont unifiés par le thème suivant : le système éducatif actuel (américain, mais cela pourrait être le nôtre) repose sur un mensonge. Ce mensonge est que tout enfant peut devenir ce qu’il souhaite, pourvu qu’il travaille pour cela. Le plus étonnant dans ce mensonge est que personne n’y croit vraiment. Personne ne dit explicitement que tout enfant peut, avec des efforts, réussir dans le domaine de son choix. Cela semblerait trop absurde. Et cependant, dès lors qu’il est question de l’école, tout le monde agit et parle comme si tout enfant pouvait y réussir.
Jamais un homme politique, jamais un responsable syndical, jamais un journaliste, jamais un enseignant ne dira publiquement que la raison pour laquelle certains enfants quittent « prématurément » le système scolaire est tout simplement qu’ils n’ont pas les capacités intellectuelles nécessaires pour satisfaire aux exigences de l’école.
Charles Murray appelle ce pieux mensonge - dont le caractère mensonger est plus évident que le caractère pieux - le romantisme éducatif.
La conséquence de ce mensonge est que nous avons des attentes irréalistes vis-à-vis des élèves, à tous les niveaux : nous exigeons trop des plus faibles, nous exigeons les mauvaises choses de la part des élèves ordinaires, et nous exigeons trop peu de la part des meilleurs.

Charles Murray commence donc par rappeler cette première « vérité simple », qui devrait être une évidence, mais qui a aujourd’hui besoin d’être sérieusement argumentée : les capacités varient suivant les individus.
Pour ce faire, il s’appuie sur la théorie des intelligences multiples de Howard Garner, non pas parce qu’il souscrirait à cette théorie - les lecteurs de The Bell Curve se souviendront au contraire des critiques qu’il lui adresse - mais parce qu’elle est celle qui est la plus agréable à nos sensibilités démocratiques et qui par conséquent prédispose le mieux les lecteurs à recevoir quelques vérités déplaisantes.
On peut distinguer sept grands types de capacités :
1) Corporelle - kinesthésique (la capacité à maitriser les mouvements de son corps)
2) Musicale (sens du rythme et de la mélodie)
3) Interpersonnelle (capacité à sentir et décoder les émotions et les motivations d’autrui)
4) Intrapersonnelle (capacité à se connaitre soi-même et à utiliser ce savoir efficacement)
5) Spatiale (capacité à visualiser et manipuler mentalement des objets)
6) Logico-mathématique (capacité à construire et à comprendre des chaînes de raisonnement complexes)
7) Linguistique (tout ce qui a trait à l’usage et à la compréhension des mots)
Le caractère agréable de cette théorie des intelligences multiples - et c’est ce qui explique sa popularité- est qu’elle semble réserver un petit quelque chose à chacun : sûrement, celui qui n’est pas bien doté dans l’une ou l’autre des sept capacités aura en compensation des dons au dessus de la moyenne dans celles qui restent. En matière scolaire, cette espérance devient : tout le monde est bon dans quelque chose, et un éducateur doué saura utiliser ce quelque chose pour compenser les déficits dans d’autres domaines.
Cette espérance est compréhensible, mais elle démentie par la réalité.
Tout d’abord chacune de ces sept capacités n’est pas également importante dès lors qu’il s’agit de préparer des enfants à leur vie d’adulte. Des capacités corporelles et musicales développées ne sont vraiment utiles que pour très peu de gens, la petite poignée d’individus qui pourront espérer gagner leur vie comme athlète ou comme musicien. En revanche les capacités inter et intra personnelles, logico-mathématiques, linguistiques, et spatiales sont hautement importantes pour chacun d’entre nous. Or ces cinq capacités, bien qu’analytiquement distinctes, ne sont en pratique pas vraiment séparables. Autrement dit, quelqu’un qui est en dessous de la moyenne dans l’une de ces capacités a toutes chances d’être également en dessous de la moyenne dans toutes les autres ; et inversement.
Trois de ces capacités - la spatiale, la logico-mathématique et la linguistique - sont même si fortement corrélées que, pour de larges populations, elles peuvent être considérées comme interchangeables. En fait ces trois capacités correspondent pratiquement à ce que mesurent les tests de QI. Et ces trois capacités sont aussi celles qui définissent le mieux le « potentiel scolaire » d’un élève, c’est à dire sa capacité à réussir à l’école puis ensuite à faire des études supérieures. Par ailleurs, les capacités inter et intra personnelles sont également corrélées avec les trois capacités qui forment  le potentiel académique, ou si l’on veut le QI, bien que plus faiblement.
En termes scolaires, cela signifie que l’enfant qui trouve toutes les réponses en mathématique a toutes chances d’être également au-dessus de la moyenne en expression orale et écrite, mais aussi qu’il est probablement au-dessus de la moyenne pour ce qui concerne la capacité à se concentrer, à se contrôler, et à travailler.
Bien entendu de nombreuses exceptions individuelles existent, mais un système scolaire ne peut pas être bâti autour des exceptions. Un système éducatif qui repose sur la réalité et non sur un pieux mensonge doit partir du fait que, pour chacune des capacités énumérées, les individus ont des potentiels très variables. Il doit aussi partir du fait que, quoique nous fassions, la moitié des enfants seront toujours en dessous de la moyenne, ce qui est la deuxième « vérité simple » exposée par Charles Murray.

Nous comprenons assez aisément ce que peut signifier en dessous de la moyenne pour ce qui concerne les capacités corporelles et musicales. Nous le comprenons aussi sans trop de difficulté pour ce qui concerne les capacités inter et intrapersonnelles. Soit nous sommes nous-mêmes en dessous de la moyenne pour l’une ou l’autre de ces capacités, soit nous connaissons directement des gens qui le sont.
En revanche, nous avons beaucoup plus de mal à nous représenter ce que signifie concrètement « en dessous de la moyenne » pour les trois capacités qui forment le cœur du potentiel scolaire. Ou, pour le dire en termes un peu moins consensuels, nous avons du mal à nous représenter ce que signifie avoir une intelligence en dessous de la moyenne.
Nous, c’est à dire les lecteurs du livre de Murray (aussi bien que de ce compte-rendu). Les personnes susceptibles de lire un ouvrage tel que Real Education - c’est à dire susceptibles à la fois de s’y intéresser et de le comprendre - ne forment en effet qu’une toute petite partie de la population totale, une petite partie caractérisée par le fait qu’elle se situe bien au dessus de la moyenne en termes de potentiel académique, ou si l’on veut en termes de QI.
Or il peut être démontré au delà de tout doute raisonnable que, au cours du 20ème siècle, les sociétés occidentales se sont peu à peu stratifiées du point de vue du QI. Les individus les plus intelligents ne sont plus répartis un peu au hasard parmi les différentes catégories sociales et les différents métiers, comme ils l’avaient été jusqu’alors, mais tendent à se concentrer toujours plus au sein de quelques professions et à s’isoler du reste de la population. De plus en plus, les individus les plus intelligents ne fréquentent que leurs semblables, en termes cognitifs. Un fait lourd de conséquences que Charles Murray a exposé dans The Bell Curve.
Pour ce qui concerne le système scolaire, cela signifie que ceux qui prennent les décisions et qui - en dépit parfois de certaines apparences - appartiennent toujours à l’élite cognitive, n’ont presque jamais eu de contact approfondi avec des individus dont les capacités scolaires étaient en dessous de la moyenne. Il n’ont par conséquent, sauf exception, qu’une très vague idée des limites de ce genre de personne.
Pour permettre à ses lecteurs de saisir le sens de l’expression « en dessous de la moyenne », Charles Murray donne un certain nombre d’exemples tirés du NAEP (National Assessment of Educational Progress), un ensemble de tests nationaux utilisé depuis 1971 par le ministère fédéral de l’éducation pour estimer le niveau des écoliers américains. Les exemples sont tirés d’un test destiné aux élèves de 8ème (13-14 ans). Il ne parait pas inutile d’en reproduire ici quelques-uns.

Premier exemple. Il y avait 90 salariés dans une entreprise l’année dernière. Cette année, le nombre de salariés a augmenté de 10%. Combien y a-t-il de salariés dans l’entreprise cette année ?

(A) 9 (B) 81 (C) 91 (D) 99 (E) 100

A l’entrée de ce qui est pour nous l’enseignement secondaire, 62% des élèves américains n’ont pas su répondre correctement à cette question. En fait, si l’on y ajoute ceux qui ont donné la bonne réponse par hasard, et non en faisant le calcul - ce qu’il est possible d’estimer facilement - on obtient un total de 77,5% d’écoliers ne connaissant pas la bonne réponse.

Deuxième exemple. Amanda veut peindre chacune des faces d’un cube de couleurs différentes. De combien de couleurs aura-t-elle besoin ?

(A) Trois (B) Quatre (C) Six (D) Huit

20% des écoliers n’ont pas choisit la bonne réponse et 27% ne connaissaient pas la bonne réponse.

Troisième exemple. Les écoliers doivent lire une publicité concernant les petites annonces dans un journal. Le titre de la publicité est « Trois jours gratuits. » En dessous « Offre spéciale. Vos objets ne doivent pas dépasser $25. » Un phrase de texte répète l’information contenue dans le titre et le sous-titre. Les élèves doivent répondre à la question  suivante : Si vous voulez placer une annonce gratuite, vos objets doivent

(A) Etre vendus dans les cinq jours
(B) Ne pas valoir plus de $25
(C) Etre en bon état
(D) Etre contrôlés par la direction du journal

34% des élèves n’ont pas choisi la bonne réponse, 45% ne connaissaient pas la bonne réponse.

Quatrième exemple. Les écoliers doivent lire le texte suivant relatif aux Anasazi, une vaste tribu indienne d’Amérique du Nord : « Les Anasazi faisaient de belles poteries, des bijoux en turquoise, des écharpes finement tressées, et des paniers capables de retenir l’eau. Ils vivaient de la chasse et de la culture du maïs et de la courge. Leur mode de vie s’est poursuivi de manière paisible pendant plusieurs centaines d’années. Soudain, aux alentours de l’an 1200, quelque chose d’étrange est arrivé, dont les raisons ne sont pas tout à fait éclaircies. » Puis ils doivent répondre à une question : l’auteur décrit la vie des Anasazi avant l’an 1200 comme

(A) Dangereuse et guerrière
(B) Occupée et passionnante
(C) Difficile et monotone
(D) Productive et paisible

51% des écoliers n’ont pas choisi la bonne réponse, 55% ne connaissaient pas la bonne réponse.

17 commentaires:

  1. Effectivement, dans l'école d'ingénieurs où j'enseignais une conne est devenue doyenne et elle a fait écrire dans le règlement, au sujet de l'appréciation de la moyenne (sur 6):
    - Moins de 4: insuffisant, plus de travail est nécessaire.
    - Moins de 3: médiocre, beaucoup plus de travail est nécessaire.

    RépondreSupprimer
  2. Aux Etats-Unis cela s'appelle grade inflation - en français : l'école des fans.
    Tout le monde il est bon.
    Et le pire c'est que même les professeurs qui voudraient noter à l'ancienne sont obligés de suivre, pour tout un tas de raisons. Charles Murray explique cela très bien.
    Ainsi même un conservateur intrépide comme Harvey Mansfield (voir l'un des ses articles sur ce blog) a finit par annoncer que désormais ses étudiants auraient deux notes : une note officielle, qui suivrait l'inflation générale, et une note officieuse, qu'il leur donnerait entre quatre yeux et qui reflèterait leur valeur réelle.
    Plus près de nous, à l'école primaire, ils ne donnent plus de notes mais des feux : feux vert, feux orange, feux rouge. Un bon moyen d'écraser les hiérarchies en ne distinguant plus les moyens, les bons et les très bons : tous feux vert.

    RépondreSupprimer
  3. Moi je trouve ça très bien:
    ça permet de faire un seul contrôle par trimestre.
    Et encore ! Quand on est professeur d'Histoire-Géo, (enfin dans le temps je veux dire, quand ça existait encore), on peut même se permettre de faire faire un dossier (par les parents, mais chut...). C'est plus vite corrigé (enfin évalué à vue de pif) et la note vaut ce qu'elle vaut, c'est-à-dire rien du tout. Mais on s'en fout, car elle est toujours bonne et le prof est un bon prof, qui obtient de bons résultats de ses élèves. Quand il est malin, il fait une progression des notes sur les 3 trimestres, il n'en est que meilleur professeur et les parents sont contents, ils ont amélioré leur prestation. Le prof aura de la promotion au mérite. Et roulez jeunesse...
    Quand la note avait de la valeur, le professeur avait à coeur de bosser, de faire plein de contrôles, par souci de justice et pour que chacun puisse compenser une sale note. Dorénavant, cela n'a plus d'importance, comme vous l'aurez compris.
    Et que l'on ne me dise pas que j'exagère ! C'est la pure vérité.

    RépondreSupprimer
  4. Non Carine, vous n'exagérez pas, je le sais.
    A court terme cela peut sembler plus confortable, mais à long terme c'est extrêmement décourageant pour ceux qui auraient vraiment envie d'enseigner, et pas juste de faire garderie.
    Donc ils iront voir ailleurs.

    RépondreSupprimer
  5. Le calendrier est l'occasion de souhaiter longue vie à ce blog pertinent et bien nécessaire.
    Bravo à l'auteur, même s'il ne s'appelle pas Aristide.

    RépondreSupprimer
  6. Merci Pakounta. J'ignorais même qu'il existait une saint Aristide.
    Au fait, quand tombe la saint Pakounta?

    RépondreSupprimer
  7. bonjour Aristide,
    bravo pour votre blog que je decouvre, et qui ne manque pas de m'interesser.

    Il y a une chose que j'aimerais souligner dans tout ces problemes d'education nationale, c'est le fait que les problemes proviennent finalement davantage des recteurs ou directeurs d'ecole, et par la des professeurs.
    Pour ma part, je fais l'experience du CNED (c'est-a-dire l'educ.nat. par correspondance) avec mes enfants, et je dois dire que j'ai ete tres heureusement surprise. Rien à voir avec tout ce que vous dites: le niveau est excellent, les cours en general bien fait (meme si je trouverai des petites choses a redire, mais auxquelles je peux palier par moi-meme), et une dose de culture bien adaptée à l'enfant qui est littéralement poussé pour apprendre mieux, plus, sans abus non plus.
    Les profs sont sévères, exigeants et encourageants et n'hésitent pas à donner les notes qu'il faut. Ils s'impliquent enormément dans la correction pour qu'elle soit la plus précise possible.
    Comparé a des ecoles ou colleges qui me rendaient folle par le temps perdu, l'ineptie des sujets, le peu de culture generale, je dois dire qu'enfin je respire.

    RépondreSupprimer
  8. Bonjour Sonia,

    Je ne connais pas vraiment le CNED et votre témoignage est bien intéressant.
    Je suppose qu'une partie des différences que vous relevez peut s'expliquer par le fait que le public du CNED doit être passablement différent du public moyen de l'enseignement classique.
    A priori (au doigt mouillé) je dirais : des parents fortement motivés, qui suivent attentivement leurs enfants et une forte proportion de CSP+. Bref des élèves à qui on peut demander bien plus qu'à l'écolier moyen.
    Sans compter que les profs n'ont pas à passer la moitié de leur temps à faire de la discipline ni à craindre d'être agressés à la sortie, et d'une manière générale qu'ils n'ont qu'à se concentrer sur la progression de leurs élèves. Ca change beaucoup de choses.

    Je pense d'ailleurs qu'une partie de la solution à nos problèmes pourrait venir du développement d'une forme de home schooling, et en tout cas de la diversification de l'offre scolaire.

    RépondreSupprimer
  9. Pas forcement des enfants plus intelligents que les autres, car le cned fait enormement appel aux enfants en difficultes scolaires. Ils peuvent ainsi avancer a leur rythme et ne pas se trouver sans cesse depasser dans un retard irratrappable.
    Par ailleurs, meme si le nombre d'eleves est un probleme, je pense que c'est un pretexte, car autrefois, ils n'etaient pas moins dans une classe et on entendait les mouches voler.
    Ce que je voulais soulever, surtout, c'etait la responsabilité des professeurs. En effet, le choix des textes en français et en langue notamment, est libre; du coup, vous avez du maurice careme a la pelle, quand au cned on vous donne du de la Fontaine; des textes tirés de la tele, des derniers trucs a la mode, quand au cned on vous donne un texte de Giono a étudier en ce2.
    Au college, ils ont au moins 3 oeuvres completes a lire et etudier dans l'annee plus de nombreux textes de grands auteurs, etc...
    Sans compter, l'etude reelle des langues des le ce1 (2 heures par semaine avec cd), de nombreuses chansons poetiques, humoristiques, gaies, avec une melodie souvent tiree de grands compositeurs, l'etude dès le CE1 de grandes oeuvres artistiques, telle la vierge au rocher de L. de Vinci, avec des questions pertinentes et adaptees mais intelligentes...bref, vous comprendrez que le probleme ne vient pas forcement d'où l'on pense.
    Et je suis tout-a-fait d'accord avec vous que l'ecole a la maison est une bonne solution, mais encore faut-il en avoir le courage! aller demander a des meres de famille de renoncer a leur carriere pour enseigner leurs enfants...car, meme avec des cours tout fait, c'est une ascese!
    Cette diversification que vous souhaitez existe bel et bien, a chacun de s'en servir.

    RépondreSupprimer
  10. Je suis complètement d'accord sur le fond avec ce que dit Sonia, sauf un détail qui compte:
    La maman à la maison (ou le papa si la maman a un meilleur salaire), bref un des deux parents à la maison, qui s'occupe de la scolarité des enfants, avec le sacrifice d'un des deux salaires, est un luxe que bien peu peuvent s'offrir. Enfin, parmi les gens commvouzémoi qui ne profitent pas d'un système d'allocations familiales pour 15 enfants issus de 4 femmes.

    La décision de prendre un congé parental pour les trois premières années de son nouveau-né est déjà tout un problème. Peu de parents peuvent se le permettre. Certains le font, tous calculs faits, compte-tenu du tarif d'une nounou et aussi du fait qu'ils ne veulent peut-être pas d'une nounou trop différente d'eux-mêmes (eh oui, c'est raciste et nauséabond, mais je me mets à leur place, parce que moi, bien sûr, j'aurais adoré avoir une nounou malienne ou guinéenne pour mes enfants…).

    Le congé parental est un choix pas facile à faire lors d'une naissance. Tout incite à faire des "anticipations" en prévision des dures années qui viennent, alors que les couples se séparent à la moindre anicroche, que la sécurité dans la vie quotidienne exige que l'on se planque dans des quartiers de plus en plus chers, alors l'abandon total d'un deuxième salaire est un luxe enviable. Il faut cotiser partout, on est ponctionné partout et faut bien payer ses PV.
    On ne peut plus faire 100 kms en voiture sans être ponctionné de 90 euros. Faut pouvoir les sortir ! Cet été, lors d' un voyage à Paris, j'accompagne quelqu'un qui va prendre l'avion à Orly. Je me retrouve à Bamako et l'homme (visiblement pas antillais) que j'interroge est incapable de me dire où je dois aller pour faire une dépose minute (Orly sud). Il ne sait que souffler dans son sifflet tout neuf. Je m'arrête donc n'importe où pour faire sortir le voyageur et ses bagages (5 secondes) et j'écope de 90 euros et probablement 2 points de permis (le flic qui tapote sur son appareil genre tel portable: "je l'ai eue, celle-là !" ). Puis je me rends au parking où bien sûr, je vais payer aussi le prix fort…

    Donc, faut deux salaires, sauf quand on vit avec un homme ou une femme politique. Tout le monde ne peut pas vivre avec un député européen… Moi j'en ai pas trouvé.

    Ou alors, il ne faut plus de voiture, plus de connexion internet, plus de téléphone, plus d'électricité, plus de chauffage. Juste quelques timbres pour le CNED.

    RépondreSupprimer
  11. Le home-schooling est effectivement une ascèse, comme le dit Sonia, lorsqu'il s'agit d'un parent (habituellement la mère) qui se charge de faire classe à ses enfants. Très peu de gens ont la motivation et les moyens intellectuels et financiers de le faire. Carine a tout à fait raison.
    Par ailleurs se pose le problème de l'isolement des enfants, qui n'est pas négligeable.
    Ces problèmes peuvent être partiellement allégés si plusieurs familles peuvent s'organiser pour assurer ensemble le home-schooling de leurs enfants.
    Il serait aussi possible d'organiser des cours en ligne, ce qui allège la tâche pour les parents.
    On peut également imaginer l'organisation de mini-écoles, plusieurs familles qui se cotisent pour salarier un enseignant, plus la ressource de l'enseignement à distance, etc.
    Bref, il y aurait des pistes à creuser. Mais à au moins deux conditions : d'une part que les pouvoirs publics facilitent la tâche de ceux qui voudraient s'organiser ainsi. D'autre part que cela soit plus aisé financièrement, c'est à dire que les pouvoirs publics restituent aux particuliers qui voudraient s'organiser ainsi une partie de leurs impôts.
    Mais le home-schooling lui-même n'est pas une panacée, cela conviendrait à certaines familles et pas à d'autres, etc.
    Bref le point essentiel est de ne plus essayer de faire rentrer tout le monde dans le même moule mais de laisser l'offre scolaire se diversifier bien plus qu'aujourd'hui.
    Evidemment en France c'est beaucoup demander.
    Une dernière chose : le nombre d'élèves par classe est effectivement un faux problème. A ma connaissance aucune étude n'a jamais démontré que sur le long terme les résultats scolaires étaient corrélés avec le nombre d'élèves.
    En revanche essayer de baisser le nombre d'élèves par classe, comme on le fait depuis des décennies, coûte extrêmement cher. Cette politique ne sert qu'à cacher les véritables problèmes de capacités et de discipline.
    Il y a de bien meilleures manières de dépenser notre argent.

    RépondreSupprimer
  12. je vois que le debat s'oriente vers l'ecole a la maison (escusez-moi, Aristide, j'ai un petit snobisme consistant a éviter tout anglicisme inutile...), tandis que mon premier elan etait qu'il ne fallait pas forcement condamner l'education nationale (meme si on peut quand meme le faire dans certains domaines, comme l'histoire du "gender", la methode globale etc...), mais surtout les profs et meme dans certaines mesures les parents demissionnaires.
    A la suite de l'etude d'un texte totalement idiot et meme nocif de ma fille en 6eme, je suis allée voir la prof de français, qui d'abord tout sourire devint verte de rage devant mes reflexions, abasourdie que des parents puissent remettre en cause sa pedagogie, quand habituellement ils ne s'occupent que des notes de leurs marmots!
    Mis a part cela, loin de moi, Carine, de proposer le cned comme la meilleure solution et celle que tout le monde doit envisager. Toutefois, vous touchez un sujet qui ne me laisse pas indifferente: les problemes financiers. Je vous rassure, je n'ai pas epouse un depute europeen, nous ne gagnons pas des millions, mais avons pris le taureau par les cornes pour mettre nos idees en adequation avec notre vie.
    Pour faire bref, choisir l'ecole a la maison est une question ideologique ou meme philosophique. Cela rentre pour nous dans un schema de decroissance, de lutte contre le monde moderne, d'education chretienne. Pour cela, nous avons change de metier (du moins mon mari, le mien servant a le seconder dans son entreprise qu'il a montée), demenagé (quitter Paris, pour la campagne) et travaillé de nos mains pour nous constituer un patrimoine foncier sans l'aide des banques, donc avons exclu totalement de nos rendez-vous celui du banquier! juste pour le compte courant.
    Pour repondre a Aristide,
    l'isolement des enfants est un probleme en cas de petite famille. Pour ma part, mes enfants evoluent au sein d'une fratrie de 8 (4/4) et ne peuvent donc s'ennuyer. Parallelement a leurs cours, la raison aussi du cned, ils ont des cours de musique au conservatoire, ce qui leur permet d'avoir un contact avec d'autres enfants dans un milieu autrement plus eduqué que l'ecole. Ils pratiquent aussi tous un sport en club. Vous voyez que ce probleme n'en est plus un, et c'est meme un probleme de mauvaise socialisation d'evacué.
    Par contre, ce qui me parait etre une solution geniale, mais qui existe fort peu, c'est la reunion de plusieurs familles. Vous pensez si j'ai essayé dans ce sens! mais c'est tres difficile quand vous n'habitez pas en ville et aussi de trouver des gens en tout point d'accord avec vous. Pour tout vous dire, j'ai vecu tout mon primaire dans une ecole de ce style: un vrai bonheur, mais l'ecole a tenu 6-7 ans. Du haut de mes 10 ans, j'avais compris qu'il y avait pas mal de dissention entre les parents, souvent avec les nouveaux arrivés, qui arrivaient comme des consommateurs avec leurs exigences dans une structure existante, n'ayant pas vecu le vrai combat, les sacrifices des fondateurs.
    Avec un peu d'astuce et beaucoup de bonne volonté, les français peuvent avoir un choix de scolarisation, et je crois que le probleme financier est encore un faux probleme (mine de rien, l'ecole meme gratuite coute chere...cantine, trajets, sorties, ventes de gateaux qu'il faut fournir, cadeaux de fete des meres et peres qu'il faut payer et j'en passe...je ne parle pas des ecoles privées et hors contrat).

    Comme on ne peut rien attendre de l'etat, a nous de faire notre petit bonhomme de chemin avec les moyens mis a notre disposition.

    RépondreSupprimer
  13. "Ce mensonge est que tout enfant peut devenir ce qu’il souhaite, pourvu qu’il travaille pour cela. "
    "nous exigeons trop des plus faibles, nous exigeons les mauvaises choses de la part des élèves ordinaires, et nous exigeons trop peu de la part des meilleurs." Surtout quand tout le monde est mélangé.
    Votre billet est limpide.
    C'est dommage que nous soyions peu à vous en faire un retour, car vous faites un remarquable travail.
    Vous êtes beaucoup lu, mais vous impressionnez le commentateur potentiel ^^. On a peur de dire des bêtises quand on est commentateur et on ne veut pas faire de tache sur un si beau blog.

    RépondreSupprimer
  14. Merci Carine pour votre appréciation.
    Je ne me plains pas de ne pas avoir beaucoup de retours. Je sais bien que mes billets ne se prêtent pas tellement au commentaire, et puis la qualité est bien plus importante que la quantité^^.

    RépondreSupprimer
  15. Je viens de lire l'ensemble de cette intéressante conversation entre Sonia, Carine et Aristide.

    Cette idée d'école à la maison, ou d'un précepteur communal payé conjointement par la mairie, le conseil général et les parents a beaucoup d'avenir.
    Quelques soient les problèmes induits nous y viendront à mesure que se désengage l'Education Nationale dans les villages de nos campagnes qui se repeuplent.


    La nature a horreur du vide c'est bien connu !

    RépondreSupprimer
  16. La nature sans doute, mais l'Etat a encore plus horreur qu'on prenne sa place! Il préfère le vide à la liberté.

    Plus sérieusement, l'école à la maison peut être une alternative intéressante dans certains cas. Mais cela suppose au minimum que les pouvoirs publics permettent à ces initiatives de se développer et ne les étouffe pas dans l'oeuf avec des montagnes de réglementation sous prétexte d'assurer "l'égalité" ou "la qualité de l'enseignement".
    C'est pas gagné. Mais la diversification de l'offre scolaire (et pas seulement l'école à la maison) est sans doute la meilleure chance que nous ayons de nous en sortir.

    RépondreSupprimer
  17. J'achève cette première partie avec beaucoup d'enthousiasme pour la suite. Murray a un grand mérite en admettant une idée qui, au fond, nous rend malades : la différence de QI conditionne inévitablement le niveau scolaire. Pour autant le refus de voir cette évidence mène à des souffrances qui sont sans doutes plus grandes et plus lancinantes que d'accepter qu'on (ou qu'un proche) a des capacités scolaires plus faibles : le sentiment d'être toujours en retard, d'être incompris, aussi. Et évidemment l'humiliation des mauvaises notes quand on fait l'effort de travailler que, malgré tout, on "n'y arrive pas".

    Le problème, abordé en filigrane dans le témoignage Sonia et dans la discussion qui a suivi, c'est cette histoire du collège unique, et du système scolaire uniforme en général. La réponse pourrait venir d'une diversification (de fait) de l'offre scolaire (une hérésie, actuellement, pour une partie de l'opinion).

    Ayant moi-même des proches qui pourraient fort bien se situer dans la catégorie des élèves à moindre potentiel, je pense qu'une instruction scolaire plus adaptée aurait au moins deux effets : (1) atténuer la frustration et l'humiliation d'être toujours bon dernier ou de galérer à atteindre la moyenne ; (2) bénéficier d'un cadre plus propice à l'exploitation de ses capacités réelles lesquelles (c'est une supposition) pourraient fort bien être inhibées par la frustration évoquée plus haut.

    RépondreSupprimer

LES COMMENTAIRES ANONYMES SERONT SUPPRIMES SANS AUTRE FORME DE PROCES, ALORS FAITES L'EFFORT DE PRENDRE UN PSEUDONYME OU DE SIGNER VOTRE MESSAGE. MERCI.